14-18 NOUVELLE FORMULE LE JOURNAL DU CENTENAIRE LESVIOLENCES DE GUERRE FAITESAUXCIVILS Mardi 7 octobre 2014 70e année No 21685 2 € France métropolitaine www.lemonde.fr ― Fondateur : Hubert BeuveMéry Affaire Bygmalion : Sarkozy directement menacé INTERNATIONAL QUALIFICATION SURPRISE DE LA DROITE AU BRÉSIL ▶ Les enquêteurs évoquent un «financement illégal de la campagne» 2012 et s’interrogent sur le rôle du candidat → LIRE PAGE 5 ÉCONOMIE L’ affaire Bygmalion est bien une affaire Sarkozy. Les policiers qui enquêtent sur un soupçon de fi nancement occulte de la campagne pré sidentielle de Nicolas Sarkozy en 2012 par des fausses factures imputées à l’UMP évoquent l’infraction de « financement illégal de la campagne électorale » et plus seulement celle d’« abus de confiance ». Dans un procèsverbal de synthèse ré digé le 1er octobre, la chef de l’Office cen tral de lutte contre la corruption et les in fractions financières et fiscales, Chris tine Dufau, affirme que « les deux parties ont établi de fausses factures [à hauteur de plus de 18 millions d’euros] pour éviter de devoir comptabiliser dans le compte de campagne des factures de prestations liées à cette campagne ». Elle précise, comme pour répondre à Nicolas Sarkozy et JeanFrançois Copé – patron de l’UMP au moment des faits – qui ont démenti avoir eu connaissance du système frauduleux : «Etant donné le nombre de meetings, l’enjeu financier qu’ils représentaient, il peut paraître très surprenant que personne ne se soit préoc cupé de leur financement, et que les res ponsables du groupe Bygmalion n’aient pas pris contact avec ceux de l’UMP.» p LIRE L’ ENQUÊTE DE GÉRARD DAVET ET FAB R I C E L H O M M E PAG E S 7 E T 8 Face aux djihadistes, Paris a cherché l’aide de Damas ▶ La reprise de contact pour obtenir des renseignements a échoué à cause des conditions fixées par Assad LA MACHINE À RÊVES D’EURO DISNEY VIRE AU CAUCHEMAR → LIRE CAHIER ÉCO PAGE 4 ISRAËL COMPROMET LA CRÉATION D’UN ÉTAT PALESTINIEN → LIRE PAGE 23 ▶ Notre enquête : parcours de trois Français partis combattre en Syrie DOSSIER PROFESSIONS RÉGLEMENTÉES, UN MAL FRANÇAIS L I R E PAGES 2, 12 ET 13 → LIRE CAHIER ÉCO P. 1 , 8 -9 INTERNATIONAL L’ACCUEIL DES DIVORCÉS REMARIÉS, UN TEST POUR LE PAPE FRANÇOIS Des partisans du Front AlNosra protestent contre le régime syrien et l’offensive occidentale, le 26 septembre, à Alep. → LIRE FADI AL-HALABI/AFP UK price £ 1,90 À NOS LECTEURS LE MONDE CHANGE, L’ESPRIT DEMEURE par gilles van kote L’ évolution des usages et la métamor phose du paysage des médias nous obligent en permanence à nous réinventer et à re penser notre façon d’exercer le métier de journa liste. Lundi 6 octobre, Le Monde franchit une nou velle étape dans sa transformation en média multi support, qui se déploie aussi bien sur le papier (le quotidien, le magazine M et les horsséries) que sur le numérique (Lemonde.fr, l’application mobile pour tablette et smartphone). Ce journal que, chaque jour, deux millions de lec teurs tiennent entre leurs mains ou consultent sur Internet se veut plus audacieux et mieux hiérar chisé. Il ose l’article au long cours, mais aussi la photo, le dessin ou l’infographie grand format, au ris que de faire grincer les dents de ceux de nos lecteurs qui nous préfèrent austères. Il assume ses choix, dans la forme comme sur le fond. Contrairement à ce que des experts éclairés annonçaient, le papier n’a pas disparu. Il offre aujourd’hui une expérience de lecture différente de celle proposée par les supports numériques. Il doit jouer la complémentarité avec ceuxci. Le succès des smartphones accentue la né cessité de cette différenciation. → LIRE PAGE 16 LE REGARD DE PLANTU PAGE 4 Olivier ROLIN Luc Besson, après le triomphe de «Lucy» PORTRAIT La critique l’a souvent incendié. Mais Lucy a été un succès plané taire: il a rapporté 400 millions de dollars au réalisateur et lui a permis de se renflouer. Le ci néaste et homme d’affaires re çoit Le Monde, tel un Orson Wel les volontairement débraillé. L’homme se confie peu. Il renoue avec le temps des succès, lorsque Le Cinquième Elément et Le Grand Bleu faisaient de lui le fer de lance du cinéma français à Hollywood. « Un livre bouleversant. » Raphaëlle Leyris, Le Monde des Livres « Un récit sobre à broyer le coeur. » Marie-Laure Delorme, Le Journal du Dimanche roman → LIRE L’ENQUÊTE DE LAURENT CARPENTIER P. 18-19 Algérie 180 DA, Allemagne 2,40 €, Andorre 2,20 €, Autriche 2,50 €, Belgique 2 €, Cameroun 1 800 F CFA, Canada 4,50 $, Côte d'Ivoire 1 800 F CFA, Croatie 19,50 Kn, Danemark 30 KRD, Espagne 2,30 €, Finlande 3,80 €, Gabon 1 800 F CFA, Grande-Bretagne 1,90 £, Grèce 2,40 €, Guadeloupe-Martinique 2,20 €, Guyane 2,50 €, Hongrie 950 HUF, Irlande 2,40 €, Italie 2,40 €, Liban 6 500 LBP, Luxembourg 2 €, Malte 2,50 €, Maroc 12 DH, Norvège 28 KRN, Pays-Bas 2,40 €, Portugal cont. 2,30 €, La Réunion 2,20 €, Sénégal 1 800 F CFA, Slovénie 2,50 €, Saint-Martin 2,50 €, Suède 35 KRS, Suisse 3,40 CHF, TOM Avion 450 XPF, Tunisie 2,40 DT, Turquie 9 TL, USA 4,50 $, Afrique CFA autres 1 800 F CFA 2 | international 0123 MARDI 7 OCTOBRE 2014 A Damas, le 12 septembre. OLGA KRAVETS/SALTIMAGES POUR « LE MONDE » Le jour où Paris a voulu renouer avec Damas Le régime syrien a conditionné la coopération antiterroriste à la réouverture de l’ambassade de France L es interférences entre les impératifs de la lutte antiterroriste et les enga gements diplomatiques de la France confinent parfois à la schizophrénie. Alors que l’Elysée et le Quai d’Orsay continuent de proclamer qu’il n’est pas question de coopérer avec Bachar AlAssad, le dictateur syrien ayant causé près de 200 000 morts et perdu « toute légitimité », les services de police et du renseignement intérieur aime raient relancer la coopération avec leurs homologues syriens. Pressée d’éviter que des djiha distes français partis en Syrie ne reviennent sur le sol natio nal commettre des attentats, la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) a tenté, à la fin du premier trimestre 2014, selon les informations du Monde, de ré tablir un lien direct avec les servi ces de renseignement syriens afin d’obtenir des informations per mettant d’anticiper les éventuel les menaces. Le régime de Bachar AlAssad a répondu à ce souhait en indi quant qu’il était prêt à coopérer dès lors que la France déciderait de rouvrir son ambassade en Sy rie, fermée depuis le 6 mars 2012. Cette éventualité a été rejetée par François Hollande, qui reste très engagé contre le régime de Damas tout en ayant rejoint la coalition internationale contre l’« Etat islamique » (EI), la princi pale force djihadiste en Syrie, op posée tant à l’Occcident qu’à Ba char AlAssad. Maillon manquant Si la DGSI dispose de moyens techniques et humains impor tants pour surveiller sur le sol français les candidats au djihad syrien et leurs communications, il lui manque, en revanche, un maillon précieux : celui de leurs activités et de leurs mouvements en Syrie. La rupture brutale des contacts entre Paris et Damas a asséché la source syrienne d’in formation et prive, depuis deux ans et demi, la DGSI d’éléments jugés importants. D’autres pays occidentaux, comme l’Allemagne, par exem ple, ont poursuivi leurs relations avec les autorités syriennes, et notamment leurs services de ren seignement. Berlin a, de la même manière, maintenu le contact avec le Hezbollah et l’Iran. La DGSI a dû, dans certains cas, pas ser par son partenaire allemand pour obtenir, indirectement, des informations sur des Français au cœur d’enquêtes en cours. Mais cette procédure indirecte consti tue un frein à l’efficacité du tra vail de la DGSI. Aussi, alors que le flux de dé parts djihadistes atteignait déjà des niveaux jugés très inquiétants par les autorités françaises, et plu sieurs semaines avant que Mehdi Nemmouche ne soit arrêté, fin mai, à Marseille, les services de renseignement français se sont rendus à Damas. La délégation comprenait notamment l’officier de liaison de la DGSI à Amman, en Jordanie, où ont été réaffectés les fonctionnaires précédemment en poste à Damas, et son collègue de la Direction générale de la sécu rité extérieure (DGSE). Selon une source issue du ren seignement français, « l’objectif était de renouer le dialogue, car le besoin de renseignement opéra tionnel est réel et pouvait au moins se faire sous forme d’échanges ». Mais le régime de Damas a con ditionné son aide, toujours selon la même source, à un signe de re connaissance de la France et « à l’arrêt des critiques publiques à son encontre du chef de l’Etat, François Hollande, et du ministre des affaires étrangères, Laurent Fabius ». Des exigences inaccepta bles pour Paris. Ali Mamlouk, conseiller spécial pour la sécurité du président sy rien, Bachar AlAssad, et chef de la sécurité nationale, inspirerait lar gement cette ligne. Au cours des mois qui ont suivi la visite des re présentants de la DGSI et de la DGSE à Damas, d’autres canaux ont été activés par Damas pour promouvoir, en France, l’idée La rupture des contacts entre Paris et Damas prive, depuis deux ans et demi, la DGSI d’éléments jugés importants d’une réouverture de l’ambas sade française contre une coopé ration antidjihadistes. Des intermédiaires classiques, tels que certains parlementaires, membres d’associations d’ami tié francosyrienne, ont été solli cités ainsi que d’anciens hauts responsables du renseignement français. Parmi eux, l’ancien patron de la DGSI (alors appelée Direction de la surveillance du territoire, puis Direction centrale du renseigne ment intérieur, de 2007 à 2012) Bernard Squarcini a con firmé au Monde avoir été appro ché pour tenter de faciliter la coo pération entre Paris et Damas sur le terrain du renseignement. Il s’est refusé à fournir tout détail sur les autorités syriennes qui l’avaient sollicité ou sur les per sonnes à qui il a transmis le mes sage. Il a seulement indiqué qu’il entendait « laisser les services faire leur travail ». Un Français, négociant interna tional de pétrole, Xavier Houzel, qui fut pendant plus de trente ans le plus gros acheteur de pétrole syrien, a également confirmé, au Monde, avoir été destinataire d’un message similaire de la part de proches de la présidence sy rienne. « La position de Damas est claire, ils disent : nous sommes un gouvernement légitime et souve rain, nous ne sommes pas des clan destins, ouvrez votre ambassade et nous sommes ouverts à tout, même discrètement. » « Aucun projet de réouverture » Au sommet de l’Etat français, la manœuvre syrienne pour rom pre son isolement international en monnayant l’aide dans la lutte contre le terrorisme a été moyen nement appréciée. La DGSE, qui n’était pas en pointe dans la délé gation partie à Damas, conserve une réserve inhérente à sa posi tion au sein du monde du secret. A la différence de la DGSI, qui joue un rôle de défense du terri toire, la DGSE est un service « of fensif ». Interrogée sur la démarche con jointe menée, au printemps, auprès de Damas avec la DGSI, la DGSE a assuré au Monde qu’elle « n’envisage aucune reprise de contact avec les services syriens ». Le principal intéressé, le minis tère de l’intérieur, qui a autorité sur la DGSI, a choisi, pour sa part, de caler sa réaction officielle sur celle de la présidence de la Répu blique. « Nous n’avons pas de con tact avec les services syriens », s’est borné à répondre son portepa role, sans démentir la tentative de reprise de contact lancée par le poste de la DGSI à Amman. Enfin, le Quai d’Orsay, le plus ré tif à ce type de contact, même si formellement Paris n’a pas rompu ses relations diplomati ques avec Damas, a précisé qu’« il n’y a aucun projet de réouverture de l’ambassade de France à Da mas » avant d’ajouter : « Nous rap pelons que nous soutenons l’oppo sition modérée en Syrie qui se bat sur deux fronts, contre la barbarie de Daech [l’acronyme arabe de l’Etat islamique] et contre le ré gime de M. Bachar AlAssad, qui en est à l’origine. » p LES DATES 2000 Jacques Chirac est le seul chef d’Etat occidental à assister aux funérailles du président syrien Hafez Al-Assad. 2005 L’ex-premier ministre du Liban Rafic Hariri est tué dans un attentat à Beyrouth. La communauté internationale y voit la main de Damas. M. Chirac tente d’isoler diplomatiquement la Syrie. 2008 Bachar Al-Assad est invité à Paris par Nicolas Sarkozy et assiste au défilé du 14-Juillet dans la tribune officielle. 2012 Fermeture de l’ambassade de France à Damas. jacques follorou L’armée syrienne tente d’encercler définitivement Alep alep subiratelle le même sort que Homs, reconquise en mai par l’armée sy rienne après deux ans de siège et un assaut final de deux mois ? Les forces de sécurité de Bachar AlAssad ont lancé, vendredi 3 octo bre, l’offensive sur cette ville du nordouest du pays, dont les secteurs orientaux ont été conquis par l’opposition en 2012. Après l’avancée des forces gouvernemen tales sur des petites localités au nord de l’ancienne capitale économique syrienne, les combats contre des groupes de l’oppo sition armée se concentraient, dimanche, à Handarat et aux abords de Sifat, autour de la dernière grande voie d’approvision nement dont disposent les rebelles d’Alep vers la Turquie. La prise de cet axe routier par les forces loyalistes pourrait prendre au piège opposants et civils dans la ville. « La situation est inquiétante mais pas irré versible », a indiqué, dimanche, l’Armée sy rienne libre (ASL). « Le régime a fait une avancée dans le but d’assiéger Alep, mais l’ASL et les autres forces révolutionnaires se défendent bien. » L’ASL affirme avoir capturé des soldats du régime, dont des miliciens li banais et afghans, et détruit des chars. Au moins 28 rebelles tués Selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH), les brigades proches de l’ASL combattent aux côtés des brigades is lamistes du Front Ansar AlDin et du Front AlNosra contre les forces du régime, ap puyées par le mouvement libanais Hezbol lah et des combattants chiites iraniens et afghans. L’aviation syrienne a bombardé dimanche les secteurs de Hayan et Halak au moyen de barils d’explosifs. La télévi sion d’Etat syrienne avait annoncé, ven dredi, la prise de contrôle par les forces gouvernementales des localités de Mouda fah, Handarat et Sifat, ainsi que de quatre carrefours à l’ouest de Sifat, tuant « de nombreux terroristes et détruisant des di zaines de voitures ». Au moins 28 rebelles et 16 combattants loyalistes auraient été tués, selon l’OSDH. Au nordest de la province d’Alep, les combats se poursuivaient entre forces kur des et djihadistes autour de la ville kurde de Kobané, assiégée par l’Etat islamique. Une combattante kurde des Unités de pro tection populaire (YPG) a commis, diman che, un attentatsuicide contre un barrage du groupe djihadiste à l’est de la ville. p hélène sallon international | 3 0123 MARDI 7 OCTOBRE 2014 Le régime iranienest«sourcede déstabilisation» Pour Reza Pahlavi, fils du chah d’Iran, Téhéran est indirectement responsable de l’émergence de l’EI E ENTRETIEN n exil depuis 1979, Reza Pahlavi, 53 ans, fils du chah d’Iran, est le prési dent du Conseil national iranien pour les élections libres. Cette coalition d’opposition, créée en avril 2013, compte dixhuit or ganisations politiques, allant des républicains aux monarchistes en passant par les sociauxdémocra tes et des représentants du « mou vement vert ». M. Pahlavi revient pour Le Monde sur l’Etat islamique (EI), le dossier nucléaire iranien et la présidence d’Hassan Rohani. L’EI menace l’Irak et la Syrie ainsi que les pays voisins comme l’Iran. La stratégie de la coalition internationale vous sembletelle adaptée ? Il faut chercher la source des cri ses actuelles. L’islam politique, la radicalisation, la déstabilisation de la région ont été provoqués par l’arrivée du régime islamique en Iran. Avant la révolution de 1979, le MoyenOrient était une zone sta ble. La question de l’affrontement sunnitechiite n’existait pas. Le ra dicalisme chiite du régime iranien, qui a toujours cherché à imposer son hégémonie régionale, a en gendré une réaction au sein du bloc sunnite, qui s’exprime de la pire manière avec le radicalisme des groupes sunnites. Si l’on regarde les choses par le petit bout de la lorgnette, jamais cette crise ne sera réglée. C’est un peu comme faire la guerre aux moustiques sans assécher le maré cage. Il faut une solution plus profonde qui repose sur deux facteurs : la libéralisation démo « La République islamique a soutenu de façon claire le régime de Bachar Al-Assad dans la répression de ses citoyens » cratique des pays de la région et la laïcité. L’Iran, par son influence en Sy rie et en Irak, n’atil pas un rôle à jouer dans la résolution de ces crises ? La République islamique a sou tenu de façon claire le régime de Bachar AlAssad dans la répression de ses citoyens. Des milliards de dollars ont été envoyés, sans parler de munitions et d’armes, pour le soutenir contre l’opposition sy rienne. La même chose en Irak. Le régime des mollahs prétend pou voir aider alors qu’il est luimême la source de cette déstabilisation ! Il fait partie du problème et non de la solution. Il n’y a aucun dialo gue possible. La survie de la Répu blique islamique dépend de la destruction de son ennemi : l’Oc cident avec toutes ses valeurs − droits de l’homme, libertés dé mocratiques, laïcité − qui sont un poison pour lui. La solution est à trouver dans les peuples de cette région qui sont victimes de ces ré gimes. Ils sont vos meilleurs alliés naturels, mais ils ne sont pas inté grés au dialogue. Les négociations sur le pro gramme nucléaire iranien doi vent s’achever le 24 novembre. Les talibans pakistanais se rallient à l’EI Les talibans pakistanais se sont ralliés, samedi 4 octobre, à l’« Etat islamique » (EI) et ont appelé les combattants islamistes de toute la région à soutenir la cause du mouvement djihadiste en faveur de l’instauration d’un califat transnational. « Oh frères, nous sommes fiers de vos victoires. Nous sommes avec vous dans la joie comme dans la peine », a déclaré Chahidullah Chahid, porte-parole du Tehrik-e-Taliban Pakistan (TTP), dans un message transmis à l’occasion de la fête musulmane de l’Aïd el-Adha. « De grâce, renoncez à toutes vos rivalités. Tous les musulmans du monde nourrissent de grands espoirs à votre sujet (…). Nous sommes avec vous. Nous vous fournirons des moudjahidin et tout le soutien possible », ajoute-t-il dans ce communiqué. Rien n’atteste pour le moment l’existence de liens directs entre le TTP et l’EI, mais des membres du mouvement ont été vus récemment distribuant des tracts à Peshawar, capitale de la province de Khyber Pakhtunkhwa, l’une des « agences tribales » du nord-ouest du Pakistan frontalières de l’Afghanistan. Des drapeaux de l’EI ont par ailleurs été vus dans le Cachemire indien. Pensezvous un accord final possible ? Pensezvous qu’un régime qui développe un programme nu cléaire uniquement civil amène rait son pays au bord de conflits militaires et imposerait à son peuple les conséquences des sanctions économiques qui en découlent ? Il y a un manque de transparence sur ses intentions. Le dernier rapport de l’Agence internationale pour l’énergie ato mique indique que les experts n’ont pas accès à l’information nécessaire. Récemment, M. Khamenei [le Guide suprême] a ordonné l’aug mentation du nombre de centrifu geuses. Le régime maintient ses installations à Qom, Natanz et Arak. C’est contradictoire avec ses déclarations de développer uni quement du nucléaire civil. Le régime cherche comme d’habitude à gagner du temps, pour faire de sa capacité nucléaire militaire un fait accompli. La seule façon d’éviter la prolifération nucléaire dans la région est de soutenir le peuple iranien dans ses aspirations démocratiques. C’est dans l’intérêt vital de l’Occident, comme de la Russie et de la Chine. démocratie. Car, finalement, le ré gime tient, et qui souffre ? Les gens disent : « On est prêts à se serrer la ceinture, mais si cela nous aide à nous débarrasser de ce régime. » Pensezvous que des sanctions soient la solution pour faire pression sur l’Iran ? La stratégie est mauvaise. Si les sanctions sont appliquées dans l’espoir d’un changement de com portement du régime, cela signi fie que l’on n’a pas encore com pris que ce régime ne peut pas changer. Une politique de sanc tions n’est efficace que si l’objectif est d’aider le peuple à parvenir à la « Peu importe qui représente le régime islamique. Tous servent la même dictature théocratique » Quel bilan tirezvous de la pré sidence d’Hassan Rohani, un an et demi après son élection ? Dans la première année de la présidence Rohani, il y a eu plus d’emprisonnements politiques et d’exécutions que lors de la der nière année d’Ahmadinejad. C’était la même chose à l’époque de Mohammad Khatami [prési dent iranien entre 1997 et 2005], qui lui aussi disait qu’il n’y avait pas de prisonniers politiques. C’est pourquoi qui représente le régime islamique – qu’il sourie un peu plus aux Nations unies ou qu’il soit plus antipathique – im porte peu. Tous servent la même dictature théocratique. Les intentions de la République islamique sont par nature mau vaises. Dans l’islam chiite, le ta ghiyeh (« dissimulation ») vous donne le droit de dissimuler vos intentions. L’Occident tombe dans ce piège à chaque fois. Quelle alternative proposez vous pour l’Iran ? Le peuple iranien doit être maî tre de sa destinée. La seule façon d’y arriver est l’organisation d’élec tions libres. Il n’y a pas, en Iran, d’espace de liberté politique qui permette de mesurer la volonté du peuple. Il faut aider la société à se libérer par un mouvement de dé sobéissance civile, non par des scé narios militaires ou de coup d’Etat. Le régime, miné par les dissen sions, ne pourrait pas résister face à une nation qui se soulève. L’instauration de la démocratie en Iran amènerait les puissances sunnites de la région au constat qu’elles n’ont plus besoin de faire contrepoids à la théocratie ira nienne. Cela mettrait fin au conflit chiitesunnite, à la discrimination ethnique ; la menace nucléaire dis paraîtrait et le processus de paix israélopalestinien pourrait enfin aboutir. Pour atteindre cet objectif, le dia logue avec les nations démocrati ques est primordial. Cet investisse ment n’a pas été fait. Ne trouvez vous pas étrange qu’en trente cinq ans il n’y ait eu aucun dialogue officiel avec l’opposition démocratique iranienne, qu’elle soit à l’intérieur ou à l’extérieur du pays ? Chaque fois que les peuples du MoyenOrient demandent de l’aide, on les ignore, puis devant les conséquences catastrophiques, on réagit trop tard et trop faiblement. L’exemple de la crise syrienne et de l’émergence de l’EI sont parlants. Hélas, les Etats démocratiques n’ont pas de véritable vision straté gique sur ces questions. p propos recueillis par hélène sallon EnSomalie,lesislamistes chababperdentleur dernierport La chute de Baraawe prive les djihadistes de leur dernière ouverture sur la mer, mais ils contrôlent toujours de nombreuses zones rurales johannesburg C correspondant régional e n’est qu’un petit port dé crépi aux pierres centenai res, une trouée dans la barrière de corail qui longe la côte somalienne, et où le commerce des esclaves et celui des bananes, qui firent sa prospérité, sont dé sormais oubliés, au profit d’activi tés plus modernes : Ba raawe (Brava), sur la côte sud de la Somalie, entre Mogadiscio et la frontière kenyane, était jusqu’à dimanche 5 octobre un centre d’exportation de charbon de bois vers la péninsule Arabique, et la « capitale » informelle des insur gés somaliens du groupe AlCha bab, affilié à AlQaida. C’était aussi, depuis des mois, l’un des objectifs principaux de la coali tion des troupes gouvernementa les et de l’Amisom, la force de l’Union africaine. En dépit de quelques accrocha ges, les Chabab ont quitté le port sans combattre, laissant la coali tion en prendre possession. C’est le second coup sérieux qui leur est porté en cinq semaines. Le 1er sep tembre, leur émir, Ahmed Abdi « Godane » (Mokhtar Abou Zuber), était tué, non loin, par une frappe américaine. Depuis dimanche, les membres du Harakat AlChabab AlMoudjahidin (le Mouvement des jeunes combattants, autre nom d’AlChabab) ont aussi perdu Baraawe, leur petite « capitale ». Ils ne sont pas partis très loin : des lo calités à moins de vingt kilomètres sont encore sous leur contrôle. Les insurgés se promettent aussi de re venir attaquer à la première occa sion, au besoin par des attentats, depuis Jilib ou Dinsor (à 100 km). Les Chabab continuent à prélever des taxes le long de routes où la coalition ne s’aventure qu’en gros convois Cela faisait des mois que l’opéra tion « Océan Indien » devait per mettre à la coalition au sein de la quelle l’Amisom, avec un fort ap pui occidental, joue un rôle mili taire de premier plan, de prendre le dernier port contrôlé par les Chabab dans le Sud somalien, même si ces derniers contrôlent toujours des couloirs vers des zones de contrebande au Nord. Plusieurs fois, l’offensive prévue avait avorté. La prise de Baraawe était stratégi quement indispensable. D’abord, la ville était la dernière ouverture sur la mer pour les Chabab depuis la perte de Mogadiscio, Kismayo et Merka. Le port est accessible toute l’année, et permet la circulation d’hommes et d’armes, notam ment avec le Yémen. Depuis Ba raawe, il est également possible d’envoyer des embarcations vers le Kenya. Récemment, le pays voisin – qui est intervenu militairement en Somalie et dont les alliés locaux contrôlent Kismayo – a vu la filiale locale des Chabab attaquer sur son propre sol, près de Lamu. Des sour ces kenyanes estiment qu’une par YÉMEN DJIBOUTI Golfe d'Aden OCÉAN INDIEN ÉTHIOPIE SOMALIE KENYA Marka Mogadiscio Baraawe Kismaayo 250 km tie de la logistique, alors, a été assu rée depuis Baraawe. Le port était aussi crucial pour les finances des djihadistes, qui y prélevaient des taxes sur les exportations de char bon de bois, recueillant plusieurs dizaines de millions de dollars par an, selon les Nations unies. Mais Baraawe était aussi un cen tre nerveux du commandement insurgé. C’est là, en 2009, que Sa leh Ali Saleh Nabhan, un des res ponsables d’AlQaida pour la ré gion, coorganisateur des atten tats de Nairobi et Dar es Salaam (1998), avait été tué lors d’une opération héliportée américaine. En 2013, une autre tentative simi laire avait tourné au désastre : l’équipe des Navy Seal américains, responsable de l’opération au Pa kistan ayant entraîné la mort d’Oussama Ben Laden, échouait dans l’opération de capture d’un commandant local, et parvenait à rembarquer en évitant de justesse de se faire massacrer. Depuis, les Chabab conti nuaient à tenir leur choura (con seil) dans le vieux port du réseau commercial swahili. Si les princi pales villes de Somalie sont tom bées aux mains de la coalition progouvernementale, les campa gnes appartiennent toujours aux insurgés, de même que des peti tes villes de moindre importance. Les Chabab continuent à prélever des taxes le long de routes où la coalition gouvernementale ne s’aventure qu’en gros convois. De puis leurs zones rurales, les Cha bab continuent à organiser atta ques et attentats, même si le temps n’est plus aux grandes of fensives. La perte de Baraawe, même si elle constitue un re vers et complique leur logistique, ne signifie donc pas la fin de leur mouvement. Celuici avait été réorganisé sous la poigne de fer de « Go dane » après une série de défaites, lorsque les Chabab avaient perdu Mogadiscio en 2011, puis Kismayo en 2012. L’exémir avait imposé son autorité et celle de l’Amniyat, une force chargée du renseigne ment et des assassinats, y com pris à l’intérieur du mouvement. L’émir évitait de se montrer, et en core plus de communiquer, pour éviter d’être assassiné par les for ces étrangères. Il a finalement été tué sur la route de Baraawe. Les Chabab avaient alors annoncé qu’ils « feraient payer chèrement cette mort » – un attentat, deux jours plus tard à Mogadiscio, avait fait 16 morts. La décision de nom mer à la tête de leur mouvement son exadjoint, Ahmed Diriye « Abou Oubaida », avait ensuite été prise lors d’une choura à Ba raawe. Ce fut la dernière de cette ampleur, alors qu’approchait la chute de la ville. p jeanphilippe rémy 4 | international & europe 0123 MARDI 7 OCTOBRE 2014 ARome, lesynodesur la familles’annonce tendu Le débat, lancé par le pape François, s’est cristallisé sur l’accueil des divorcés remariés A près l’expectative, l’épreuve des faits. Le synode des évêques qui s’est ouvert au Vati can, dimanche 5 octobre, pour deux semaines, est le premier pour le pape François. Il sera l’oc casion pour lui de prendre le pouls des conférences épiscopales et de tester sa capacité à faire bouger les lignes dans l’Eglise catholique. Sur le terrain de la doctrine tout d’abord. Ce synode extraordinaire sera consacré à « la famille dans le contexte de l’évangélisation ». Le modèle catholique du mariage in dissoluble entre un homme et une femme, en vue de faire des en fants, est aujourd’hui défié par toutes sortes d’évolution. Depuis un an, le pape a provoqué le débat. A l’automne 2013, Rome avait en voyé aux diocèses un question naire très ouvert (de la cohabita tion hors mariage aux couples de même sexe avec enfants, en pas sant par les familles monoparen tales, la contraception, les maria ges interreligieux ou la polyga mie). Les réponses ont fait appa LEXIQUE SYNODE Institué après le concile de Vatican II, le synode des évêques réunit périodiquement les représentants des conférences épiscopales. Convoqué par le pape sur un sujet donné, il est consultatif. Qualifié d’« extraordinaire », celui du 5 au 19 octobre est composé de 181 membres, surtout des présidents des conférences épiscopales (114). Présidé par le pape, il a trois présidents délégués, dont le français André Vingt-Trois, archevêque de Paris. Un second synode « ordinaire » sur la famille se tiendra dans un an. Plus large, il comprendra plusieurs représentants de chaque conférence épiscopale. « La division est un péché très grave, elle est l’œuvre du diable » LE PAPE FRANÇOIS raître un fossé entre la famille telle que la conçoit l’Eglise et la réalité. Lors d’une veillée de prière, sa medi, place SaintPierre, le pape a appelé les évêques à « entendre le cri du peuple » et à avoir « un débat sincère, ouvert et fraternel qui con duise à prendre en charge les inter rogations dont est porteur ce chan gement d’époque ». Le débat s’est cristallisé ces der niers mois sur la place des divor cés remariés. La doctrine leur re fuse l’accès aux sacrements de la réconciliation (la confession) et de l’eucharistie (la communion), car elle les considère en état per sistant de péché grave. Beaucoup le vivent mal. François ne cesse d’engager l’Eglise à accueillir et à « soigner les blessures » avant de juger. Estil possible d’envisager une « procédure » leur permet tant d’accéder aux sacrements sans exiger la rupture de leur nou velle union ou la chasteté ? François a d’abord évoqué de vant la presse, en juillet 2013, la so lution adoptée par l’Eglise ortho doxe, qui permet aux divorcés de contracter une seconde union en conservant l’accès aux sacre ments. Puis il a choisi, en février, un partisan d’une évolution, le cardinal théologien Walter Kasper, pour introduire la question de vant les cardinaux. Depuis, les thè ses s’affrontent avec virulence, par cardinaux interposés. Cinq d’entre eux, dont Gerhard Müller, préfet de la Congrégation pour la doc trine de la foi, proche de Benoit XVI, et Raymond Burke, préfet du Tribunal suprême de la signature apostolique, ont publié un ouvrage prônant le statu quo, Des cardinaux et des évêques assistent à la messe d’ouverture du synode, le 5 octobre, à Rome. TONY GENTILE/REUTERS des aménagements risquant, se lon eux, de menacer l’édifice doc trinal. Des proches du pape sont du même avis. « Climat électrique » Il faut remonter à 1971 et au débat sur le célibat des prêtres pour trouver un affrontement aussi tendu. Au point que le cardinal Lo renzo Baldisseri, secrétaire géné ral du synode, a appelé, le 29 sep tembre, à « la sérénité, à la pondé ration et au calme » en reconnais sant « un climat électrique qui a du mal à s’apaiser ». « La division dans une communauté chrétienne est un péché très grave, elle est l’œuvre du diable », a twitté le pape le lendemain. Le débat ne sera pas non plus sans effets sur la gouvernance de l’Eglise. François a exprimé son souhait d’une plus grande collé gialité qui s’appuierait sur des « consultations réelles, pas formel les » du synode des évêques. Pour inciter les évêques à une véritable « confrontatio », selon le terme la tin qu’il a employé samedi, les or ganisateurs ont fait savoir que leurs interventions ne seront pas diffusées. « Les assemblées syno dales ne servent pas à discuter d’idées belles et originales, ou à voir qui est le plus intelligent », a averti Bulgarie :l’éternelretourdeBoïkoBorissov Le parti de l’ancien premier ministre de droite remporte les élections législatives du 5 octobre L sofia envoyée spéciale a Bulgarie, membre le plus pauvre de l’Union euro péenne, minée par la cor ruption et l’instabilité, n’est pas un pays comme les autres. Et Boïko Borissov, 55 ans, chef du parti de droite GERB (Citoyens pour le développement européen de la Bulgarie), n’a rien d’un « can didat normal ». Allure massive, cheveux ras, ancien pom pier ceinture noire de karaté, l’ex premier ministre chassé du pou voir par la rue en février 2013 de vrait être à nouveau le chef du gouvernement après la victoire de son parti aux élections législatives anticipées, dimanche 5 octobre. Avec 32,6 % des suffrages, le GERB a distancé le Parti socialiste (15,3 %) et le Mouvement pour le droit et les libertés (MDL), parti de la minorité turque (14,9 %). Un score qui n’offre toutefois pas à l’homme fort de la Bulgarie la ma jorité absolue. M. Borissov devra donc former une coalition. Une al liance avec le Bloc réformiste, petit parti de droite, est possible si ces derniers acceptent la primauté de M. Borissov. « Qui d’autre peut être premier ministre ? », a lâ ché ce dernier, crânement. Redoutable animal politique Mais cela pourrait ne pas suffire et toutes les options restent ouver tes, y compris des accords avec le petit parti populiste Bulgarie sans censure ou les nationalistes du Front patriotique. Une grande coalition avec les socialistes est même évoquée. « Presque tous peuvent intégrer une coalition. C’est le signe de la promiscuité ex trême du monde politique bul gare », constate Daniel Smilov, po litologue du Centre pour les straté gies libérales à Sofia. Ainsi, de crises en crises, d’élec tions en élections, les Bulgares re trouvent les mêmes visages au Un futur Parlement émietté Huit partis devraient être présents au Parlement, selon les résultats des législatives du 5 octobre portant sur 94 % des suffrages. Le parti GERB (droite) de Boïko Borissov arrive en tête avec 32,6 % et devance le Parti socialiste bulgare (PSB), à 15,29 %. Le PSB est talonné par le Mouvement pour le droit et les libertés, parti de la minorité turque, avec 14,91 %. Les autres résultats : Bloc réformiste (droite) : 8,91 % ; Front patriotique (nationaliste) : 7,32 % ; Bulgarie sans censure : 5,58 % ; Ataka (nationaliste) : 4,56 % ; ABV (socialiste) : 4,18%. gouvernement. Et si Boïko Boris sov n’est pas l’homme providen tiel qu’il prétend être, il fait figure de moindre mal. Moins populaire qu’à ses débuts, il démontre, avec cette nouvelle victoire, qu’il est un redoutable animal politique. Et un fin tacticien. En février 2013, après des semai nes de manifestations contre la hausse du prix de l’électricité, des « émeutes de la misère », disent certains, il a démissionné, à la sur prise générale. « Sa sortie était cal culée », pense le politologue Dimi tar Betchev. Quelques mois plus tard, en dépit d’une courte victoire aux élections anticipées, incapable de former une coalition, il laisse le pouvoir à ses rivaux du Parti socia liste, forcés de s’allier avec le parti de la minorité turque et tacite ment soutenus par les xénopho bes du parti Ataka. Leur gestion désastreuse jettera à nouveau les Sofiotes dans la rue, faisant presque oublier les dérives de M. Borissov. Dans une campa gne où aucun candidat n’a ré pondu aux questions de fond sur l’avenir de la banque CCB fermée depuis des mois, sur le prix de l’électricité ou sur le redressement économique. « Les gens n’ont plus confiance dans les politiques mais ils sont fatigués, ils veulent de la sta bilité », commente Svetlomira Gyurova, journaliste à l’hebdoma daire bulgare Capital. La stabilité, voici justement le slogan de M. Borissov. Faire régner l’ordre est, de fait, l’une de ses qua lités. L’ancien garde du corps du dictateur communiste Todor Ji vkov jouit de sa réputation de « su perflic » acquise lorsqu’il fut secré taire général de la police en 2001. A l’époque, les règlements de comp tes entre mafieux se multiplient, les rues de Sofia se jonchent de ca davres et la légende urbaine ra conte que Boïko Borissov ne serait pas étranger à ce « nettoyage ». Les dépêches de l’ambassade améri caine révélées par WikiLeaks dé nonçaient en 2006 la proximité de M. Borissov avec certains mafieux. « C’est un type autoritaire, fustige Valeri Zablyanov, du Parti socia liste. M. Borissov mêle le business et les affaires intérieures ». Il n’empê che, sa « gueule » et sa carrure sé duisent les femmes, tandis que son parler simple le fait apprécier des petits entrepreneurs. Son charisme suffiratil à apai ser le climat social ? « Le problème de M. Borissov est qu’il n’a pas d’idéologie. Lors de son précédent mandat, hormis des mesures popu listes, il n’a mené aucune réforme nécessaire dans la santé, les retrai tes, l’électricité… », souligne M. Bet chev. « Les gens voient de plus en plus que les élections ne changent rien », se désole Antony Todorov, professeur de sciences politiques, doutant que M. Borissov par vienne à terminer son mandat. p claire gatinois le pape, dimanche, en demandant aux participants une « sagesse qui va audelà de la science » et « une vraie créativité ». Un document fi nal sera mis au vote à la fin du sy node, puis diffusé pour une vaste consultation avant un second sy node, à l’automne 2015. Mais, au bout du compte, c’est au pape qu’il reviendra de tran cher. Jusqu’à présent il s’est gardé de dévoiler ses intentions. Il est évident que d’autres sujets que celui des divorcés remariés, sur tout porté par les représentants des Eglises occidentales, émerge ront. « La majorité des familles ca tholiques dans le monde sont pau vres, rappelle Eric de Moulins Beaufort, évêque auxiliaire de Pa ris. Elles sont dans la survie et ont d’autres problèmes. » Cependant, la question des di vorcés remariés a cristallisé les at tentes. Au point de faire aujourd’hui figure de test sur la capacité du pape François à faire bouger l’Eglise catholique. « Le pape a envoyé des signaux qui ont fait naître de l’espérance, analyse Thibaud Collin, auteur d’un livre sur le sujet. Mais il aura peu de marges de manœuvre, car la ques tion mobilise très profondément la doctrine. » p cécile chambraud LesdeuxCorées reprennentcontact Une délégation nordcoréenne s’est rendue au Sud pour la clôture des Jeux asiatiques L tokyo correspondance a visite surprise en Corée du Sud, samedi 4 octobre, de personnalités nordco réennes s’est traduite par la pro messe d’une reprise, fin octobre ou début novembre, des échanges au plus haut niveau entre les deux voisins. Dimanche, le ministre sudcoréen de la réunification, Ryoo Kihljae, a qualifié la visite d’« avancée significative ». La veille, il s’était entretenu avec Hwang Pyongso, nouveau vice président de la Commission na tionale de défense et considéré comme le numéro deux du ré gime, Choe Ryonghae, un proche du dirigeant Kim Jongun, et Kim Yanggon, du Parti du travail. Une délégation de si haut ni veau n’était pas venue au Sud de puis 2009 et les funérailles du président Kim Daejung, l’artisan du rapprochement intercoréen. Les envoyés nordcoréens ont rencontré M. Ryoo et le premier ministre, Chung Hongwon. M. Hwang a transmis « de chaleu reuses salutations » du leader Kim Jongun à la présidente sudco réenne, Park Geunhye, mais ils n’ont pas rencontré la dirigeante, par « manque de temps ». Outre la reprise du dialogue, la délégation semble avoir voulu rassurer sur l’état de santé de Kim Jongun, qui n’a pas été vu en public depuis plus d’un mois. Park Jiewon, l’un des architectes sudcoréens du sommet intercoréen de 2000, a estimé que Kim Jongun avait en voyé la délégation pour « montrer qu’il contrôle totalement le Nord et n’a aucun problème de santé ». Levée des sanctions « C’est une occasion en or pour Mme Park, estime John Delury, spécialiste de l’Asie à l’université sudcoréenne de Yonsei, si elle veut vraiment améliorer les rela tions bilatérales. » Les relations sont perturbées depuis le début de l’année par des tirs de missiles par le Nord, des manœuvres amé ricanosudcoréennes et de vifs échanges verbaux. Les discus sions à venir devraient notam ment porter sur la levée des sanc tions imposées à Pyongyang. Depuis plusieurs semaines, la Corée du Nord semble plus active sur le front diplomatique. Des né gociations sont en cours avec le Japon. Le ministre nordcoréen des affaires étrangères, Ri Su yong, est intervenu, fin septem bre, à la tribune de l’ONU, une pre mière depuis quinze ans. p philippe mesmer international | 5 0123 MARDI 7 OCTOBRE 2014 Au Brésil,DilmaRousseff domine lepremier tour La présidente sortante est en ballottage favorable. Marina Silva, éliminée, sera en position d’arbitre rio de janeiro correspondant L e suspense a duré jus qu’au bout. Au terme d’une campagne aux in cessants rebondisse ments, marquée par le décès acci dentel du candidat Eduardo Cam pos, l’ascension, puis la chute ver tigineuse de Marina Silva qui lui a succédé à la tête du Parti socialiste brésilien (PSB), la présidente sor tante, Dilma Rousseff, a large ment remporté, dimanche 5 oc tobre, le premier tour de la prési dentielle, avec 41,5 % des voix. La candidate du Parti des tra vailleurs (PT) devance de huit points Aécio Neves, le chef de file du Parti socialdémocrate brési lien (PSDB, centre droit), la princi pale formation d’opposition, qu’elle affrontera au second tour le 26 octobre. En écartant Marina Silva, l’exfa vorite surprise de cette élection, les électeurs brésiliens ont ex primé leur choix en faveur d’un duel classique PTPSDB, les deux partis qui alternent au pouvoir depuis près de vingt ans. Le signe d’une continuité revendiquée. Ce faceàface entre l’héritière de l’ex président Luiz Inacio Lula da Silva (20032010) et le petitfils de l’an cien président Tancredo Neves (1985) oppose deux personnalités fortes, originaires de l’Etat du Mi nas Gerais, le deuxième bassin électoral du pays. Deux économistes de forma tion, mais aux parcours et points de vue très dissemblables, ce qui laisse entrevoir une campagne de Dilma Rousseff a insisté sur les avancées sociales de son gouvernement et rappelé qu’elle a créé 11 millions d’emplois second tour fortement polarisée. D’après différentes enquêtes d’opinions, les électeurs du géant d’Amérique latine se montrent partagés entre fidélité au bilan des conquêtes sociales lancées par le mentor de Mme Rousseff, et défense d’un coup de barre libéral pour relancer une économie atone. Un clivage qui pourrait placer Mme Silva en position de faiseuse de roi éphémère du se cond tour. Dimanche soir, l’ancienne mi nistre de l’environnement de Lula n’a pas souhaité se pronon cer immédiatement. « Nous al lons organiser des réunions, dialo guer entre nous » avant de pren dre une « décision conjointe », a telle expliqué. Et d’ajouter : « Le pays a clairement signifié qu’il n’était pas d’accord avec la situa tion actuelle. » De fait, une récente enquête d’opinion a révélé que près de 74 % des Brésiliens souhaitaient un « changement ». Mais cette même enquête, publiée fin sep tembre, indiquait que plus d’un tiers d’entre eux estimaient que Dilma Rousseff était en mesure d’incarner un tel changement. Singulier retournement de situa tion pour celle qui incarne douze ans de politique du PT. L’ampleur du score de la prési dente sortante illustre la formi dable efficacité du PT et de sa ma chine électorale. C’est le parti qui, dès le début septembre, soit un peu plus de deux semaines après le décès accidentel en avion d’Eduardo Campos, a décidé de prendre pour cible Marina Silva et de retirer de sa mire le candi dat du PSDB. Le PT a immédiate ment compris le danger qu’elle représentait. Mme Silva atteignait alors 50 % des intentions de vote au second tour. Ordre a été donné de décons truire et désacraliser l’icône Ma rina. Fin stratège, Lula répète que « son électorat est volatil ». Dilma Rousseff décide de parler davan tage aux médias. Pleurs Elle insiste sur les avancées socia les de son gouvernement. Rap pelle que 11 millions d’emplois ont été créés au cours de son man dat alors que, pendant la même période, l’Europe en supprimait 62 millions. Avec un temps d’an tenne six fois plus important que sa principale challenger, la prési dente pointe, sans relâche, les failles du programme du PSB. Dilma Rousseff attaque « quand elle se sent menacée », précise le quotidien Valor. De fait, elle re proche à son adversaire de vou loir mettre un terme à l’explora tion du « présal », les très pro metteurs gisements pétroliers en eaux profondes découverts en 2007. Elle l’accuse de vouloir rendre la Banque centrale indé pendante ou encore d’envisager la suppression de la Bolsa Familia (bourse familiale), le programme phare du gouvernement d’alloca tions familiales lancé par Lula. Les ficelles sont parfois un peu gros ses mais Marina recule. Elle pleure même devant les attaques formulées par Lula, son vieil ami. « Moi aussi, j’aime Marina, lâche quelques jours plus tard le fonda teur du PT. Mais une élection n’est pas une question d’amour. » Après des semaines de silence, le PSDB s’attaque à son tour à la candidate du PSB. Aécio Neves dé laisse ses notes lors des débats té lévisés. Direct, d’un ton simple et clair, il pointe ses errements. Ma rina paraît isolée. Elle ne s’en re mettra pas. A charge désormais pour Aécio Neves de montrer ses qualités de rassembleur pour es sayer de récupérer les 22 millions d’électeurs de Marina Silva. p nicolas bourcier Marina Silva n’a pas tenu le choc de la campagne que s’estil passé ? Archifa vorite dans les sondages, consi dérée comme quasi invincible il y a encore à peine trois semai nes, celle qui se voulait l’apôtre d’une « nouvelle politique » en rupture avec le jeu des grands partis a échoué pour la deuxième fois devant la pre mière marche du scrutin prési dentiel. Avec à peine 20 % des voix, la vertigineuse ascension de Marina Silva vient de se sol der, dimanche 5 octobre, par une chute fracassante. Un échec personnel dont elle aura du mal à se relever. Ancienne du gouvernement Lula, candidate du petit parti des Verts en 2010 avant de re joindre le Parti socialiste (PSB), elle avait aggloméré une coali tion hétéroclite de Brésiliens épris de changement, de l’ex trême gauche (issue des Forums sociaux) à la droite (évangéli que) en passant par les milieux d’affaires. Devant ses promes ses contradictoires, la coalition s’est progressivement effritée. Frénésie Lorsqu’elle décide d’assumer, le 21 août, la candidature du PSB, huit jours après la mort d’Eduardo Campos, une vérita ble frénésie s’empare du pays. L’écologiste, Noire, originaire d’Amazonie et de confession évangélique, fait jeu égal avec la présidente Dilma Rousseff au premier tour, et la distance de dix points au second. Le 29 août, le lancement de son programme attire une foule compacte à Sao Paulo. Mais l’euphorie est de courte durée. Deux « erreurs » annon cent les premiers nuages. L’une au sujet d’un éventuel recours à l’énergie nucléaire et l’autre sur une loi criminalisant l’homo phobie. Mme Silva, qui n’avait pas lu la version imprimée, re tire les deux projets. Elle paiera le prix de son revirement. Sous le feu des critiques, elle paraît soudainement sur la défensive. Dilma Rousseff, sui vie par le candidat d’opposition Aécio Neves, s’engouffre dans les brèches. Malgré les injonc tions de ses conseillers, Mme Silva refuse d’entrer en confrontation directe avec ses adversaires. « Je ne gagnerai pas une élection à n’importe quel prix », ditelle. Et cède neuf points en dix jours. Héritière d’une campagne déjà lancée par le PSB, elle ne parvient pas à imprimer sa marque. Elle reste même étran gement silencieuse sur des su jets comme l’économie dura ble. Ses absences et approxima tions finissent par détourner un électorat qui a préféré s’en tenir aux valeurs sûres. p n. bo. 6 | international & planète 0123 MARDI 7 OCTOBRE 2014 Ebola: laMaison Blanche doitrassurerl’opinion Dans un état critique, le premier malade arrivé aux EtatsUnis a révélé les défaillances du système de vigilance washington Correspondant E n quelques semaines, son visage est devenu fami lier aux EtatsUnis. Tho mas Frieden, le responsa ble des Centres pour le contrôle et la prévention des maladies (CDC), a donné, dimanche 5 octobre, des nouvelles alarmantes du premier cas de virus Ebola diagnostiqué hors d’Afrique. Il a fait part d’une détérioration de l’état de santé de Thomas Eric Duncan, un Libé rien venu à Dallas rendre visite à sa famille. Son état avait déjà été qualifié de « critique », samedi, par l’établissement où il est hospi talisé, le Texas Health Presbyte rian Hospital, à Dallas. M. Duncan a été mis en contact avec le virus au Liberia en menant une voi sine enceinte contaminée dans un centre de santé de Monrovia. Revenu aux EtatsUnis, l’homme âgé d’une quarantaine d’années s’est rendu à l’hôpi tal dès les premiers symptômes, quelques jours après son arrivée au Texas, le 20 septembre, en pro venance du Liberia, l’un des foyers les plus virulents de l’épi démie. Mais l’équipe médicale, pourtant informée de son séjour en Afrique de l’Ouest, a commis une erreur de diagnostic et le ren voie chez lui avec une prescrip tion d’antibiotiques. Deux jours plus tard, son état s’étant aggravé, il est hospitalisé. Le 30 septembre, il est identifié comme porteur du virus. Erreur de diagnostic Cette erreur initiale a obligé les autorités texanes à retrouver de toute urgence les personnes ayant été en contact avec Thomas Duncan. La comptabilité dressée par les CDC, dimanche, faisait état de dix personnes concer nées : des proches avec lesquels il avait séjourné dans un apparte ment de Dallas, et des personnels médicaux. Toutes sont en obser vation. Outre ces dix cas rappro chés, trentehuit personnes qui ont pu également être en rela tion avec le malade sont sur veillées. La dernière personne Le nombre d’appels aux Centres pour le contrôle et la prévention des maladies est passé de 50 à 800 par jour 20 % C’est le risque d’importation d’un cas d’Ebola en France L’équipe du professeur Alessandro Vespignani, de l’université Northeastern de Boston, a modélisé le risque d’importation du virus Ebola par le biais des transports aériens. Leur modèle est actualisé en permanence sur le site Internet www.mobs-lab.org/ebola.html. Le scénario de loin le plus plausible, selon Alessandro Vespignani, correspond à une réduction de 80 % du trafic aérien en provenance et vers les pays d’Afrique de l’Ouest touchés par l’épidémie, soit le maintien de la situation actuelle. Dans cette hypothèse, le risque, d’ici au 24 octobre, pour la France, serait d’environ 20 %. Elle est le deuxième pays le plus menacé, derrière le Ghana (40 %), et est suivie de la Côte d’Ivoire (15 %), du Royaume-Uni (11 %) et de la Belgique (9 %). Désinfection, le 5 octobre, de l’appartement où a séjourné le Libérien Thomas Eric Duncan, à Dallas. JOE RAEDLE/AFP identifiée dont on était sans nou velles a été retrouvée dimanche. A Dallas, les autorités ont ren contré des difficultés pour trouver un local approprié à l’accueil des proches du malade mis en qua rantaine. Ils ont été acheminés, vendredi, dans une résidence sé curisée sous surveillance policière. Et ce n’est que le lendemain qu’une société spécialisée dans le traite ment de matériels contaminés a pu s’occuper de l’appartement où Thomas Duncan avait séjourné. Tout ce qui s’y trouvait a été placé dans des conteneurs scellés. Les premières hospitalisations aux EtatsUnis, cet été, avaient déjà alerté sur la nécessité de mettre au point un dispositif logistique adapté pour les déchets générés par les traitements. Stericycle, la société en question, installée dans l’Illinois, avait dans un premier temps refusé de prendre en charge le matériel usagé des hôpitaux qui avaient reçu des patients touchés par Ebola. Un nouveau protocole a dû être mis au point en coordina tion avec les CDC. Sans qu’il soit question de psy chose, la médiatisation de l’hospi talisation de Thomas Duncan a cependant plus que décuplé les appels reçus par les CDC, comme l’a indiqué dimanche le profes seur Frieden. De cinquante par jour avant le 30 septembre, ce nombre est passé à huit cents. Vendredi, la Maison Blanche avait lancé un premier appel au calme, insistant sur le fait que la transmission du virus était com plexe et que les EtatsUnis dispo saient des capacités pour juguler sa propagation. La Maison Blan che s’était exprimée après les propos alarmistes tenus par un sénateur républicain, qui compte parmi les candidats po tentiels du parti pour la présiden tielle de 2016. Rand Paul (Ken tucky) s’était interrogé, mercredi, sur le degré de mobilisation des autorités. Le lendemain, un autre prétendant républicain, Ted Cruz La volontaire française de MSF guérie La jeune infirmière française infectée par le virus Ebola est sortie guérie, samedi 4 octobre, de sa chambre confinée de l’hôpital militaire Bégin, à Saint-Mandé (Val-de-Marne), aux portes de Paris. Cette volontaire pour l’organisation non gouvernementale Médecins sans frontières (MSF), première Française à avoir été infectée par le virus qui a tué plus de 3 431 personnes en Afrique de l’Ouest depuis la fin du mois de mars, était en mission au Liberia. Déclarée malade le 16 septembre, elle avait été rapatriée en France le 19 septembre. Dès samedi, Marisol Touraine, ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, « très heureuse de cette évolution favorable », saluait « l’engagement et le courage de cette jeune femme, ainsi que la mobilisation de toutes celles et de tous ceux qui se battent sur le front de la terrible épidémie d’Ebola en Afrique de l’Ouest ». Selon l’ONG, plus de 373 personnels médicaux ont été infectés depuis le début de l’épidémie, dont 16 volontaires MSF, et 208 sont décédés, dont 9 volontaires MSF. (Texas), avait écrit à la direction fédérale de l’aviation pour lui de mander de prendre les disposi tions nécessaires afin d’éviter de nouvelles arrivées de malades aux EtatsUnis. « Stopper la maladie » L’administration américaine a profité des talkshows de diman che pour répéter son message. Le professeur Anthony Fauci, direc teur de l’Institut des allergies et des maladies infectieuses, Daniel Pfeiffer, l’un des conseillers du président Obama, et le profes seur Frieden se sont succédé sur les écrans. « Il n’y a aucun doute sur le fait que nous pouvons stop per la maladie », a répété diman che matin, sur CNN, le responsa ble des CDC. Ce dernier a as suré que le cas du Libérien hospi talisé à Dallas reste le seul recensé aux EtatsUnis. Vendredi, l’hôpital universitaire Howard, à Washington, a fait état de l’hospitalisation d’un homme ayant séjourné au Nigeria et pré sente des symptômes proches de ceux d’Ebola. Dans le Massachu setts, un médecin qui avait guéri d’une contamination par le virus, a aussi été admis dans un établis sement hospitalier, le UMass Me morial Medical Center, à Worces ter, pour une infection respira toire, les médecins craignant une nouvelle contamination. Les tests se sont révélés négatifs à Ebola. En outre, un avion trans portant 250 passagers a été blo qué durant deux heures, samedi, à l’aéroport de Newark (New Jer sey) à cause d’une fausse alerte. Quatre ressortissants améri cains contaminés en Afrique par Ebola ont déjà été traités aux EtatsUnis. Le cinquième en date, un cameraman pigiste travaillant pour la chaîne NBC au Liberia, a été orienté vers un établissement du Nebraska qui dispose d’une unité spécialisée de dix lits et a déjà reçu des malades touchés par le virus. Le premier malade hospi talisé début août aux EtatsUnis, un médecin américain conta miné alors qu’il combattait l’épi démie au Liberia, avait été traité au Emory University Hospital d’Atlanta, en Géorgie, équipé pour ce type de cas. p gilles paris (publicité) UILLAUME | ELSA | BENJAMIN | STEPHAN | YVAN | LUCAS | ANNE-SOPHIE | ANTOINE | AURÉLIE | CAMILLE | CHARLOTTE | CAMILLE | CLEMENTINE | GUILLAUME | KITIYA | LAURE | V AULYNE | MARINE | MICHEL | CATHERINE | JEAN-FRANÇOIS | ALICE | CLEMENTINE | KATHY | LAURENT | MAXIME | PABLO | CHARLES | FLORE | JULY | ALINE | CECILE | MARTINE | SER TEPHANE | PIERRE | IMRÉ | GABRIEL | FANNY | CASSANDRE | JU | RACHID | ANDRÉE | ANNIE | BERNARD | CHLOÉ | CHRISTINE | DAVID | FRANÇOISE | FRÉDÉRIC | HÉLOÏSE | ISABELL Le message de plus de 200 000 membres d'All Out en France : UCILE | MANON | MÉLAINE | MORGANE | RODOLPHE | SANDRINE | SOPHIE | YVES | FRANCOIS | CORYNE | LAURENT | FRANK | CLEMENCE | CYRIL | NORBERT | PAULINE | MARIE | MA HRISTOPHE | DAVID | CEDRIC | MELANIE | SOPHIE | STEEVE | EMILIE | JULIE | EMMANUELLE | JC | MIM | JEAN-CHARLES | JEAN-JACQUES | MARIE | OLIVIER | TONY | OLIVIER | YVES | ALÉRIE | PAULINE | SEBASTIEN | RACHEL | BERNARD | PHILIPPE | GEORGIA | CÉLINE | ANNIE | CLARA | JONATHAN | CATHY | VIRGINIE | ROXANE | ANITA | ALEXIS | SYBILLE | GEORG ELISSA | FRANÇOISE | CANDICE | NATHALIE | PIERRE | ISABELLE | JULIETTE | COLINE | MARION | MARIA | ANDRÉ | LUCIE | JOEY | RALPH | JEAN-LOUIS | ASSIA | EMILIE | MARIE | CH ARNAUD | MARIE-LINE | MATHIAS | JEAN-SYLVAIN | NATHALIE | LÉANDRE | SYLVANA | MANUEL | MARTINE | YOHAN | ALAIN | JEAN | VALENTIN | JOHANNA | PIA | CHARLOTTE | PHI ANNY | CHARLES | ALICE | SUE | RÉGIS | PHILIPPE | ROXANE | EMMANUELLE | VINCENT | PATRICK | JADE | LÉA | CINDY | ROMAIN | NADÈGE | PATRICIA | FLORIAN | JULIEN | PATRICK ARINE | MARIA | EMILE | FLORIANE | BÉATRICE | SÉBASTIEN | ELODIE | VICTOR | GUILLAUME | INHWA | GILDAS | EVELYNE | ALINE | ADRIEN | LUCAS | ROMAIN | GAËTAN | GAËLLE | ARIE-PASCALE | SARA | LYDIE | CÉDRIC | MATHILDE | VIVIAN | FANELIE | SYLVIA | LUCAS | ALEXIA | VIOLAINE | SIMON | BENJAMIN | LEYLA | THIBAULT | KÉVIN | LUCIE | AMÉLIE | AXIME | CAMILLE | LAURINE | LUCAS | BERTILLE | YAELLE | CAROLINE | SANDRINE | CANDICE | FLORENCE | LOUISE | YANNICK | LOUISE | FABRICE | SOUADE | LAURE | MARIE | CHRY URORE | CLÉO | ALEXANDRE | JOHANNA | VIRGINIE | BÉRÉNICE | NICOLAS | MARGAUX | LÉA | PHILIPPE | DAMIEN | HÉLÈNE | TALIP | IRIS | JULIEN | LOUIS | MATHIEU | ANNE-LINE | LÉMENTINE | CÉLINE | MONIQUE | DANIELLE | MORGANE | LAURA | DANIELLE | YOANN | GWEN | JAMES | ROMAIN | MIROUSHA | DANY | FRANÇOIS | FRANÇOIS | LAURENT | ELSA | M ISÈLE | YVES | MARINE | FABIENNE | EWEN | DAVID | JUSTINE | FRANÇOIS | LOU | MANON | MICKAEL | VANESSA | ALAIN | SIMON | KYLIAN | AUDE | MARYNA | JEANNE | FLORIANE | ATHERINE | LÉA | ODILE | BENJAMIN | JEROME | MAGALI | MARIE | MARINA | YOANN | BENOIT | PATRICE | VANESSA | VINCENT | JULIE | AURÉLIE | NATHALIE | SANDIE | FANNY | JUL LORIANE | MARIE | MANON | CLÉMENTINE | KATIA | MATHILDE | LOUISE | FABIEN | STEPHEN | CHLOÉ | MARION | VICTORIA | MATHILDE | CAROLINE | DANIEL | AUDREY | DAVID | DEN LAIN | FABIEN | MARICHKA | LAURA | LUCAS | MATHIEU | CHLOÉ | VALÉRIE | LOÏC | JULIE | TITOU | PHILIPPE | LAURE | JULIE | MARIE HÉLÈNE | ROBIN | AYMERIC | ROMAIN | KARIM MARGUERITE | ADRIEN | MATHIEU | JULIEN | MÉGANE | NICOLAS | ANNE | AIMÉE | ANOUK | AUDREY | BENJAMIN | CÉLINE | CLAIRE | CLEM | COLINE | DELPHINE | ELODIE | FREDERIC UGO | JENNIFER | JEREMY | JUSTINE | KARIMA | CLARA | LUDOVIC | MARIE | MARIE-JEANNE | MARION | MARTHA | MERYEM | MORGANE | NOEMIE | OLIVIA | PAULINE | ROBIN | SAÏDA ANDRINE | SÉBASTIEN | VÉRONIQUE | VICTOR | VINCIANE | VIRGINIE | WENDY | GUY | YOUMI | THIBAUT | GUILLAUME | LOLA | MARIE-CARMEN | SÉVERINE | AURÉLIE | JORDI | MARI AN-YVES | CORINE | ERIC | JEAN-BAPTISTE | ADRIEN | LIONEL | LOUBNA | MANON | AYUB | CELINE | CÉLIA | NICOLAS | HÉLÈNE | MÉLODIE | KAIS | GERALD | CAROLE | PASCAL | DAV ICHAEL | COLINE | LOUIS | BERTRAND | BARBARA | DOMINIQUE | JOAQUIM | RÉMY | CHARLOTTE | DANIÈLE | ROUSSEL | GERARD | ADELINE | JÉRÉMIE | OLIVIER | DORIAN | SOPHIE | ARIE-PIERRE | AURORE | MARIO | JULIEN | EMMA | CAROLINE | RAPHAEL | MARIE | ROBIN | AUDREY | ALAIN | CHRISTIAN | GÉRARD | ALEX | MOHAMMED | JENNIFER | MURIEL | CY YRIAM | ASTRID | FABIEN | MATHIEU | FABRICE | AMÉLIE | ALEXANDRA | ALEX | MORGANE | FRANK | LIKA | ARIANE | FABIEN | CLAUDE | FREDERIC | ROBERT | CATHERINE | ALIX | P UCAS | JEANNE | GILLES | JULIEN | NICOLE | PHILIPPE | MAXIME | LAURENT | SERGE | ARLETTE | FLO | LAURENCE | YASSINE | PIERRE | ALAIN | MARC | LAURENT | NELLY | STÉPHAN MICHELLE ICHELLE | HOCINE | PIERRE | CLAIRE | MARIA | LUCAS | XAVIER | MARION | YOHANN | MARIE-CAROLINE | JEAN | BENOIT | CATHERINE | DANY | CHRISTOPHE | OLIVIER | STÉPHANIE | AURENCE | FABIENNE | GUILLAUME | THOMAS | JEAN CLAUDE | THIERRY | BERNARD | JACQUES | FRÉDÉRIC | CHRISTIANE | CLÉMENT | DOMINIQUE | MARCEL | DENIS | SAMUEL | MAH MAHAMA CLOVIS LOVIS | NICOLAS | PAULINE | DAVID | PIERRE | CHRISTIAN | BERNARD | LAURENT | FLORA | DENIS | LEWIS | STÉPHANIE | LUCILE | OLIVIER | LIONEL | JACK | CASSANDRE | CECILE | CORINNE | FRANCK RANCK | LÉA | BENOIT | SÉBASTIEN | AMAURY | GILLES | CÉDRIC | BERNARD | JEAN CLAUDE | ALAIN | MARGAUX | JEAN-PAUL | LAURE | CLAIRE | SYLVAIN | BÉATRICE | VINCENT | AAUDREY | AN RENE | VIRGINIE | JIMMY | ALAIN |Cet ADÈLEencart | SANDRA |aNANOU FRANÇOIS | par DIALO plus | ANNE |de LAURIANE PRISCILLE | JULIETTE été |financé 250| membres d'All| SANDRA Out. | ANTOINE | MICHEL | BASTIEN | MATHI ORINE | MARYVONNE | ZOÉ | JEAN-LOUIS | GRÉGORY | CLAIRE | STÉPHANIE | FRANCK | DOMINIQUE | LAREDJ | MAXIME | EMMANUEL | VERONIQUE | MALORIE | LOUISE | ANGELO | LA USTINE | MARIE CHRISTINE | DOMINIQUE | CHRISTOPHE | RÉMY | SYLVIE | AYMERIC | ROGER| JEAN | MICHEL | NICOLE | PHILIPPE | MATHIEU | FRÉDÉRIC | CORRINE | LAURENT | CLÉ Nous célébrons la diversité des familles en France et appelons à l'égalité pour TOUTES LES FAMILLES « Un phénomène de contagion » djihadiste en Afrique, selon l’ONU PARIS. Le représentant du se crétaire général de l’ONU pour l’Afrique centrale, Abdoulaye Bathily, invité de l’émission « Internationales » sur TV5 Monde, en partenariat avec Le Monde et RFI, dimanche 5 oc tobre, estime que les groupes djihadistes en Afrique bénéfi cient d’« un phénomène de contagion depuis la Libye, le Mali, le Niger – le Sahel et le Sa hara de manière générale – et les régions du golfe de Gui née ». « Il n’y a plus de frontiè res… On pensait que le mouve ment Boko Haram allait se circonscrire au Nigeria, mais on constate que le Cameroun commence à subir les contre coups », ditil. Selon lui, « les terroristes sont mieux organi sés que les Etats… Il est donc in dispensable que les Etats cons truisent une solidarité dans le domaine sécuritaire et que soient revus les modèles de gouvernance ». Concernant la République centrafricaine, M. Bathily constate que « même si la date de fé vrier 2015 ne peut pas être te nue pour les élections, il ne faut pas s’en éloigner de trop loin car le risque d’une aggra vation de la crise est là ». RUSSIE Cinq policiers tués dans un attentat à Grozny MOSCOU. Cinq policiers ont été tués et douze blessés, di manche 5 octobre, en Tchét chénie, dans le Caucase russe, en déjouant un attentatsui cide à l’explosif près d’une salle de concert à Grozny, où étaient attendues des milliers de personnes. Le kamikaze – un Tchétchène, selon le co mité d’enquête russe – s’est fait exploser après que les po liciers ont tenté de contrôler ses papiers. La capitale tchét chène n’avait pas connu d’at tentatsuicide depuis 2012. L’attaque est aussi le premier acte de violence majeur dans la république depuis la mort du chef rebelle islamiste Do kou Oumarov, en mars. – (AFP, Reuters.) LETTONIE La coalition de centre droit conserve sa majorité RIGA. Le Parti des russopho nes lettons est arrivé en tête des élections législatives, sa medi 4 octobre, sans pour autant ravir le pouvoir à la coalition de centre droit sor tante. Selon les résultats com plets, le parti Harmonie, allié au parti au pouvoir en Russie, s’adjuge 23,13 % des voix, soit 24 sièges au Parlement, qui en compte 100. La principale force de la coalition au pou voir, le parti Unité, obtient 21,76 %, soit 23 sièges. Ses par tenaires (Verts et Paysans et l’Alliance nationale) sont cré dités de 21 et 17 sièges, ce qui donne à la coalition un total de 61 sièges. – (AFP.) france | 7 0123 MARDI 7 OCTOBRE 2014 A F FA I R E B YG M A L I O N Bygmalion: M. Sarkozy directement visé Les enquêteurs évoquent, dans une synthèse du 1er octobre, un «financement illicite de la campagne» de 2012 L’ affaire Bygmalion est bien une affaire Sarkozy. Les policiers qui enquêtent sur un soupçon de financement occulte de la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy en 2012 par des fausses factures imputées à l’UMP, évoquent désormais l’in fraction de « financement illégal de la campagne électorale » et plus seulement celle d’« abus de con fiance ». Or, l’article 1131 du code électo ral dispose que « sera puni d'une amende de 3 750 euros et d'un em prisonnement d’un an, tout candi dat en cas de scrutin uninominal qui aura dépassé le plafond des dé penses électorales, n'aura pas res pecté les formalités d'établisse ment du compte de campagne, (…) aura fait état, dans le compte de campagne ou dans ses annexes, d'éléments comptables sciemment minorés ». Après avoir mis en examen les cadres de la société de communi cation Bygmalion et de sa filiale Event & Cie, soupçonnés d’avoir émis ces fausses factures, puis ceux de l’UMP, les juges Serge Tournaire, Roger Le Loire et Re naud Van Ruymbeke vont donc maintenant s’intéresser à l’éche lon politique, et plus particulière ment à Nicolas Sarkozy. Les conclusions du procèsver bal de synthèse, rédigé le 1er octo bre par la chef de l’Office central de lutte contre la corruption et les infractions financières et fiscales (OCLCIFF), Christine Dufau, lèvent le voile sur les intentions des en quêteurs : « Les investigations confirment les constatations fai tes au cours de l’enquête prélimi naire selon lesquelles la société Event & Cie, à la demande de l’UMP, a adressé au parti des faus ses factures à hauteur de 18 556 175,95 euros TTC courant 2012, fai sant référence à des prestations liées notamment à des conven tions, alors que les prestations réelles correspondaient à l’organi sation de meetings pour la campa gne présidentielle de Nicolas Sarkozy », commence la commis saire Dufau. Outre le délit d’« abus de con fiance », retenu contre les cadres de l’UMP, « ces fausses factures adressées par Event & Cie à l’UMP constituent également l’infraction de financement illégal de la cam pagne électorale de Nicolas Sarkozy puisque, sciemment, les deux parties ont établi de fausses factures pour éviter de devoir comptabiliser dans le compte de campagne des factures de presta tions liées à cette campagne », af firme la patronne de l’OCLCIFF. « Surprenant » Evoquant les divers protagonistes poursuivis dans cette affaire, Mme Dufau va jusqu’à évoquer « leur participation au finance ment illégal de la campagne de Ni colas Sarkozy et la présentation de comptes de campagne inexacts à la Commission nationale des comptes de campagne et des fi nancements politiques et [au] Conseil constitutionnel ». Elle précise, comme pour répondre à Nicolas Sarkozy et JeanFrançois Copé – patron de l’UMP au mo Six mis en examen Après avoir mis en examen les cadres de Bygmalion, les juges vont s’intéresser à l’échelon politique ment des faits – qui ont démenti avoir eu connaissance du système frauduleux : « Etant donné le nom bre de meetings, l’enjeu financier qu’ils représentaient, il peut paraî tre très surprenant que personne ne se soit préoccupé de leur finan cement, et que les responsables du groupe Bygmalion n’aient pas pris contact avec ceux de l’UMP. » Si l’enquête devait être étendue à des faits de « financement illégal de campagne électorale », voire de « fraude électorale », la menace se préciserait donc encore un peu plus pour M. Sarkozy. Les juges vont maintenant s’attacher à éva luer son degré de connaissance du « système » délictueux mis en place. De ce point de vue, la mise en examen de l’un de ses proches, Eric Cesari, exdirecteur général de l’UMP – où il était surnommé « l’œil de Sarkozy » – n’est pas de na ture à le rassurer… D’autant que les magistrats devraient prochai nement convoquer Guillaume Lambert, directeur de la campa gne présidentielle de l’exchef de l’Etat, et Jérôme Lavrilleux, son adjoint, qui a reconnu, publique ment puis devant les policiers, lors de l’enquête préliminaire, la mise en place d’une double factu ration. « Candidat idéal » Ce n’est pas tout : les enquêteurs ont découvert que non seule ment Bygmalion (et sa filiale Event & Cie) travaillait de longue date pour l’UMP, mais aussi que le système de fausse facturation avait été institué bien avant la campagne présidentielle de 2012. Le rapport de l’OCLCIFF souligne que « la société Event & Cie a établi à la demande de l’UMP des faus ses factures en 2012 pour inclure le coût de prestations faites en 2011. Durant les auditions, les presta tions concernées faites en 2011 n’ont pas pu être clairement préci sées ». Cette découverte, évoquée par Le Journal du dimanche du 5 octo bre, a conduit, selon nos informa tions, le parquet de Paris à accor der aux juges, le 1er octobre, un ré quisitoire supplétif afin d’élargir leur enquête à ces faits nouveaux, qualifiés de « faux et usage de faux ». Elle signifie surtout, pour les enquêteurs, que le procédé il légal mis en place pour masquer l’explosion des dépenses de cam pagne de M. Sarkozy n’a pas été élaboré par hasard avec la société Bygmalion. Les policiers l’ont d’ailleurs fait observer au patron d’Event & Cie, Franck Attal, au cours de sa garde à vue, le 30 septembre : « Début janvier 2012, vous avez accepté, avec Sébastien Borivent et Mat Trois anciens cadres de l’UMP ont été mis en examen, samedi 4 octobre, pour « faux et usage de faux » et « abus de confiance ». L’ancien directeur général de l’UMP, Eric Cesari, l’ex-directrice financière du parti, Fabienne Liadzé, et l’ancien directeur de la communication du mouvement, Pierre Chassat, sont astreints à un contrôle judiciaire leur interdisant de communiquer entre eux, mais aussi de s’entretenir avec Nicolas Sarkozy, Jean-François Copé, Guillaume Lambert (ex-directeur de la campagne présidentielle) et son ancien adjoint, Jérôme Lavrilleux. Mercredi 1er octobre, Bastien Millot et Guy Alvès, fondateurs de la société Bygmalion, avaient été pour leur part mis en examen pour « complicité de faux et complicité d’usage de faux ». Franck Attal, l’ancien patron d’Event & Cie, filiale de Bygmalion, est, lui, poursuivi pour « faux et usage de faux ». Les protagonistes* de l’affaire Bygmalion Relation de proximité personnelle Equipe de campagne Nicolas SARKOZY Fabienne LIADZÉ Mis en examen Candidat Philippe BRIAND Trésorier de la campagne et maire de Saint-Cyr-sur-Loire Directrice financière Responsable du pôle finances de la campagne Direction de l’UMP Jean-François COPÉ Guillaume LAMBERT Directeur de campagne Secrétaire général au moment des faits Bygmalion Bastien MILLOT Fondateur Guillaume BAZAILLE Chargé de presse Matthieu FAY Comptable Jérôme LAVRILLEUX Directeur adjoint de la campagne Directeur de cabinet de J.-F. Copé Guy ALVÈS Cofondateur Pierre CHASSAT Directeur de la communication et directeur adjoint du cabinet de J.-F. Copé Franck ATTAL Patron d’Event & Cie, la filiale de Bygmalion chargée de l’organisation des meetings de campagne Eric CESARI Directeur général (depuis 2008) *fonctions au moment des faits (campagne présidentielle 2012) thieu Fay [respectivement direc teur général d’Event & Cie et comptable de Bygmalion], de faire des fausses factures à la demande de l’UMP. Event & Cie a été choisie par l’équipe de campagne du can didat UMP début février 2012 pour organiser les meetings du candi dat. Cela donne l’impression qu’Event & Cie était le candidat idéal pour un montage de sous évaluation des dépenses de cam pagne »… PHOTOS : AFP Dans les locaux de l’OCLCIFF, M. Attal, le 30 septembre, a dé douané – en termes prudents – MM. Sarkozy et Copé. « Je n’ai aucun élément factuel qui me per met de dire qu’il était au courant », atil dit à propos de l’exsecréatire général de l’UMP. S’agissant de l’ancien chef de l’Etat, il s’est borné à déclarer : « J’ai tendance à croire qu’il n’était pas au courant. » Mais, pour Guy Alvès, cofonda teur de Bygmalion, c’est moins sûr. « Estil envisageable que les plus hautes autorités de l’UMP, donc M. Copé luimême, et de la campagne, donc M. Lambert, voire M. Sarkozy, n’aient pas été associés à cette déci sion [de faire des fausses factu res] ou tout au moins que leur ac cord n’ait pas été obtenu ? », ont ainsi demandé les policiers à M. Al vès. « Je suis incapable de répondre. (…) Pour moi, les deux scénarios sont techniquement possibles », a til répondu. « Son livre se dévore comme un festin. » le point « Il est sans conteste, le plus chevronné, le plus assidu, le plus sagace des observateurs politiques français. » le monDe « Le roman national de nos passions partisanes. En fait, son Histoire personnelle, c’est la nôtre. » le figaro « Un sens aigu du récit. » Plon w w w. p l o n . f r Direct matin Disponible en librairie et en numérique Estimant avoir été « pris au piège par l’UMP et la campagne », M. Al vès s’est posé en « victime de l’UMP et de ses agissements ». Et de con clure, à propos de la décision de re courir aux fausses factures : « Elle n’a pu être prise que par des diri geants à l’UMP et/ou de la campa gne. Je ne peux pas imaginer qu’une telle décision ait été prise que par M. Lavrilleux. » p gérard davet et fabrice lhomme 8 | france 0123 MARDI 7 OCTOBRE 2014 A F FA I R E B YG M A L I O N La défensedeJeanFrançoisCopé fragilisée L’ancien patron de l’UMP conteste avoir eu connaissance du système de fausses factures L’ ancien patron de l’UMP, JeanFrançois Copé, va devoir bientôt répon dre aux questions pré cises des enquêteurs, qui sem blent douter de sa version des faits, si l’on en croit les procèsver baux d’interrogatoire. M. Copé a toujours contesté avoir eu con naissance, avant leur révélation publique, des fausses factures réa lisées par la société Bygmalion pour minorer les frais de la cam pagne présidentielle de Nicolas Sarkozy, en 2012. Mais le parti qu’il dirigeait est désormais égale ment suspecté d’avoir couvert un « système » – terme utilisé par les policiers – de détournement de fonds, par des surfacturations. La question est ainsi posée le 30 septembre à Bastien Millot, l’ancien patron de Bygmalion et très proche de M. Copé : « N’estil pas surprenant que (…) JeanFran çois Copé n’ait pas été informé du dépassement des comptes de cam pagne du candidat soutenu par le parti qu’il dirige, la solution trou vée étant d’imputer à son propre parti au détriment de ses adhé rents ces dépenses, à savoir 18 556 175 euros ? » M. Millot élude, comme il conteste, en dépit de nombreux témoignages, avoir eu connaissance du processus délic tueux. Confronté par les policiers à Guy Alvès, l’autre patron de Byg malion, qui l’accuse sur procès verbal d’avoir autorisé les fausses factures, il continuera à nier. Mais les enquêteurs disposent d’éléments nouveaux. Un person nage retient désormais leur atten tion : il s’agit de Guillaume Ba zaille, chef du service de presse de M. Sarkozy à l’Elysée pendant deux ans, passé ensuite au service de M. Copé, à l’UMP. Le jeudi 27 ou le vendredi 28 février, une réunion est organisée au domicile de M. Ba zaille, le soir, après les premières révélations du Point concernant les fausses factures. Franck Attal, directeur adjoint d’Event & Cie, filiale de Bygmalion, Les enquêteurs semblent avoir mis au jour un « système » de surfacturations antérieur à la campagne de 2012 raconte la scène aux policiers. Sont présents, selon lui, MM. Millot et Alvès, les fondateurs de Bygma lion, et Jérôme Lavrilleux, ancien directeur adjoint de la campagne de M. Sarkozy. « Nous avons parlé du système de ventilation des factu res, rapporte M. Attal. Bastien Millot avait pleinement connais sance de ce sujet. » Le dimanche 2 mars, une deuxième réunion, toujours liée à Bygmalion, a en core lieu chez M. Bazaille. Et cette fois, M. Copé est bien présent. Les enquêteurs s’interrogent, se reportent aux déclarations sur procèsverbal de M. Copé, qu’ils avaient entendu comme témoin le 26 mai. Celuici leur avait assuré n’avoir été mis au courant des mal versations que le 16 mai, lors d’une réunion à l’UMP. Estil possible que quatre de ses proches, anciens ou actuels collaborateurs, à savoir MM. Lavrilleux, Bazaille, Alvès et Millot, l’aient totalement tenu à l’écart du processus ? Manifestement, les policiers n’en sont pas persuadés… D’autant que l’agenda de M. Copé porte la trace de deux rendez vous avec Franck Attal, les 8 mars et 11 mai 2012. Réaction de M. Al vès, devant les dénégations de M. Copé : « Je ne m’attendais pas à autre chose. (…) J’estime qu’il aurait pu prendre, au nom de l’UMP, ses responsabilités. » En saisissant de nouvelles pièces comptables, les enquêteurs sem blent avoir mis au jour un « sys tème » d’évasion de fonds anté rieur à la présidentielle de 2012, qui pourrait avoir été le support d’en richissements personnels. Plu sieurs doubles factures ont été éta blies, relatives à des événements liés à l’UMP. « Il y a effectivement un problème. (…) Je ne comprends pas ce montage », concède M. At tal, quand les enquêteurs lui pro duisent les factures suspectes. Bygmalion semble avoir sciem ment surfacturé des réunions pu bliques. Dans un procèsverbal de synthèse du 1er octobre, les poli ciers, pointant les « marges brutes dégagées par Event & Cie [qui] s’élè vent entre 11,98 % et 52,98 % », évo quent deux chèques de l’UMP, éta blis les 16 et 24 février 2012, pour un montant de 997 628 euros. Et posent cette question : « Quelle était la destination de ces fonds ? » Contactée, l’UMP, par la voix de son avocat, Me Antonin Lévy, n’a pas souhaité « commenter une ins truction en cours ». p gérard davet et fabrice lhomme VERBATIM “ Tout ceci a été une révélation sidérante, je n’avais jamais été informé d’irrégularités dans les dépenses et les procédures de l’UMP. Dans le cas contraire, je l’aurais bien évidemment interdit. Jusqu’au 15 mai, je n’avais aucune information (…). Dans mes fonctions de secrétaire général puis de président de l’UMP, je n’avais pas les moyens de déceler ces opérations litigieuses. Les pratiques mises en place avant mon arrivée dans le circuit de décisions n’impliquent pas le secrétaire général ni sur les devis ni sur les engagements de dépenses ni sur les factures » Jean-François Copé, alors président de l’UMP, dans ses déclarations sur procès-verbal devant les policiers, le 26 mai, lors de l’enquête préliminaire. CommentSarkozy finance sa campagne L’affaire Bygmalion oblige à faire sobre: moins de 10 000 euros par déplacement La Poste – Société anonyme au capital de 3 800 000 000 euros – 356 000 000 RCS PARIS – Siège social : 44, boulevard de Vaugirard – 75757 PARIS CEDEX 15. – C Tous les Français sont différents mais pour La Poste, ils ont tous la même valeur avec MonTimbraMoi. Une nouvelle idée de La Poste. laposte.fr DÉVELOPPONS LA CONFIANCE omment Nicolas Sarkozy financetil sa campagne pour la présidence de l’UMP ? Dans le contexte de l’af faire Bygmalion, le sujet est sensi ble. Jusqu’à l’élection interne, pré vue le 29 novembre, la campagne de l’ancien chef de l’Etat sera entiè rement prise en charge par l’Asso ciation de soutien à l’action de Ni colas Sarkozy (Asans). Créée en 2000, cette association a pour président Brice Hortefeux et pour trésorier Michel Gaudin, le directeur de cabinet de M. Sarkozy. « C’est lui qui signe les chèques », in dique un proche de l’exprésident. En 2012, l’UMP avait versé 50 000 euros à François Fillon et JeanFrançois Copé pour financer leurs campagnes pour la prési dence du parti. Ce temps est ré volu. Endettée à hauteur de 74 millions d’euros, l’UMP ne peut plus se le permettre. Les trois can didats – Bruno Le Maire, Hervé Mariton et Nicolas Sarkozy – ne touchent rien du mouvement et doivent donc se débrouiller avec leurs propres associations de financement. Celle de Nicolas Sarkozy, l’Asans, dispose d’une réserve de plus de 200 000 euros. Financée par des dons, elle doit servir à toutes les dépenses de fonctionnement de la campagne, sachant que le bud get prévisionnel pour les deux mois à venir s’élève à près de 200 000 euros. Alors que l’ancien chef de l’Etat a prévu de tenir une quinzaine de meetings d’ici au 29 novembre, une enveloppe de moins de 10 000 euros est prévue pour cha que déplacement. Dans le con texte de l’affaire Bygmalion, il convient de faire dans la sobriété. La révélation d’un système pré sumé de fausses factures durant la campagne de 2012 a modifié la donne. « Le climat n’est pas bon, grimace un proche de M. Sarkozy. Nous sommes donc très attentifs aux questions financières car nous savons qu’on ne nous fera pas de cadeau sur ce point. » Cette fois, aucune société de communication n’est chargée de l’organisation des événements. Pas question de prendre de ris ques en reproduisant le scéna rio de 2012. « On veut une campa gne efficace et sobre », explique Frédéric Péchenard, le directeur Les candidats ne touchent rien du parti et doivent se débrouiller avec leurs propres associations de financement de la campagne, en précisant vou loir s’appuyer sur les réseaux so ciaux, « des outils très peu chers ». Le premier meeting, qui a eu lieu le 25 septembre à Lambersart (Nord), dans une salle polyvalente sans prétention, devait refléter ce nouveau style, volontairement modeste. « Cela a coûté moins de 10 000 euros au total », assure l’équipe de M. Sarkozy, en comp tant la location de la salle et des jeux de lumière, ainsi que les frais de délégation, réduits au mini mum puisque seules trois per sonnes accompagnaient le candi dat dans le train : Frédéric Péche nard, l’attachée presse Véronique Waché et un officier de sécurité. Les autres ont dû payer leur billet ou se déplacer par leurs propres moyens. Salles louées « à prix d’ami » Pour le deuxième meeting, jeudi 2 octobre, le porteparole de la campagne, Gérald Darmanin, a ainsi prévu de se rendre à Troyes avec sa propre voiture. Afin de li miter les coûts, tous les membres de l’équipe de campagne sont bé névoles. Autre source d’écono mie : les salles sont louées « à prix d’ami » dans des villes détenues par l’UMP. Ce devait être encore le cas lors du troisième meeting de M. Sarkozy, lundi 6 octobre, à Véli zyVillacoublay (Yvelines). Pour éviter les accusations de conflits d’intérêts, l’équipe du candidat s’est installée au 13, rue Lancereaux, dans le 8e arrondisse ment de Paris. Les bureaux de l’ex président, situés au 77, rue de Mi romesnil, dans le même arrondis sement, n’ont pas vocation à ser vir pour la campagne. C’est la République qui paie à l’ancien chef de l’Etat la location de cet ap partement de 320 m2, à hauteur de 15 000 euros par mois. p alexandre lemarié france | 9 0123 MARDI 7 OCTOBRE 2014 Pas d’«effetFN» surlapressed’extrêmedroite Les trois principaux titres connaissent de graves difficultés et sont menacés de faillite « PRÉSENT » Quotidien créé en 1980, il incarne l’extrême droite catholique traditionaliste. Il revendique un tirage de 10 000 exemplaires. Selon sa direction, « Présent a besoin chaque année de 100 000 euros pour équilibrer son budget ». Il reçoit des subventions de l’Etat, « inférieures à 300 000 euros par an ». « MINUTE » Populiste, xénophobe et islamophobe, l’hebdomadaire créé en 1962 milite officiellement pour l’union de toutes les droites mais il a la dent dure contre le FN. Minute revendique un tirage de 40 000 exemplaires, ce qui semble largement surestimé. « RIVAROL » L’hebdomadaire, né en 1951, revendique un tirage de 10 000 exemplaires. Antisémite et pétainiste, il a durement attaqué Marine Le Pen. Pour son directeur, elle est « un démon », « une gourgandine sans foi ni loi (…) dont l’entourage n’est composé que d’arrivistes sans scrupule, de juifs patentés et d’invertis notoires ». «Minute», la provocation per manente Minute est la publica tion la plus « grand public ». Cet hebdomadaire fait régulièrement parler de lui avec ses « unes » pro vocatrices. L’une d’elles risque bien de le faire fermer, celle de novembre 2013 contre Christiane Taubira : « Maligne comme un singe, Taubira retrouve la ba nane. » La provocation vaut à Mi nute des poursuites pour incita tion à la haine raciale. Le parquet a requis trois mois de prison avec sursis et 10 000 euros d’amende contre le directeur de la publication, Jean Marie Molitor, qui n’a pas ré pondu à nos nombreuses sollici tations. Si les réquisitions sont suivies, l’hebdo ne survivra pas. La situation est telle que Minute appelle aux dons pour pouvoir faire face à ses condamnations. Ayant toujours plaidé pour l’union de toutes les droites, Mi nute accueillait jusqu’à récem ment des durs de l’UMP, comme Nadine Morano et Thierry Ma riani lorsqu’ils étaient ministres de Nicolas Sarkozy. Quelques mois plus tôt, c’était Bruno Goll nisch, du FN, ou Fabrice Robert, du groupusculaire Bloc identi taire qui étaient mis à l’honneur. Mais l’émergence de Valeurs ac tuelles a coupé Minute de l’UMP. Les ténors les plus droitiers préfè rent en effet s’exprimer dans Va leurs, moins marqué que Minute. Dans le même temps, Mi nute s’est fâché avec le Front na tional et Marine Le Pen. Non seu lement l’hebdo a soutenu M. Gollnisch lors du congrès de 2010, mais il s’est fait une spécia lité des attaques ad homi GAUCHE Cécile Duflot se dit « plus socialiste » que M. Valls La députée EELV Cécile Duflot, exministre du gouvernement Ayrault, a dit, le 5 octobre, se sentir « plus socialiste » que Manuel Valls. Présente à VieuxBoucau (Landes) lors de la clôture de l’université d’été d’Un monde d’avance (cou rant de l’aile gauche du PS), elle a aussi lancé au ministre du travail, François Rebsa men : « Si tu n’y crois plus, laisse nous faire ! » – (AFP.) UMP Valérie Pécresse votera finalement Sarkozy Valérie Pécresse, proche de François Fillon, a affirmé au Journal du dimanche du 5 octobre qu’elle votera pour Nicolas Sarkozy le 29 novembre au congrès de l’UMP. « C’est lui le plus à même de rassembler le parti et de lui donner l’élan néces saire », expliquetelle. Mais elle refuse de se prononcer sur la présidentielle, disant vouloir « continuer à tra vailler avec François Fillon ». RETRAITES Xavier Bertrand veut une part de capitalisation Xavier Bertrand, candidat à la primaire UMP pour la prési dentielle, a déclaré, dimanche 5 octobre, sur France 5, être fa vorable à une part de capitali nem contre Florian Philippot, le numéro 2 du parti. Isolé, Minute n’a eu d’autres choix que de pro voquer pour exister. «Rivarol», l’impasse du philo nazisme Rivarol est en très mau vaise posture. Accumulant les procès pour incitations à la haine raciale, l’hebdomadaire dénonce un « acharnement » pour le « tuer ». « Le risque de fermer est réel, nous avons une toute petite trésorerie », affirme le directeur, Jérôme Bourbon. Rivarol est un journal antisé mite et pétainiste. Il a adopté un tour encore plus radical depuis que M. Bourbon en a pris la direc tion en 2010. Certaines manchet tes sont explicites : « L’ère de la ju déocentrie » ; « L’insupportable police juive de la pensée » – ex pression attribuée à l’historienne Annie Kriegel ; « Lobby juif et lobby gay : l’overdose »… Dans les pages, il n’est pas rare de trouver des articles élogieux à propos du «Rivarol» assume ses éloges du IIIe Reich ou de l’apartheid, même s’ils lui coûtent des lecteurs IIIe Reich, de collaborateurs, des négationnistes ou encore de l’apartheid. Jérôme Bourbon as sume sa ligne politique philona zie, au risque de perdre des lec teurs. « Nous en avons perdu, mais nous en avons gagné d’autres, assuretil. Ça s’est équili bré, du moins à court terme. » Rivarol est devenu un ennemi de Marine Le Pen. La présidente du FN a quatre procédures en cours contre lui. « Les Le Pen n’ont jamais accordé d’importance à la presse proche. Nous sommes un journal marqué à l’extrême droite et ce n’est pas la stratégie de Ma rine Le Pen. Nous sommes un bou let plus qu’autre chose pour elle. Elle pense que tout se fait à la télé et sur Internet », selon M. Bour bon, qui n’hésite jamais à atta quer Mme Le Pen et « la forte domi nante homosexualiste » du FN. « Présent », le quotidien en pleine crise de foi C’est le seul quotidien d’extrême droite. Ca tholique traditionaliste, Présent n’a pas de procédure judiciaire pendante menaçant son exis tence. Mais ses finances sont dans le rouge même si elles se « sont stabilisées », selon Samuel Martin, le nouveau rédacteur en chef. « On a freiné la chute », ajou tetil. Présent n’a pas su profiter du mouvement antimariage ho mosexuel dont il était, pourtant, partie prenante. Une nouvelle tentative de s’accrocher à cette mobilisation a été effectuée lors de la manifestation du 5 octobre : de nombreuses affiches promo tionnelles du quotidien jalon naient le parcours du cortège, an nonçant un « numéro souvenir » pour 2,50 euros. Présent sort à peine d’une grave crise interne. Des historiques comme Jeanne Smits et Olivier Figueras ont été poussés vers la sortie au printemps. La nouvelle équipe a aussi réorienté la ligne en l’ouvrant à d’autres courants d’extrême droite, justement pour élargir le lectorat. « On veut être le reflet de ce qui se passe dans notre mouvance. On peut être d’accord seulement en partie avec des gens et leur donner la parole. Des points communs existent », avance M. Martin pour justifier les deux entretiens con sacrés à Dominique Venner, théo ricien d’extrême droite, païen as sumé et qui a commis l’acte sacri lège de se suicider à NotreDame en 2013. Pas sûr que le lectorat de Présent le comprenne. p sation dans le système de re traite. Alors que MM. Sarkozy et Fillon se sont prononcés pour un âge légal du départ à la retraite porté respective ment à 63 et 65 ans, il a es timé que ces solutions ne suf firaient pas. – (AFP.) CENTRE Rama Yade soutient Hervé Morin pour la présidence de l’UDI L’exsecrétaire d’Etat aux sports et à la jeunesse de M. Sarkozy, viceprésidente de l’UDI, a annoncé son sou tien à Hervé Morin, lui aussi ancien ministre de M. Sarkozy, dans la course à la présidence du parti centriste. Le nom du futur président sera connu le 13 novembre. E N VIR ON N EMENT Ségolène Royal dénonce le relèvement de la taxe sur le gazole La ministre de l’écologie, Sé golène Royal, opposée à une hausse de la taxe sur le ga zole, a déploré de n’avoir « pas été entendue », diman che 5 octobre, sur France 3. Le gouvernement a confirmé qu’il procéderait à une aug mentation de 2 centimes par litre dans le cadre du projet de loi de finances 2015. « Je préfère un prélèvement sur les sociétés d’autoroute », a dit Mme Royal, ajoutant qu’elle était opposée aux mesures « d’écologie punitive ». – L’ESSENTIEL Surtout, ils sont tous victimes de la forte utilisation d’Inter net par les militants d’extrême droite. « La plupart des jeunes mi litants, qui sont très présents dans La Manif pour tous par exemple, s’informent sur le Net et pas sur le support papier », explique Jeanne Smits, ancienne patronne de Pré sent. Chacune de ces publications représente une sensibilité diffé rente de l’extrême droite et con naît une crise qui lui est propre. La Poste – Société anonyme au capital de 3 800 000 000 euros – 356 000 000 RCS PARIS – Siège social : 44, boulevard de Vaugirard – 75757 PARIS CEDEX 15. C’ est une situation pa radoxale. L’extrême droite ne s’est jamais aussi bien portée électoralement mais sa presse, elle, est au bord de la faillite. Le quotidien Présent et les hebdo madaires Minute et Rivarol – les trois principales parutions qui in carnent ce courant d’opinion – sont menacés de disparaître. Aucun de ces titres historiques n’a su tirer profit de la bonne santé électorale du Front national – qui s’en tient éloigné – ni des succès de la mobilisation de La Manif pour tous. Sans publicité, ils ne doivent leur survie qu’à leurs lecteurs, qui se font de plus en plus rares. Votre colis vous donne de ses nouvelles tout au long de son voyage. Une nouvelle idée de La Poste. laposte.fr DÉVELOPPONS LA CONFIANCE abel mestre 10 | france 0123 MARDI 7 OCTOBRE 2014 LesDoumbia, six frères quiaffolent la justice La remise en liberté du cadet est examinée mardi. La corruption d’une matonne est suspectée C’ est un coup de fil qui fut tout sauf diplo matique. Le 13 août, un magistrat de la cour d’appel de Paris téléphone à la maison d’arrêt de Fresnes (Val deMarne) pour demander une explication. L’avocat du détenu Ismaïl Doumbia vient de faire va loir à la cour qu’une demande de remise en liberté, formulée par son client le 7 mai, n’a toujours pas été examinée. Le délai de deux mois prévu par l’arti cle 1482 alinéa 2 du code de pro cédure pénale étant dépassé, Is maïl Doumbia, 28 ans, devrait donc automatiquement quitter le milieu carcéral. Au regard du pedigree du dé tenu, en train de purger plusieurs peines de prison dont une pour avoir participé à un enlèvement séquestration, le magistrat de la cour d’appel exige un éclaircisse ment sur ce qui s’apparente à un raté de l’administration péniten tiaire. Dans une note, la directrice adjointe du centre pénitentiaire de Fresnes répond qu’une de mande de remise en liberté a bien été formulée mais qu’« aucune trace de transmission à l’autorité judiciaire compétente n’a pu être retrouvée ». Surtout, elle précise que la surveillante Nelly D., char gée de ladite transmission, vient d’être révoquée « en raison de la relation inappropriée qu’elle a en tretenue dans l’exercice de ses fonctions » avec un autre détenu, un certain Kassoum Doumbia, le frère d’Ismaïl… Une enquête préliminaire est alors diligentée pour corruption de fonctionnaire. Dans son rap port de synthèse, la sûreté territo riale du ValdeMarne conclut que le dépassement du délai s’appa rente « plus à un acte volontaire qu’à une simple erreur ». Le greffe de la maison d’arrêt gère près de 3 000 demandes de remises en li berté par an, sans que jamais ce type de méprises surviennent. Nelly D. a été placée en garde à vue le 25 septembre. L’exgardienne de prison a avoué que, visàvis de Kassoum, elle était « totalement confuse au niveau des senti ments » mais, concernant la de mande de remise en liberté d’Is maïl, a rejeté la responsabilité de la faute sur une autre sur veillante. Elle est ressortie libre, mais l’enquête préliminaire se poursuit. En attendant, la cour d’appel de Paris va avoir à statuer mardi 7 oc tobre dans l’aprèsmidi sur le sort d’Ismaïl Doumbia. Sa remise en liberté va de soi, d’après son avo cat, Me Joseph CohenSabban : « Il y a eu un loupé. Pour se couvrir, l’administration pénitentiaire tente maintenant de faire porter le chapeau à la famille de mon client. On jette des suspicions sans aucun élément de preuve. Cela se résume à un procès d’intention. » Un avis que ne partage pas Me Thibault de Montbrial, qui représente un agent de change torturé et laissé pour mort par trois frères et leurs 71 le nombre d’années de prison cumulées par la fratrie Selon le décompte du Monde, les six frères Doumbia ont fait l’objet d’au moins vingt-deux condamnations. Tous ont déjà été condamnés pour trafic de stupéfiants. Cinq d’entre eux ont eu les honneurs d’une cour d’assises. Ces enfants de la cité des Francs-Moisins à Saint-Denis (Seine-Saint-Denis), qui ont fini par investir dans des commerces sur les Champs-Elysées, ont démarré dans les sports de combat avant de faire fortune en vendant cannabis et cocaïne. Contrepartie du succès dans leur secteur d’activité, au moins trois frères ont essuyé des coups de feu de la part de concurrents. A peine sorti de prison, Ahmed, le seul frère à être libre à l’heure actuelle, s’est ainsi fait tirer dessus à huit reprises le 5 septembre. Témoin de la scène, un des avocats du polémiste Dieudonné qui rentrait chez lui a jugé plus opportun de déclarer aux enquêteurs qu’il n’avait rien vu. NOUVEAU Richard Strauss, Opéra de Lyon contera que ce dernier avait en voyé des hommes de main mena cer ceux qui l’accusaient. Fausse reconnaissance de dette Dans une autre affaire, une de ses compagnes se présente devant la juge d’instruction qui doit l’inter roger en décembre 2009, coiffée d’une perruque masquant une oreillette branchée à un télé phone connecté à celui de Kas soum Doumbia qui, depuis sa cel lule, dicte les réponses à la jeune femme. Peu avant, inquiété pour blan chiment lié au trafic de stupé fiants, le caïd francilien fait éta blir une fausse reconnaissance de dette par un ami canadien pour justifier de ses 200 000 euros en liquide. M. Doumbia poussant le raffinement jusqu’à payer l’avo cat et l’huissier censés représen ter les intérêts de son créancier qui, afin de rendre plus crédible son histoire, l’assigne pour non paiement de sa dette… Dans la fratrie Doumbia, Kader, 30 ans, est le plus m’astuvu. En cavale, il fait la fête avec le proxé nète ayant conduit la prostituée Zahia Dehar au footballeur Franck Ribéry. Mais, lorsque Ka der se trouve impliqué dans une C’ Dès aujourd’hui, des offres promotionnelles réservées aux abonnés de réduction Les Doumbia ont à leur palmarès une série très variée d’entraves à la justice, allant de la subordination de témoins aux menaces à magistrat L'HISTOIRE DU JOUR Un site pour sortir la diaspora chinoise de l’entresoi Tous les événements culturels sélectionnés par la rédaction de Télérama sont sur billetterie.telerama.fr -60% complices. Le conseil considère que « la famille Doumbia n’a aucune limite ni dans la violence, ni dans les manœuvres les plus audacieuses pour échapper à la justice. Ils font peur aux témoins comme à leurs victimes. Il faut que cela cesse. » Au cours d’une carrière crimi nelle démarrée à la fin des années 1980, les six frères Doumbia ont à leur palmarès une série très va riée d’entraves à la justice, allant de la subornation de témoins aux menaces à magistrat en passant par l’escroquerie au jugement. A chaque fois, les policiers croient y voir la patte de Kassoum, 43 ans, l’aîné de la fratrie. Ils ne lui ont jamais pardonné le nonlieu qu’il a obtenu à propos d’une fu sillade mortelle devant l’Atlantis, une boîte de nuit antillaise de Pa ris, le 11 août 2002. En cours d’ins truction, quatre témoins sont re venus sur leurs déclarations et Kassoum Doumbia va toucher 20 000 euros de l’Etat pour déten tion abusive. Des années plus tard, un proche de Kassoum ra Jusqu’à -16% de réduction Miossec, Paris, Lyon, Angers -30% de réduction Antoine Duléry fait son cinéma, Paris -45% de réduction François Truffaut, l’exposition, La Cinémathèque française, Paris est une petite révolution pour la communauté chi noise de France : un site de petites annonces d’un genre nouveau vient de voir le jour sur la Toile : Ave nuedasie.fr. Le concept reprend le principe du très populaire Le boncoin.fr. A une différence près : cette plateforme d’échanges est dévolue à la location ou à la vente d’objets et de services en tre les membres de la diaspora chinoise et des Français non si nophones. Plus de 40 000 annonces sont déjà en ligne. Location d’ap partements, vente de voitures d’occasion, services de garde d’enfants, cours de chinois, de français, de piano… On peut, comme sur d’autres sites, tout vendre, tout acheter. Un onglet a même été mis en place pour les rencontres amoureuses. Une application Android devrait être prête d’ici à la mioctobre. L’internaute francophone n’aura qu’une barrière à franchir pour se sentir à l’aise : beaucoup d’annonces sont en mandarin. Pour ne pas faire fuir les clients, les programmateurs du site ont ajouté un onglet afin d’obtenir instantanément une traduction en français. Principal intérêt d’Avenue d’Asie : être directement connecté à l’un des sites participatifs les plus actifs de la LE CONCEPT diaspora, Huarenjie.com (« rue de D’AVENUEDASIE.FR, Chine », en chinois). « Toutes les an nonces postées sur Avenue d’Asie sont DE PASCAL REN, immédiatement synchronisées avec REPREND LE PRINCIPE Huarenjie », explique Pascal Ren, ini tiateur du projet. Arrivé en France à 18 ans, le créateur de 41 ans a galéré DU TRÈS POPULAIRE dix ans sans papiers, notamment LEBONCOIN.FR dans des ateliers de confection, avant de trouver sa voie. Le site veut gagner de l’argent, mais Avenue d’Asie a aussi une visée plus sociale, à l’image des convictions de M. Ren, très in vesti dans l’associatif. « Le but est de créer des ponts entre les Français et la diaspora chinoise afin que des échanges puissent se faire dans les deux sens », détailletil. Une ambition grandis sante chez les Chinois de France, de plus en plus soucieux de s’émanciper de l’image d’une communauté repliée sur elle même. Parmi les actionnaires d’Avenue d’Asie, on trouve l’un des en trepreneurs ayant le mieux réussi de la diaspora : Ruojin Liu, patron de la marque de vêtement Miss Coquine. M. Ren prévoit, lui, en plus de la France, de vite développer son site sur des pla tesformes en Italie, en Espagne et au RoyaumeUni, où Huaren jie a déjà des déclinaisons. Puis dans toute l’Europe. Dans un autre domaine, une radio en français et en chinois devrait voir le jour : Radio mandarin d’Europe. Le projet, porté depuis des années par Huong Tan, un Cambodgien d’origine chinoise très investi au sein de la diaspora, a obtenu le feu vert du CSA début 2013. Huong Tan en est aux finitions. Il est même à la recherche de stagiaires d’écoles de journalisme. p elise vincent fusillade, Kassoum le répri mande, parce qu’il ne s’est pas fait arrêter en même temps qu’un complice : « S’ils vous pètent en même temps, toi t’es là pour lui mettre la pression. Mais là, si ça se trouve, il est en train de dire : “C’est pas moi qui ai tiré.” Et tu te retrou ves au placard pour tentative d’homicide… Faut réfléchir ! A chaque fois, je vous le dis ! » Quand c’est au tour d’Adams (34 ans) et Mohamed (37 ans) d’être recherchés pour avoir poi gnardé à mort un homme qui tentait de les empêcher de ven dre de la drogue, Kassoum tente de faire passer la victime de ses petits frères pour un dealer. Le ca det, Ismaïl, se promène, lui, avec un mouchoir sur lequel sont ins crites les réponses très précises à donner dans l’affaire pour la quelle la police le traque. Durant le procès de l’enlève ment de l’agent de change, le té moin sous X qui incriminait Kas soum et deux de ses frères a in sisté pour dévoiler son identité en pleine audience. Là, il a assuré avoir été manipulé par les poli ciers et n’aurait jamais dit le moindre mal des Doumbia. Un jour, un chef d’entreprise a expliqué à un juge d’instruction pourquoi il se rétractait face à un membre de la fratrie. « J’ai peur et je ne voudrais pas que mes décla rations soient dans le dossier. Cette personne est vraiment très dangereuse. J’aimerais vous dire des choses, mais j’ai peur que cette personne ait accès au dossier. » Sur ce, son avocat lui conseille de se taire et reproche au magis trat de mettre la vie de son client en danger. L’audition se termine au bout de sept minutes. Sur sa chaise, le chef d’entreprise, ami d’enfance des Doumbia, pleure. p matthieu suc JUSTI C E Une adolescente partie pour le djihad rattrapée à Marseille Disparue depuis quatre jours de son domicile dans l’Isère, une jeune fille de 15 ans a été rattrapée samedi 4 octobre à Marseille. Elle a confirmé en garde à vue avoir voulu partir « faire le djihad en Syrie », tout en n’ayant aucun discours re ligieux « construit », selon le procureur de Vienne, Mat thieu Bourrette. Sa garde à vue pour le vol de la carte bancaire de ses parents a été prolongée dimanche 5 octo bre en début de soirée. – (AFP) POLICE Interpellations à Toulouse liées aux règlements de comptes Des policiers sont intervenus lundi 6 octobre à l’aube dans plusieurs quartiers de Tou louse, dont la Reynerie, dans le cadre des enquêtes sur les règlements de comptes entre bandes rivales sur fond de trafic de drogue. France 3 Mi diPyrénées, qui rapporte l’in formation, précise qu’il y a eu plusieurs interpellations. En moins d’un an, Toulouse et sa banlieue ont connu quatre as sassinats et deux tentatives, « avec des modes opératoires relativement similaires », se lon le parquet. FA IT DIVERS Un accident de montgolfière fait un mort et trois blessés Une personne est morte et trois autres ont été griève ment blessées, dont une en fant de 10 ans, dimanche 5 octobre dans la chute de leur montgolfière qui survo lait un village touristique du Quercy, dans le TarnetGa ronne. Onze personnes se trouvaient à bord, dont le pi lote, ont précisé les pompiers. Le pronostic vital de deux des trois blessés est engagé. Les sept autres occupants ont été légèrement blessés. – (AFP) france | 11 0123 MARDI 7 OCTOBRE 2014 «LaManifpourtousconfisqueledébatsurlafamille» Pour le chercheur Claude Martin, le mouvement antimariage gay illustre «une poussée conservatrice» E ENTRETIEN ntre Manif pour tous du dimanche 5 octobre et examen du projet de loi de financement de la Sé curité sociale à partir de mercredi, la politique familiale est propulsée en première ligne du débat public. C’est l’occasion, audelà des slo gans, d’en redécouvrir les enjeux. Entretien avec Claude Martin, so ciologue et directeur de recher ches au CNRS, spécialiste des poli tiques de l’enfance, de la famille et de la vieillesse. Il est l’auteur d’Etre un bon parent. Une injonction con temporaine, à paraître en novem bre aux Presses de l’EHESP. Que vous inspire la mobilisa tion de La Manif pour tous ? C’est une forme de campagne contre l’exécutif. Ce mouvement confisque le débat sur la question familiale qui ne se limite pas, loin s’en faut, au « mariage pour tous » ou à la PMA [procréation médica lement assistée] et à la GPA [gesta tion pour autrui], et aux préten dues menaces que ces mesures fe raient peser sur « la civilisation ». Rappelons que seulement 7 000 mariages entre personnes de même sexe ont été célébrés au cours des six premiers mois de la loi. Une minorité bruyante, ados sée sur de nombreux quiproquos et simplifications, masque la ma jorité silencieuse. Dans quelle mesure ce mouve ment estil en adéquation ou en décalage avec la réalité de la société française, d’une part, ses inquiétudes, d’autre part ? Ce mouvement est surtout en phase avec une poussée conserva L’ESSENTIEL PLFSS Le gouvernement prévoit de réduire plusieurs prestations familiales dans le cadre du budget de la « Sécu » pour 2015. MESURES La prime de naissance sera divisée par trois à partir du deuxième enfant. Le congé parental devra être davantage partagé entre père et mère. Les allocations familiales seront majorées à 16 ans, contre 14 ans actuellement. Les aides à la garde d’enfant seront diminuées pour les familles les plus riches. « Toutes les mesures du gouvernement n’ont qu’une logique : réduire les dépenses. D’autres finalités sont délaissées » trice et réactionnaire. Une réac tion qui agite des peurs. Le désir de restauration d’une famille pré tendument menacée dans ses fon dations par des aspirations liber taires est profondément en déca lage avec les principales préoccu pations des Français. L’immense majorité d’entre eux est moins sensible à ces questions de valeurs que préoccupée par les contrain tes que font peser sur leurs fa milles la crise et les transforma tions des conditions de travail et d’emploi. Leurs préoccupations concernent plutôt le chômage, en particulier chez les jeunes, l’aug mentation des inégalités, ainsi que l’articulation des temps de la vie (familiale, sociale, profession nelle). La question des temps so ciaux est importante, car il faut du temps pour faire une famille, pour s’occuper des enfants, pour être en couple, pour soutenir ses proches et parents, etc. La politique familiale estelle un marqueur du clivage droi tegauche ? Si oui, comment se caractérise une politique fami liale de droite ou de gauche ? La famille et la politique fami liale ont longtemps été considé rées comme des thématiques de droite ; la gauche privilégiant la question des inégalités ou préfé rant parler du peuple. Les choses sont en fait plus complexes. Il faut rappeler le rôle joué par le catholi cisme au sein des droites et des gauches, en somme les places res pectives de la démocratie chré tienne et des sociauxdémocra tes, de part et d’autre d’une fron tière poreuse. Dans ce débat, Fran çois Mitterrand a manifesté dès la campagne de 1981 le souhait de définir un discours de gauche sur la famille en défendant une pré occupation nataliste, une volonté de reconnaître le pluralisme des formes de vie en famille et la cen tralité de la condition féminine. L’alternance droitegauche at elle modifié les choix en ma tière de politique familiale ? L’enjeu : durer jusqu’en 2017 A la fin de la précédente Manif pour tous, le 2 février, la présidente du mouvement, Ludovine de la Rochère, avait appelé à un nou veau rassemblement. Pas cette fois. Son pari est pourtant réussi. Le 5 octobre, la Manif pour tous a mobilisé presque autant qu’en fé vrier : 70 000 personnes à Paris, 7 500 à Bordeaux, selon la police (500 000 et 30 000 selon les orga nisateurs), alors qu’aucun projet touchant la famille n’est envisagé. Mais les foules qui combattaient la loi sur le mariage pour tous en 2013 ne sont pas redescendues dans la rue. C’est le noyau dur des défenseurs de la famille tradition nelle qui a défilé. Leurs revendica tions : l’abrogation de la loi Taubira et un durcissement de la législation afin d’empêcher le re cours à la gestation pour autrui pour les Français à l’étranger, et à la procréation médicalement as sistée pour les couples de femmes. Infléchir la ligne des candidats Spectaculairement exposées, el les restent minoritaires : 6 Fran çais sur 10 estiment que les cou ples homosexuels vivant avec leurs enfants sont des familles « à part entière », selon un sondage IFOP paru dimanche 5 octobre. L’enjeu pour La Manif pour tous est de voir ses proposi tions reprises par des élus dans la durée. Elle veut infléchir la politi que du gouvernement, mais aussi la ligne des candidats en 2017. Pour l’instant, sa stratégie de pression dans les rues fonctionne. Avant même la manifestation, Manuel Valls a annoncé une initia tive internationale contre la GPA et refusé la transcription « automati que » de l’étatcivil des enfants ainsi conçus, comme le demande la Convention européenne des droits de l’homme (CEDH). Deux candidats à la primaire de l’UMP souhaitent une consultation des militants sur l’abrogation de la loi. Marine Le Pen cherche à ramas ser la mise : favorable à l’abroga tion de la loi, elle plaide mainte nant pour une sortie de la CEDH. Le risque pour La Manif pour tous est de voir ces engagements vite oubliés. Il lui faudra alors à nou veau appeler à la mobilisation, au risque de l’essoufflement. p gaëlle dupont Des participants de La Manif pour tous, le 5 octobre, à Paris. RAFAEL YAGHOBZADEH/ HANS LUCAS POUR « LE MONDE » Audelà des effets d’annonce pendant les campagnes, des ten dances de fond dominent, qui dé passent les clivages politiques. Ainsi s’est affirmée, depuis le mi lieu des années 1980, une volonté de redonner une fonction redis tributive aux instruments de la politique familiale, ou encore d’en faire des outils de la politique de l’emploi. Cela aussi bien à droite qu’à gauche, ce qui montre le rôle particulièrement important des hauts fonctionnaires en charge de la définition de ces politiques. Au plan de l’affichage, la théma tique familiale continue et conti nuera sans doute d’être politisée, utilisée comme un marqueur brandi par les acteurs politiques pour signifier leurs fronts de lutte, leurs différences. Mais le plus sou vent sur des thématiques à forte résonance idéologique et à faible coût, comme la manière dont no tre droit civil définit la famille. Peuton parler d’une politique de gauche au vu des mesures du gouvernement ? La logique budgétaire qui do mine toutes les politiques publi ques en France écrase les idées auxquelles est attachée la gauche. Les mesures annoncées n’en re tiennent que ce qui va dans le sens de la réduction des dépenses publiques et du coût de l’Etat so cial. On le constate, par exemple, sur la réforme du congé parental. Le gouvernement aurait pu cher cher à éviter la trappe à inactivité pour les femmes en réduisant sa durée, mais surtout en offrant un meilleur niveau de rémunéra tion, avec un taux de remplace ment du salaire antérieur compa rable à ce qui se pratique dans les pays scandinaves, mais aussi en Allemagne et dans d’autres pays de l’Union européenne. Au lieu de cela, le gouvernement affiche l’égalité de genre tout en sachant que, vu le faible niveau de rému nération du congé parental, en imposer une partie aux hommes revient à opérer un nivellement par le bas qui a peu de chance d’avoir des effets d’égalité. Quant à l’idée d’abaisser le plafond d’ac cès à des prestations sociales, elle vise certes à concentrer les efforts sur les plus modestes ; mais ce n’est pas pour faire mieux, ni même autant. Toutes ces mesures n’ont donc qu’une logique : réduire les dé penses. D’autres finalités sont dé laissées comme le mieuxêtre, la qualité de service ou même l’in vestissement social ; argument auquel auraient pourtant pu être sensibles des hauts fonctionnai res du ministère des finances, puisque cela permettrait d’éviter des dépenses futures. Il est sur tout question d’aujourd’hui, pas assez de demain. p propos recueillis par jeanbaptiste de montvalon PUBLICITÉ L’Espagne a trouvé son paradis Cuisine parfumée, senteurs d’orangers, sports nautiques, plages immaculées, soleil toute l’année… tous les plaisirs semblent réunis sur cette terre si convoitée et bénie, nommée Andalousie. Baignés de lumière, ses 900 kilomètres de côtes sont aussi variés qu’étonnants, constellés de plages, de criques préservées, de marais luxuriants et d’eaux agitées par le vent. Comme les Phéniciens, Grecs, Romains et Arabes avant vous, laissez-vous séduire par l’infini beauté du littoral andalou. Depuis la frontière avec le Portugal, la Costa de la Luz déploie ses vastes étendues de sable fin, pinèdes et eaux cristallines aux amateurs de planche à voile et de pêche sous-marine. Et quand certains profitent de ces recoins sauvages, d’autres cultivent l’art de la fiesta dans les nombreux bars des villes côtières. Juste à côté, la Costa del Sol porte bien son nom avec ses 325 jours d’ensoleillement par an. Entre les plages animées ou vierges, les marinas et les parcours de golf, on comprend facilement pourquoi Andalousie rime avec… paradis. '+0,*!#. $.2,. '+0,*!#. %!32,.#1 (!)!1,*/!.- &+." %*"#.(+0# ,1'0*3 41-&#-" &0)2 $(-1/! Sable blanc et sports de glisse La Costa Tropical, protégée des vents du Nord par la montagne, invite les voyageurs au creux de ses falaises, baies et plages pour des vacances dynamiques. Avis aux sportifs, vous pourrez ici vous adonner à la planche à voile, au surf, à la plongée, la pêche, le ski nautique, etc. Tournez la tête ! La Sierra Nevada – littéralement chaîne de montagnes enneigée - culmine à 3400 mètres et attend les skieurs sur ses 87 pistes. A l’Est, la Costa de Almería offre un paysage singulier, avec ses déserts, ses marais salants appréciés des flamands roses et ses plages aux eaux transparentes. Envie de plonger ? Vous pouvez ! L’Andalousie possède 98 drapeaux bleus, signe d’une excellente qualité des eaux. Envie de plus d’aventure ? Entre amis ou en famille, vous pouvez découvrir des paysages de rêve, en quad ou 4X4, faire des randonnées à vélo ou à cheval, du canyoning, de la spéléologie ou de l’escalade, accompagnés d’un guide spécialisé. Des saveurs simples et authentiques Après le sport, le réconfort… par les papilles ! La gastronomie est ici un véritable art de vivre. Légumes et fruits du soleil, poissons, ail et huile d’olive vierge sont les atouts fondamentaux de la cuisine andalouse. A l’image de son histoire, elle est riche, complexe et fortement influencée par l’empreinte des Arabes. Laissez-vous surprendre par le goût exceptionnel du jambon pata negra ; par les arômes intenses du salmorejo cordouan, crème élaborée à partir de mie de pain, ail, huile d’olive, sel et tomate ; par les fèves tendres de Grenade, le gibier de Cordoue ou les poissons de la côte. Enfin, comment résister à l’art du tapeo, cette coutume si conviviale qui consiste à passer de bars en tavernes en mangeant quelques tapas, un verre de vin (de Jerez) à la main. Vous ne vous lasserez pas de ces petites assiettes, fritures ou tartines élaborées à partir de charcuteries, fromages ou fruits de mer. De vraies bouchées de plaisir. L’Andalousie se vit et se respire, selon vos envies. Sur cette terre de couleurs et de saveurs, oui, tout est bien réuni pour faire de votre séjour, un moment inoubliable. 12 | enquête 0123 MARDI 7 OCTOBRE 2014 Retour de djihad I émeline cazi ls sont partis pour la Syrie comme d’autres s’en vont en weekend : avec une carte d’identité, deux pantalons, deux pulls et un billet d’avion à 79 euros acheté sur un coup de tête. Ibrahim et Kader, un Français et un FrancoTunisien de 24 et 26 ans, ont quitté Marseille un lundi de septembre 2012, par le vol du soir, avec leur sac à dos pour seul ba gage. Le djihad est à quatre heures d’avion et, si l’on se débrouille bien, à moins de 100 euros. A Istanbul, Pegasus Airlines, la compagnie locale, assure la liaison avec Hatay (Antioche). C’est là, dans cette ville de l’ex trême sud de la Turquie, qu’à cette époque convergent les apprentis moudjahidin. Les jeunes volontaires, pleins d’enthou siasme et d’allant, arrivent du monde entier. Ils ont reçu leur feuille de route sur Internet. La Syrie est au bout de la rue. L’aventure s’an nonce exaltante. Enfin, leur vie prend tout son sens. Combattre Bachar AlAssad, sauver le peuple syrien du joug du dictateur, voilà qui a de l’allure. C’est dangereux, certes. Peut être mourrontils avant l’heure. Mais quand on a 20 ans, qu’importe de vivre vieux si l’on a vécu intensément. Et s’ils mouraient, ce serait en martyrs, sur la terre de « Shâm » (Syrie, en arabe) là où la mort est paraîtil délicieuse, où le sang se transforme en musc. Jamais, en re vanche, ils n’ont envisagé l’option prison. Ils y sont pourtant depuis leur retour en France, en février. Rached, 24 ans, est parti quelques jours après Ibrahim et Kader. Ces troislà ont grandi à Cannes. Leurs noms sont apparus au cours de l’enquête sur l’attentat à la grenade contre une épicerie juive à Sarcelles, en septem bre 2012. Plusieurs fidèles de la mosquée de Cannes avaient en effet côtoyé Jérémie Louis Sidney, le cerveau de la cellule terroriste dé crite par le procureur de Paris comme «la plus dangereuse depuis les attentats de 1995 ». L’histoire et le parcours des trois hommes sont retracés dans leur dossier judiciaire. La mer et les baignades dans les gorges de la Sia gne ont longtemps servi d’occupation à leurs longues aprèsmidi d’été, mais dans les quar tiers noyés de soleil on entend le même re frain qu’ailleurs : rien à faire pour les jeunes. Pas de boulot, pas d’avenir, personne pour of frir ne seraitce qu’un stage. Kader a perdu son père alors qu’il n’avait pas 11 ans. Mort sur un chantier. Sa mère fait des ménages. Il rê vait d’entrer dans la marine, mais a échoué au BEP « méca’bateau ». L’Hôtel Martinez, le grand palace de Cannes, lui a donné sa chance, malgré un 9,87/20 au CAP cuisine. Le garçon a tenu quatre mois, avant de tout en voyer valser pour une histoire de jour férié travaillé. Ses amis partaient six semaines en vacances en Thaïlande. Il les a suivis. DU BON CÔTÉ DE LA MER Les parents, nés sur l’autre rive de la Méditer ranée, avaient rêvé d’un brillant avenir pour leurs garçons. Ils grandiraient du bon côté de la mer, iraient à l’école de la République, dé crocheraient des diplômes. Ibrahim, troi sième d’une fratrie de quatre, n’a pas dépassé la première année de BEP. Les horaires « trop lourds » et l’ambiance « quasiment militaire » en cuisine ont découragé l’apprenti cuistot. Il Ibrahim, Kader et Rached ont grandi à Cannes. Tous trois sont partis «faire de l’humanitaire en Syrie», comme ils disent a longtemps vivoté grâce à son business de teeshirts contrefaits made in China, achetés 10 euros et revendus le double, ou en passant quelques journées payées de 80 à 100 euros à assembler des tuyaux sur les chantiers avec son père. Il fut aussi « facteur en Mobylette », « manutentionnaire » ou « jardinier au black ». Voire tout à la fois. Autant dire que partir « faire de l’humani taire en Syrie », selon leurs propres mots, c’est l’aventure. Quelque chose d’exotique pour cette jeunesse en mal de repères. « Soit tu prends tes affaires, et tu bouges, et tu pars (…) c’est c’qu’ils te disent à chaque fois, si t’es pas content, t’as qu’à partir », relève l’un d’eux au téléphone sans savoir qu’il est sur écoute, comme en écho à la phrase de Philippe de Vil liers, « la France, tu l’aimes ou tu la quittes ». Mais « si tu pars, ils vont direct te mettre sur une liste comme j’sais pas quoi, djihadiste. C’est devenu un métier djihadiste, comme on dirait boulanger ou plombier. » Kader jure aux en quêteurs que, s’il est parti pour la Syrie, c’est pour aider. Eux le soupçonnent d’avoir voulu mener le djihad armé et de n’avoir jamais croisé une ONG. Kader se récrie et raconte que, à peine arrivé en Turquie, il a acheté 5 kg de riz pour les familles syriennes. L’armée turque les a aidés à porter leurs sacs et à trou ver un taxi pour passer la frontière, précise til. Aucun groupe armé ne les attendait. Ja mais il n’a souhaité rejoindre des combat tants. D’ailleurs, lorsqu’il s’est aperçu que les Syriens « ne manquaient de rien, sauf d’électri cité », il a pensé rentrer en France. Mais alors pourquoi avoir besoin de 4 000 et 8 000 euros lorsqu’on va « distribuer tentes et couvertures dans un hôpital proche de la frontière » ? Pourquoi garder sur une clé USB un manuel de fabrication de bombes ar tisanales, s’ils ne voulaient qu’aider les autres ? A Cannes, ils portaient une lon gue barbe. Pourquoi la tailler avant de pren dre l’avion si ce n’est pour mieux se mêler aux touristes ? Les testaments rédigés sur le che min de l’aéroport et remis à leur ami Sofien ne plaident pas non plus en leur faveur. Sur deux feuilles d’un cahier à grands carreaux, Ibrahim « fils d’Azzedine » envisage le pire : « Au nom d’Allah, le miséricordieux, le très mi séricordieux », il lègue « tous ceux [sic] qu[’il] possède » à sa mère, à son frère et à ses sœurs, « mise [sic] à part [sa] télé qu[’il] donne à Sa lomé [sa] bienaimée qu[’il a] laissé [sic] ». Mais qu’il « espère vraiment retrouver au pa radis ». Rached lui aussi explique à son « BB d’amour », avoir « demand[é] à Allah de [les] réunir au paradis ». Tous les candidats au départ ne naissent pas musulmans. Mais ceux qui le sont devenus se rappellent avec précision du jour de leur con version. Pour Ibrahim, ce fut l’année de ses 19 ans, un jour qu’il se trouvait au bord d’une piscine, à Marrakech. Un Français l’aborde et « ON ENTEND LES BOMBES, ÇA TIRE À CÔTÉ DE NOUS, C’EST LA NUIT, Y A PAS DE LUMIÈRE, HURLE MÉLANIE AU TÉLÉPHONE. J’EN PLEURE, J’EN PLEURE, MAMAN, C’EST HORRIBLE ! » lui fait remarquer que sa main droite, celle avec laquelle il tient sa cigarette, est normale ment réservée aux « choses pures, comme ten dre l’index pendant la prière ou serrer la main ». L’homme n’a rien ajouté, s’est levé et s’en est allé. Il avait bu, était « quasiment dé foncé », se rappelle Ibrahim, mais « il allait prier ». « Je me suis dit, pourquoi pas moi ? » Kader, lui, ne tient pas l’alcool en soirée, de vient mauvais. Il s’est senti visé par le prêche d’un imam qui blâmait les « gens qui se dégra dent euxmêmes ». Du jour au lendemain, il est devenu un autre homme. Plus radicale fut la conversion de Rached, dernier du trio, et de Mélanie (le prénom a été modifié), son amour d’adolescence. Quand ils se sont connus, lui ne jurait que par ses jeans Armani, ses polos Tommy Hilfiger et ses chaussures Ninja. Elle ne portait pas le voile. Ils fumaient, sortaient dans ces soirées où l’on « se bourre la gueule » et l’on « sniffe de la coke ». Une autre vie, d’autres mœurs. De puis, ils se sont mariés devant l’imam. Méla nie ne sort plus sans ses gants, porte un long voile noir – « les couleurs, ça fait Arlequin » – et ne fête plus les anniversaires de quiconque. « J’suis rentrée dans une religion, c’est pas pour la faire à moitié », assènetelle, cinglante, de vant son père qui s’en désole. Une virée chez le coiffeur, une sortie en ville, tout est revu à l’aune des interdits que l’islam, croitelle, lui impose. Se teindre les cheveux en noir, cou leur sacrée, n’est pas autorisé. Va pour la bai gnade, mais seulement dans les piscines pri vées des copines, à l’abri des regards. STAGE EN EGYPTE Ils forment un clan, avec ses coutumes et ses codes. Leur signe de ralliement : le drapeau noir de l’islam, affiché en fond d’écran sur leur portable, quand ce n’est pas la photo d’un combattant en armes. La « citadelle du musulman », recueil des invocations du Co ran et de la Sunna (loi de Dieu), est leur best seller. « Innocence of Muslims », un brûlot antiislam diffusé sur Internet, le film améri cain à combattre. Ils ont vu et revu ces vidéos prosélytes où des jeunes coiffés d’un keffieh, assis en demicercle, leur vantent les bien faits du djihad et les exhortent à les rejoin dre. Ils les ont transférées, affichées sur leur mur Facebook. Le voyage en Egypte est un must et sert souvent de stage initiatique. On y suit des cours d’arabe – 45 euros les trois heures – dans des écoles du Caire, on y loue pour une centaine d’euros des appartements « entre frères ». On s’autorise même quelques excursions. Au printemps 2012, Rached a étu dié quatre mois à la madrasa Kalima, où se re trouvent des étudiants du monde entier. Ka der et Ibrahim l’ont rejoint. Au retour, les amis d’Ibrahim ont noté un net change ment : « Il parlait de guerre, c’était [devenu] un besoin. » Lorsque les trois Cannois débarquent quel ques semaines après à Hatay, à l’automne 2012, le gouvernement turc n’a pas encore lancé la construction du mur censé freiner les ardeurs de l’internationale djihadiste. Le pas sage de la frontière n’est qu’une formalité. Ibrahim et Kader trouvent refuge dans une villa désertée par ses occupants où logent déjà une vingtaine d’autres Français. Le con fort est sommaire. L’hiver, pour se chauffer, on jette des pommes de pin dans les chemi nées. L’air devient vite irrespirable. Ces ma tins de grand froid, les ablutions sont en op tion et les repas frugaux. Une soupe ou des macaronis enchantent l’ordinaire. DÉBROUILLE ET MAGOUILLES Chacun organise sa journée entre débrouille et magouilles. Ibrahim achète et revend des voitures sur le marché de Sarmada, bourg des collines du nordest syrien, à un jet de pierre de la Turquie. Rached s’est offert une moto « à pédales », a craqué pour un cheval… On trouve de tout dans les boutiques syriennes : un ordinateur à 400 euros, des « colts » turcs enquête | 13 0123 MARDI 7 OCTOBRE 2014 matin de décembre, elle en a eu assez de pas ser ses journées à scruter son téléphone. Sans rien dire à personne, elle s’est envolée pour Is tanbul. Persuadée que tout serait plus simple làbas. En réalité, c’est un choc. Pour ne pas ef frayer leurs familles, les garçons ne l’ont pas assez dit, c’est la guerre, en Syrie. On n’en a pas vraiment conscience lorsqu’on téléphone de son canapé. Les bombardements frappent surtout le soir. « Les avions, ils sont audessus de la maison, on entend les bombes, ça tire à côté de nous, c’est la nuit, y a pas de lumière, hurle Mélanie au téléphone. J’en pleure, j’en pleure, maman, c’est horrible. » En arrivant en Syrie, elle est devenue « Oum Jafar », « femme de Jafar », du nom de con verti de Rached. « Oum Jafar » dort avec d’autres femmes. La maison où loge Rached n’est pas suffisamment grande pour l’ac cueillir. La cohabitation avec les sœurs est dif ficile. Elle ne parle pas anglais, ni arabe. Ses coloc’portent le voile mais n’ouvrent pas un Coran, ne prient pas, médisent à longueur de journée et gavent leurs enfants de somnifères dès le réveil, quand elles ne les battent pas à coups de ceinture, racontetelle à une amie. Les nuits de panique, impossible de trouver du réconfort auprès d’elles. Le jour revenu, elle reprend ses esprits, lègue ses jilbeb (« voi les ») et la moitié de son recueil de hadiths – les paroles du Prophète – à sa meilleure amie. « Ça me fera quelques hassanates [bon nes actions]. » « Au pire, si demain, j’me prends une bombe dans la tête, c’est pas grave, j’meurs en martyre », relativise Mélanie. LES FEMMES DONNENT LA « BARAKA » RAPHAEL URWILLER pour 40 euros, des maillots de corps, des ves tes. Mais pour les extras, rien ne vaut la Tur quie. Les virées de l’autre côté de la frontière sont une fête. Les djihadistes viennent récu pérer les mandats Western Union envoyés par leurs familles, auxquelles ils réclament ré gulièrement 150, 200, 300 euros. Le djihad leur coûte cher… En France, des quêtes s’organisent dans les quartiers et à la sortie des mosquées. Même les collégiens puisent dans leurs maigres économies. Une partie de cet argent est aussitôt dépensée en fringues et nuits d’hôtel. La guerre est une aubaine pour le commerce turc. Certains marchands ont profité des allées et venues de ces étrangers en mal de sensations pour s’ins taller au plus près de la frontière. Avant de re tourner au front, les apprentis djihadistes se délassent dans des bains bouillants. « Depuis que je suis parti, j’ai pas fait de bain, frère, c’est que des douches (…), l’eau chaude, on la chauffe sur la cheminée, raconte Kader à un ami, au té léphone. On n’a pas lâché l’eau chaude à l’hô tel, le lit confortable, le coussin, les couvertures, on était au chaud. » En Syrie, chercher du réseau et trouver de quoi recharger son téléphone est devenu un sport national. « Il n’y a pas d’électricité, ni à la maison ni dans le village en entier. L’électricité ne vient qu’une à deux heures maximum par jour. C’est l’Etat qui loue », explique Rached à sa fiancée, qui s’inquiète de son silence. Sans réseau, impossible aussi de créditer son for fait. L’opération « ne se fait pas par carte, mais par opérateur en texto », lui précisetil. Son ordinateur, il le recharge grâce à un fil relié à la batterie de sa moto, qu’il doit laisser tour ner pendant l’opération. Du coup, les nouvel les sont rares et erratiques. A 3 000 km de là, en France, on guette la pe tite lumière verte qui s’allume sur Skype ou sur Facebook, signe que le correspondant est connecté. « Tu as eu des nouvelles, inch Al lah ? » En cas de silence prolongé, on compte les jours sans appel. « Moi, des fois, j’m’al longe, j’laisse le téléphone sur moi (…) et j’rac croche et je fais [le numéro], et j’raccroche et j’refais », explique la sœur de Rached. Il est ar rivé à Mélanie de tenter cinquante appels d’af filée avant de réussir à joindre son fiancé. Un IBRAHIM AVAIT MOHAMED MERAH POUR MODÈLE. IL AVAIT PRÉVENU SES PROCHES : S’IL ÉCHOUAIT EN TERRE D’ISLAM, IL PRENDRAIT SA REVANCHE EN FRANCE « J’ai déménagé. Inch Allah, on est dans une belle maison et tout. Avec mon mari, ils nous ont donné une grande pièce », annonce toute guillerette « Oum Jafar » à ses copines, ce ma tin de janvier 2013. Un soir, Rached l’a emme née à moto dîner dans un kebab. Un rêve. Ici, les femmes ne sortent pas à la nuit tombée. Rached ambitionne d’intégrer les brigades de Jabhat AlNosra (le Front AlNosra), le groupe de rebelles affilié à AlQaida. Mais rejoindre une katiba (une brigade de combattants) comme on dit làbas, se mérite. Il s’entraîne trois, quatre, cinq jours d’affilée sans donner de nouvelles. La nuit, du fond de sa tranchée, il surveille les avancées de l’ennemi pour 80 euros par mois. L’émir, son chef, lui fait confiance et lui a délégué l’entraînement des nouvelles recrues. Cellesci arrivent de par tout : Kazakhstan, Ouzbékistan, Pakistan. Certains combattants ont plus de 60 ans. S’il intègre le groupe, a expliqué Rached à sa bien aimée, on lui confisquera son téléphone et il n’aura droit qu’à un appel par mois. « Ce n’est pas une vie de couple que tu peux avoir avec un moudjahid, c’est pas possible », insistent les copines de Mélanie quand elle leur raconte ses longues journées à attendre le retour de son fiancé. Jamais il n’annonce la durée de ses absences. La connaîtil lui même ? Combien de temps vatelle encore tenir ? « Le peu que je pourrais encore profiter, et si je réussis ne seraitce qu’à tomber en ceinte », leur répond la jeune femme. Elle rêve d’un garçon, « au moins, il va combattre ». La mère de Mélanie ne veut pas une petite fille, sinon, « la pauvre, elle va devoir avoir le voile ». L’échographie annonce une fille. Ra ched est ravi : les femmes donnent la « ba raka », elles portent chance. Pour le prénom, ce sera celui d’une femme du Prophète. Rached a pleuré lorsque fin janvier Mélanie a quitté la villa, sa valise à la main. C’était mieux pour elle et l’enfant, sontils convenus. Les collines syriennes ne sont pas le meilleur endroit pour une femme enceinte. Il y fait froid, on n’y mange pas tous les jours à sa faim. Mieux valait que Mélanie parte l’atten dre en Turquie. Il ne serait pas loin, il pourrait leur rendre visite après la naissance de la pe tite. Mélanie a fini par rentrer en France. En voulant passer par la Tunisie, elle a appris qu’elle y était interdite de territoire, en raison de sa relation avec une personne « suspectée de terrorisme international ». Kader a épousé Rim, « une femme respec tueuse [qui] entretient bien son foyer » – et hé rité d’une petite maison dans le village de sa bellefamille, dans le nordest de la Syrie. Ibra him a nourri les mêmes projets et épousé cette jeune fille dont il se rappelle à peine le nom, « Zahib, ou quelque chose comme ça ». Mais la maison dont il a héritée n’avait pas de toiture. Quand Kader a annoncé être blessé et qu’Ibrahim, touché par un éclat d’obus, n’a plus répondu au téléphone, tous – familles et amis – à Cannes, se sont affolés. Ils ne sont pas les seuls. Kader ne voyait plus l’intérêt de res ter s’il ne pouvait plus courir. Il risquait de re tarder les autres. Autour de lui, le nombre de blessés augmentait, il a vu des garçons ampu tés de leurs deux jambes et un jeune de 16 ans mourir sous ses yeux. Leur blessure leur fait prendre le même chemin que Mélanie, quel ques mois plus tard, laissant en Syrie les bal butiements de leur nouvelle vie. Sur le chemin du retour, un samedi de jan vier, près de dixhuit mois après son départ pour la Syrie, Ibrahim est contrôlé à Ores tiada, dans le nordest de la Grèce. Dans sa po che, la fameuse clé USB sur laquelle un mode d’emploi de 55 pages donne tous les détails de la « réalisation de bombes artisanales au nom d’Allah ». Il dit venir d’Italie, aller en Turquie. On le relâche. Les policiers français l’arrêtent un mois plus tard, au pied de l’immeuble de son père, à MandelieulaNapoule. Que se se raitil passé, sinon ? Ibrahim avait Mohamed Merah pour modèle. Il avait prévenu ses pro ches : s’il échouait en terre d’islam, il pren drait sa revanche en France. Le temple franc maçon du boulevard de la République, à Can nes, était sa cible. Il l’avait choisi parce qu’il le croyait sioniste. Il « s’imaginait entrer dans le bâtiment et tuer tout le monde un par un jus qu’à ce que la police vienne pour le tuer », a re connu un ami devant les enquêteurs. C’est précisément ce type de comportement sur le quel les avocats des djihadistes veulent attirer l’attention. Kader, lui, est arrêté au port d’An cône, en Italie, sans avoir eu le temps de rega gner Cannes. RETROUVAILLES AU PARLOIR Les parents de ces garçons rêvaient du jour où ils franchiraient le seuil de la maison pour les étreindre dans leurs bras. Les retrouvailles ont eu lieu au parloir. Kader voudrait repren dre sa vie de cuistot et rêve de « manger des grosses langoustes » à Cuba. Il sait qu’il en a pour quelques années. Rien que pour un colis de pulls, caleçons et chaussettes envoyé en Turquie (qui ne lui est jamais arrivé), son frère a fait six mois de détention provisoire. Alors combien pour dixhuit mois passés làbas ? Du trio, Rached fut certainement celui qui a approché de plus près les groupes armés. A til intégré sa katiba, comme il en rêvait, avant de se blesser à la cheville ? En juin, logé dans une « maison sécurisée » par les combattants, tout près de la frontière turquosyrienne, ne se déplaçant plus qu’avec des béquilles, il a pensé prendre un bus et rentrer en France. « Avant, y avait les frères et tout, mais là, y en a beaucoup qui sont partis. Y en a, ils sont morts, racontetil au téléphone. Moralement, j’suis pas bien, j’suis blessé et tout. J’suis loin de com battre. » Il sait déjà qu’il ne pliera plus jamais sa jambe comme avant. « Dismoi, la loi, elle est passée à la télé, la loi pour les terroristes, trois ans, là ? », demande til à Mélanie, de puis la Syrie, « la loi pour ceux qui vont sur les terres du djihad et qui reviennent ? », précise til. L’idée d’un retour en France commence à faire son chemin. Où estil ? Que projettetil ? Nul ne le sait. p 14 | débats 0123 MARDI 7 OCTOBRE 2014 La «révolution des parapluies »contre Pékin A Hongkong, le mouvement Occupy Central, du nom du district financier de l’ancienne colonie britannique, se réclame du « printemps arabe », de la démocratie et des libertés. Le mouvement, devenu la « révolution des parapluies », appelle à la désobéissance civile contre Pékin, mais craint une forte répression. Les manifestants pacifiques réclament aux autorités locales et centrales chinoises un vote démocratique en 2017 R teng biao ares sont ceux qui ont cru que le mouvement Occupy Central allait prendre la forme qu’il a prise. Encore plus rares sont ceux qui auraient pu croire que le mouvement allait se transformer en « révolution des para pluies ». En juin 2013, le professeur Tai Yiu ting a conçu le projet d’Occupy Central. A partir du 27 mars 2014, il s’est transformé en une « déclaration d’intention ». Le plan cor respondant au slogan « Que l’amour et la paix occupent le Centre » est resté en gesta tion pendant dixhuit mois. Il a donc été mû rement réfléchi ! La population a proposé des référendums populaires et a attendu une réaction de la part du gouvernement. Ils ont répété les gestes de la désobéissance civile. Si le mouvement avait concerné de simples demandes, les Hongkongais se seraient trou vés en face d’un gouvernement respectueux des lois. Mais cette fois, dans le processus de démocratisation de Hongkong, ce qu’ils at tendent, ce n’est pas Leung Chunying – élu le 25 mars 2012 par 689 voix sur les 1 200 que compte le collège des électeurs hongkongais et soutenu par le premier ministre chinois de l’époque, Wen Jiabao –, mais le pouvoir du Parti communiste chinois, qui a déjà utilisé tanks et mitraillettes pour réprimer les ma nifestations des étudiants à Tiananmen dans la nuit du 3 au 4 juin 1989. SENS DES RESPONSABILITÉS Ceux qui ont lancé le mouvement d’Occupy Central ne peuvent éviter de prendre des précautions par rapport à la désobéissance civile. Même si ces leaders s’inspirent de l’es prit de Gandhi et de Martin Luther King, même s’ils utilisent la conscience à l’encon tre de la loi et sont prêts à assumer les consé quences de leurs actes, tout cela sert à attirer l’attention du monde sur une perle de l’Orient affaiblie et à provoquer la réforme de leur système politique. Les leaders d’Oc cupy Central ont établi des plans précis liés au contexte particulier de Hongkong. Dans l’évolution du mouvement, les leaders ont rassemblé les concepts de démocratie di recte, démocratie représentative et démo cratie délibérative, faisant ainsi apparaître la détermination de la révolte, donnant corps à un sens des responsabilités et de la ratio nalité du mouvement. Lors de la prépara tion du projet, ceux qui sont au cœur de l’or ganisation prennent les plus gros risques. Ils n’opposeront aucune résistance à ceux qui viennent les arrêter. Une fois arrêtés, ils ne feront pas appel à un avocat, ne demande ront pas de libération sous caution et ne se défendront pas devant le tribunal. En revan che, pour ceux qui seront dans le deuxième cercle de l’organisation, les dirigeants pré voiront avocats et plaidoiries en cas d’arres tation. Ceux qui ont des vieux parents ou Les trois obstacles à une élection démocratique à Hongkong POURQUOI LE PROCESSUS D’ÉLECTION DU CHEF DE L’EXÉCUTIF EST CRITIQUÉ PAR LES MANIFESTANTS PRO-DÉMOCRATIE 1 La représentativité du comité de nomination est contestée 7% 1 200 MEMBRES ÉLUS PARMI 1 734 CANDIDATS EN 2011 (239 089 VOTANTS) UN COLLÈGE ÉLECTORAL RESTREINT ÉLIT des enfants à charge, et qui se trouveraient en difficulté en cas d’emprisonnement, res teront à la marge des manifestations. Ainsi ils n’auront pas enfreint la loi. Et en tant que simples badauds, ils augmenteront le nom bre des manifestants lors des rassemble ments. Et pourtant, Occupy Central reste illégal aux yeux de certains. Il s’agit de ces déla teurs payés 50 centimes par le pouvoir, ces bavards inutiles et autres lèchebottes. Même s’il est illégal, Occupy Central est en fait conforme à l’esprit de la loi. La popula tion ne doit entrer en désobéissance civile que lorsqu’elle aura épuisé toutes les voies légales d’expression. Aton organisé des manifestations autorisées ? Oui. LE COMITÉ DE NOMINATION DES CANDIDATS AU POSTE DE CHEF DE L’EXÉCUTIF 2 Le processus d’élection des candidats est durci 1 200 MEMBRES DU COMITÉ DE NOMINATION DE L’EXÉCUTIF Après 2017 LE COMITÉ ÉLIT CHAQUE CANDIDAT À LA MAJORITÉ ABSOLUE 601 votes = majorité absolue 3 Un nombre limité de candidats est soumis au suffrage universel CHINE 3,5 millions 2 3 À CANDIDATS SEULEMENT DE PERSONNES DE PLUS DE 18 ANS PEUVENT VOTER POUR HONGKONG ¶ Le choc entre deux systèmes Si l’on réprime le mouvement dans le sang comme en 1989, il sera de nouveau montré du doigt, isolé comme le paria de l’histoire. Même si ce pouvoir paraît fort, pourratil supporter les effets négatifs d’un écrasement du mouvement ? On peut en douter. Si le pou voir fait des compromis, cela sauvera la démo cratie de Hongkong et encouragera les désirs de démocratie de la société chinoise. On a dé passé le moment où ce mouvement peut être contrôlé par des individus ou des organisa tions. Cette révolution démontre les particu larités de l’époque contemporaine et des mou vements sociaux du Web 2.0 : une organisa À L’ÉLECTION DU CHEF DE L’EXÉCUTIF SOURCE : JOANNA WONG tion sans direction centralisée ; un mouve ment à plusieurs têtes ; une union de l’organisation et de la spontanéité. Ce que démontre ce mouvement, c’est le choc entre deux systèmes. Sous la dictature, il ne peut pas y avoir de système où règne la liberté. Permettre aux Hongkongais d’exercer leur droit au suffrage universel, c’est ouvrir une brèche dans la digue de la dictature. Cette brèche finira par provoquer l’effondrement de la dictature. Sur une autre pancarte, on peut lire : « N’en voyez plus de gaz lacrymogène ! Nous pleurons déjà assez comme ça ! » Les Hongkongais ont ému la planète. Ils ont besoin de l’aide du monde entier – médias, gouvernements, ci toyens, organisations humanitaires – dans ce bras de fer bouleversant. Chaque fois qu’une dictature massacre des citoyens pacifiques, la responsabilité de chaque citoyen du monde est engagée. p Traduit du chinois par Marie Holzman Traduit du chinois par Marie Holzman Teng Biao est un avocat chinois spécialisé dans la défense des droits de l’homme. Il préside l’organisation La Chine contre la peine de mort à Pékin et a cofondé, en 2003, l’ONG Open Constitution Initiative (Gongmeng). Teng Biao, également chercheur associé à Havard, est l’un des 303 intellectuels chinois signataires de la Charte 08 la démocratie de demain. » Même si l’on n’en visage pas une répression brutale, on ne peut s’empêcher de penser que la patience des ci toyens et l’énergie des organisateurs connaî tront leurs limites. Pékin devra aussi faire un choix déterminant. ABOUTISSANT s’était révélé lors du mouvement contre « l’instruction patriotique » en 2012, a fran chi les barrières fermant l’accès à la place pu blique. Après l’arrestation de ceux qui ont violé cette interdiction, les trois cofonda teurs du mouvement – Joshua Wong, Tai Yiuting et Chan Kinman – et les démocra tes ont exigé la libération des étudiants pen dant que les rassemblements atteignaient quelque 500 000 personnes. De plus en plus de monde convergeait vers la manifesta tion. Le 28 septembre au matin, Occupy Cen tral a démarré plus tôt que prévu. Les poli ciers ont encerclé les manifestants mais les citadins ont accouru en urgence pour en tourer à leur tour les policiers. La contesta tion gagnait aussi les avenues adjacentes. Tout cela s’est accompli en quatorze heures depuis l’annonce officielle d’Occupy Cen tral. Le mouvement s’était déjà diffusé à Jin zhong et Wanchai. Dans la nuit du 28 au 29 septembre, la police a lancé 87 bombes la crymogènes sur les manifestants. Ces der niers ont aussitôt sorti leurs parapluies qu’ils avaient pris soin d’emporter avec eux pour se protéger des gaz. Ainsi est née l’ex pression de « révolution des parapluies ». Pourtant, les bombes lacrymogènes n’ont pas suffi à disperser la foule. Des dizaines de milliers de citoyens, choqués par les coups portés contre les étudiants et les images de tabassage diffusées à la télévision, sont ve nus grossir leurs rangs en solidarité. Les ma nifestations se sont élargies jusqu’à Ton gluowan, Mongkok, Jinshatsui. Qu’on le veuille ou non, tout le monde sait que le véritable ennemi se trouve au cœur de la plus grande dictature de la planète. Ce pou voir a assassiné les étudiants sur la place Tia nanmen en juin 1989 à coups de tanks et de baïonnettes. Il est maintenant à Shenzhen et sur la rive opposée, à Hongkong. En fait, il s’est déjà depuis longtemps glissé dans les ar tères de Hongkong, y compris dans l’admi nistration et l’armée. Même si personne ne veut le voir, Occupy Central a depuis long temps été désigné par les autorités de Pékin comme un mouvement « séparatiste », « al lié aux forces ennemies de l’intérieur et de l’ex térieur du pays ». Cela n’évoquetil pas la condamnation à perpétuité de l’intellectuel ouïgour pacifique et modéré Ilham Tohti ? p déclaration conjointe sinobritannique de 1984. Ce que Deng Xiaoping, l’ancien leader chinois, avait décrit comme une simple pas sation des pouvoirs qui se limiterait à un échange de drapeau au sommet de Hon gkong – pendant que les « courses de che vaux se poursuivraient et que les danseurs se réjouiraient dans leurs bals » – s’est trans formé en un « tu peux aller te brosser » uni latéral. Néanmoins, les organisateurs du mouvement ont poursuivi leur recherche de dialogue avec les autorités, espérant que l’annonce du mouvement d’Occupy Central servirait de moyen de pression et que leurs appels émouvants suffiraient à ébranler le pouvoir. S’il avait été possible d’obtenir des résultats sans « occuper le centre », ils s’en seraient bien passés ! Pendant ce temps, les sentiments de ré volte qui s’étaient immiscés dans le cœur des Hongkongais avaient fini par tourner à l’aigre. La patience était épuisée. Le 22 sep tembre 2014, les associations d’étudiants et de la société civile ont lancé la grève. Le 26 septembre au soir, Huang Zhifeng, qui « Printemps arabe » à Hongkong les hongkongais ne peuvent plus reculer. S’ils ne se rebellent pas, leur démocratie sera repoussée aux calendes grecques. Ce dont ils sont le plus fiers – liberté, droits de l’homme et indépendance de la justice – disparaîtra. La ré volution n’attend pas qu’on l’invite. Mainte nant qu’elle est là, nous devons faire avec. Sans s’en rendre compte, le mouvement de Hongkong est devenu l’héritier des « prin temps arabes ». Le monde le regarde. Les ma nifestants se battent pour la démocratie de Hongkong, mais aussi pour la Chine. Le poids de cette révolution est trop lourd pour les Hongkongais. Le déséquilibre des forces entre Hongkong et le cœur du pouvoir communiste à Zhon gnanhai [Kremlin chinois] est dispropor tionné. Si le mouvement se poursuit, le far deau économique deviendra insupportable pour la vie des Hongkongais. Sur une pan carte, il est écrit : « Excuseznous. Le désordre de la rue d’aujourd’hui prépare le boulevard de LE CHEF À LA MAJORITÉ SIMPLE HÉRITÉE DE LA COLONISATION Le 1er juillet 2014, la manifestation a battu tous les records, avec une participation de plus de 500 000 personnes. Le rôle des mé dias ? Même s’ils ont été infiltrés par le pou voir communiste et que de plus en plus de journalistes ont subi des attaques violentes ces derniers temps, les citoyens de Hon gkong peuvent toujours se tourner vers eux pour exprimer leurs desiderata. La voie lé gislative ? Même si les collèges socioprofes sionnels, cette forme étrange de la représen tation politique héritée de la colonisation britannique, continuent à orienter les élec tions à Hongkong, ceux qui relèvent des partis démocratiques – comme le Parti dé mocratique – représentent encore un tiers des élus. Cela ne s’est pas fait sans efforts ! Le Conseil législatif est plus un symptôme de la maladie qu’un remède. Parler avec le gou vernement chinois ? Tout ce qui a pu être dit a été dit. Ceux qui n’ont pas d’atout en main et qui doivent affronter un adversaire qui ne craint ni de manipuler ni de revenir sur ses promesses ne peuvent qu’échouer. La grève des cours et des usines ? Tout a été tenté jus qu’à l’épuisement des troupes. Pourtant, l’espoir de se faire entendre ne cesse de s’éloigner. Pékin ne fait que reculer la date de l’échéance du suffrage universel à Hongkong. Dans le Livre blanc publié le 10 juin – sur la mise en œuvre de la politique « un pays, deux systèmes » à Hongkong – le concept de « pouvoir de tout contrôler » a émergé. La stupéfaction a frappé tous les mi lieux de Hongkong. Le 31 août, la « décision » du Comité permanent de l’Assemblée natio nale marque un réel pas en arrière par rap port à l’ancien système d’élection indirecte par les administrateurs locaux. En appa rence, le principe « un électeur, une voix » est respecté. En fait, ce sont des élections à l’ira nienne, où tous les candidats auront été dé signés par les représentants du pouvoir qui sont en train de s’organiser. Les tergiversations de Pékin se sont trans formées en tromperie et humiliation pour Hongkong. Le pouvoir central a fini par montrer son vrai visage en déchirant les ar ticles concernés de la loi organique et de la LE COMITÉ ÉLIT Avant 2017 eclairages | 15 0123 MARDI 7 OCTOBRE 2014 Barack Obama et les risques de la guerre à reculons ANALYSE gilles paris washington correspondant CHEF DE GUERRE MALGRÉ LUI, LE PRÉSIDENT A TENTÉ DE LIMITER L’ENGAGEMENT AMÉRICAIN À SON MINIMUM L e terme emprunté à l’argot militaire remonte à la Somalie. Il est revenu avec insistance depuis que le prési dent des EtatsUnis, Barack Obama, s’est donné l’objectif le 10 septembre « d’affai blir et de finalement détruire l’Etat islamique » en Irak et en Syrie. « Mission creep », c’est la dérive d’une mission en dehors du cadre ini tial et dont le prix politique est généralement particulièrement élevé. Cette crainte de perte de contrôle est profondément ancrée dans la réflexion du président des EtatsUnis. Elle ex plique sa réticence avérée à se saisir d’un outil militaire dont la surpuissance peut précipiter dans le piège de l’hubris : l’ivresse précédant l’erreur, l’erreur précipitant l’échec. La décision de Washington d’étendre ses frappes aériennes contre l’Etat islamique à la Syrie, et d’élargir au passage son action à un autre groupe djihadiste encore inconnu il y a peu, Khorasan, ramène au pre mier plan cette menace de « mis sion creep ». Contrairement à l’Irak, où les EtatsUnis interviennent à la demande d’un gouvernement allié, la Syrie, théâtre d’une ef froyable guerre civile depuis trois ans, est en effet devenue sur une bonne partie de son ter ritoire une « zone grise » à la somalienne. Sur ce terrain incertain, le guerrier réti cent qu’est Barack Obama n’est guère à son avantage. Trois de ses décisions en attes tent. La première a consisté le 9 août pour le président à s’absoudre de toute faute dans la décision de retirer la totalité des troupes amé ricaines d’Irak en décembre 2011, un an avant la présidentielle de 2012. M. Obama, pressé d’en finir, s’était pourtant privé d’un puis sant levier visàvis d’un pouvoir irakien déjà engagé dans une surenchère sectaire, ter reau sur lequel l’Etat islamique a prospéré. DÉBATS SURRÉALISTES Le président a ensuite opéré un revirement brutal le 10 septembre à propos de l’opposi tion « modérée » syrienne. Cette dernière avait été décrite jusqu’alors comme un re groupement un peu pathétique « de médecins, pharmaciens et paysans », coincé entre la puis sance de feu du régime de Bachar AlAssad et celle des djihadistes. Cette présentation justi fiait l’attentisme adopté par la Maison Blan che sur la Syrie alors qu’une partie de son équipe, fin 2012, prônait une intervention aux côtés des insurgés. Faute de mieux et du fait de la promotion de l’Etat islamique comme menace directe pour les intérêts américains, cette opposition a été érigée à la dernière mi nute en alternative, à raison d’un peu d’équi pement et d’entraînement, mais sans con vaincre. Enfin, le président s’est un peu commodé ment défaussé sur ses services de renseigne ments qu’il a rendu responsables, le 28 sep tembre, d’avoir sousestimé la menace consti tuée par le mouvement djihadiste. Usant d’une méthaphore sportive, M. Obama l’avait qualifié en février d’équipe de « remplaçants » (« JV ») par rapport à AlQaida. Une expression malheureuse qu’il traîne comme un boulet. Devenue inévitable à la suite des progrès des djihadistes, la mission américaine, qui n’a tou jours pas reçu de nom de code officiel, a ali menté des débats parfois surréalistes avec les porteparole du département d’Etat et de la Maison Blanche sur le fait de savoir s’il s’agis sait, ou non d’une « guerre ». Elle a égale ment souligné la relation délicate entrete nue par le président avec ses généraux. Cette relation avait débuté dans la difficulté en 2009 sur la question du « surge » afghan, à une époque où l’Irak était considéré, après les heures sombres de 20042005, comme un théâtre d’opérations relativement stabilisé. Sujet du livre de Bob Woodward, Obama’s Wars (Les Guerres d’Obama, éditions Denoël 2011), une interminable négociation avait op posé les militaires au président sur les effectifs qui devaient être déployés pour préparer un retrait en bon ordre. Les tensions d’alors ont été ravivées ces derniers jours par l’affronte ment entre logique politique et logique mili taire. Chef de guerre malgré lui, le président a tenté de limiter l’engagement américain à son minimum pour éviter de se détourner de ce qu’il considère toujours comme la mission principale de ses deux mandats et qu’il a évo qué d’une manière décalée dans la seconde partie de son discours du 10 septembre : la re mise en ordre de la maison Amérique. Il s’est retrouvé de ce fait en porteàfaux avec les ex perts militaires, qui ont en moins d’un mois remis en cause le cadre défini par le président : un effort limité, réduit à l’Irak ; une pro messe de ne pas engager de troupes américai nes au sol. M. Obama a dû rapidement céder sur le pre mier point puisqu’il était impossible de recon naître le moindre sanctuaire à la cible visée. Combien de temps pourratil tenir sur le se cond alors que les voix ne cessent de s’élever, et pas seulement celles d’officiers de réserve, pour douter de la pertinence opérationnelle d’un tel choix et du sens tactique qu’il y a à le claironner ? L’engagement américain con tre le califat marqué de sang d’Abou Bakr Al Bagdadi a tardé. Il sera long. Le risque est qu’en voulant éviter à toute force une dérive, l’effort de guerre soit bridé, puis finalement brisé par la réticence. M. Obama sera parvenu bientôt à la moitié de son second mandat. Il sait pertinemment que la partie qui se joue sur les deux rives de l’Euphrate, en partie héritée de son prédéces seur et qu’il transmettra sans doute à celui ou celle qui lui succédera à la Maison Blanche, contribuera en grande partie à son bilan. Mais le moins que l’on puisse dire est qu’il ne s’y en gage pas en position de force. p paris@lemonde.fr LE GRAND RENDEZ-VOUS EUROPE 1, LE MONDE, I-TÉLÉ Michel Sapin: «Je suis radicalement contre la GPA» Au printemps 2013, la France avait obtenu un délai, à condition d’être au rendez vous des 3 % de déficits en 2015. Mainte nant, c’est 2017. De délai en délai, on n’a pas confiance dans la France. N’estce pas choquant ? D’un certain point de vue, je peux le com prendre, puisque le plus grave n’a pas été du tout en 2013, mais une dizaine d’années avant, lorsque deux des plus grands pays sont venus, c’était avec Jacques Chirac, mais déjà Mme Me rkel, voir la Commission en disant : « Les rè gles que vous appliquez aux autres ne s’appli quent pas à nous. » C’était Gerhard Schröder… Oui, c’était Gerhard Schröder, vous avez rai son. Ils sont venus en disant : « Ces règles ne s’appliquent pas à nous. » Moi, je ne dis pas : « Les règles ne s’appliquent pas à nous. » Les règles de l’Europe s’appliquent à tous. Mais il faut les changer pour la France ? Pas du tout. Si je disais ça, je serais d’une hy pocrisie absolue. En 2003, deux grands pays demandent de ne pas se voir appliquer les rè gles. L’un fait les réformes. L’autre pays, qu’il s’agisse de Chirac ou de Sarkozy qui clamait partout qu’il voulait faire des réformes, n’a pas fait de réformes. Personne ne peut cacher LES INDÉGIVRABLES PAR GORCE la difficulté aujourd’hui, mais il ne faut pas ca cher non plus les responsabilités. En fait, vous n’allez pas respecter les rè gles sans demander la permission… Je ne demande aucun changement des rè gles. Ces règles, nous les avons voulues, ce sont des traités. Ces règles doivent s’appliquer de la même manière pour tout le monde, les grands comme les petits pays. Ce que je demande, et c’est le grand débat : dans quelle situation est aujourd’hui l’Europe ? L’Europe, et la plupart des pays d’Europe dont la France, ont une croissance beaucoup trop faible, qui risque de l’être durablement. On est sorti de la crise fi nancière, difficilement ; on est sorti, je pense, de la crise dite de l’euro ; mais nous sommes rentrés dans une période qui nécessite une ap plication, une doctrine économique au niveau européen adaptée à cette situation. Comment concilieton le fait que la gesta tion pour autrui (GPA) est interdite en France mais qu’on reconnaît les enfants nés de GPA ou, en tout cas, on ne fait pas appel d’une décision qui a décidé que les enfants devaient être reconnus ? Ce sont deux choses différentes. Autoriser la GPA en France est une chose : nous sommes contre, je suis radicalement contre, parce qu’il y a peutêtre des drames personnels, une envie d’enfants parfaitement compréhensible, mais la conséquence de cela, c’est une exploita tion insupportable, d’une autre femme qui le fera. Pourquoi ? Pour rendre service ? Non, la plupart du temps parce qu’elle a besoin d’ar gent. La marchandisation du corps de la femme est insupportable. Mais pourquoi ne faitesvous pas appel de la décision de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) ? Lorsqu’un enfant est né − je ne dis pas avant −, lorsqu’il est sur le sol français, vous imaginez qu’on considère qu’il n’existe pas ? Qu’il n’est pas un être humain ? C’est la ques tion qui avait été posée à la CEDH. Manuel Valls dit : « Pas de transcription automatique ». Et au cas par cas, oui ? C’est ce qu’il se passe aujourd’hui. Pourquoi il ne faut pas de transcription automatique ? Ce serait une forme de reconnaissance du principe même de la GPA, même si elle a lieu dans un autre pays. Par contre, lorsque vous êtes dans une situation humaine, lorsque vous avez un monsieur et une dame qui ont dans leur foyer un enfant, il n’a pas le droit d’avoir une nationalité ? On créerait un apa tride ? Il devient quoi cet apatride ? Non, on n’encourage rien. Simplement, il faut dire la conviction : c’est non à la gestation pour autrui. Le gouvernement n’a jamais changé d’avis depuis deux ans. Il faut éviter que cer tains brandissent un épouvantail unique ment pour mobiliser des gens dans la rue. Comment jugezvous le retour sur la scène politique de Nicolas Sarkozy ? Je ne veux pas juger la personne, tout le monde a compris qu’il n’avait pas changé, sauf peutêtre en pire. Mais je voudrais juste dire un mot sur ses propositions dans le domaine économique : effarantes. Le même qui a fait ces centaines de milliards de dettes, il vou drait, tout d’un coup, tout casser, tout suppri mer. Il sait luimême qu’il se ment à luimême. Je disais ce matin : on n’est jamais au bout de son étonnement avec Nicolas Sarkozy. p « LA GESTATION POUR AUTRUI, C’EST LA MARCHANDISATION, QUI EST INSUPPORTABLE, DU CORPS DE LA FEMME » propos recueillis par michaël darmon, jeanpierre elkabbach et arnaud leparmentier ¶ Michel Sapin Ministre des finances et des comptes publics Le Grand Rendez-Vous avec « Le Monde » est diffusé chaque dimanche de 10 heures à 11 heures sur Europe 1 et i-Télé HillaryetBill,jamais l’unesans l’autre H illary Clinton ne s’est toujours pas officiellement déclarée candidate à la présidentielle de 2016 aux EtatsUnis, mais ce faux suspens ne trompe personne : la Maison Blanche lui semble promise. Bill et Hillary se relanceront bientôt en campagne. Et ce couple déjà mille fois contraint de se réinventer devra de nou veau renaître. Comment fonctionnera alors cet intriguant duo ? Certains fins stratèges y réfléchissent sans doute, mais on peut déjà trouver certains éléments de réponse dans l’enquête menée par l’américaniste Thomas Snégaroff, Bill et Hillary Clinton. Le mariage de l’amour et du pouvoir. Tout l’intérêt de ce livre est de rassem bler deux destins intimement liés qui se sont raconté chacun de leur côté dans une abon dante littérature. Cette biographie d’un couple accompagne sa transformation, au moment où les rôles pourraient bien s’inverser, Bill first husband et Hillary commander in chief. S’il est coutumier de présenter l’ancien pré sident comme le cœur de ce couple et l’ex pre mière dame comme son esprit, il faudra qu’Hillary sache remiser son sérieux pour sa voir séduire les Américains. A l’inverse, Bill de vra savoir modérer ses élans pour se mettre au service de sa femme. Il a certes commencé à le faire depuis 2000, date de l’entrée de plainpied d’Hillary en poli tique, lorsqu’elle a été élue au Sénat, après le second mandat de son mari. Jusqu’alors, ils étaient tous les deux liés par leur « pacte de vingt ans », conclu dans les années 1970, avec l’objectif de faire élire Bill à la présidence en 1992. La femme ambitieuse et combative qu’est Hillary a accepté de se mettre en retrait pour permettre à Bill de briller. UN COUPLE TUMULTUEUX L’apprentissage a été dur et amer. Hillary n’est pas parvenue à s’imposer politiquement en tant que première dame, comme en témoigne son échec à faire adopter une réforme de la santé, un dossier que lui avait confié son prési dent de mari. Mais, si la liaison de Bill avec Mo nica Lewinsky a été particulièrement humi liante pour elle, c’est aussi ce qui lui a permis de retrouver la sympathie de l’opinion publi que américaine, qui ne voyait en elle qu’une femme cassante et autoritaire. Bill a pour sa part encore des apprentissages à faire pour bien servir les ambitions de sa femme. Lors des primaires démocrates de 20072008, ses colères et certains de ses pro pos avaient donné l’impression que les Clin ton estimaient que le pouvoir leur revenait de droit. Contre le cliché de la duplicité de ce cou ple tumultueux, Thomas Snégaroff montre un mariage certes uni par la politique, mais aussi plein d’humanité. Au moment de livrer bataille, ils sont plus près que jamais l’un de l’autre. Il résume en une formule la mentalité d’as siégés qui lie ces deux êtres, « seuls contre tous, mais ensemble ». Les combats qu’ils ont me nés ont permis de ressouder leur mariage, comme s’il reposait sur l’adversité. Hillary, ex chef de la diplomatie, a su se tailler une image de femme d’Etat, à Bill de trouver dans la phi lanthropie les ressorts d’un énième retour sur l’avantscène. p Bill et Hillary Clinton. Le mariage de l’amour de Thomas Snégaroff Tallandier, 372 p., 20,90 euros. 16 | à nos lecteurs 0123 MARDI 7 OCTOBRE 2014 « Le Monde » change, l’esprit demeure Un nouveau «Monde» multisupports suite de la première page La lecture du quotidien constitue un mo ment à part, un arrêt sur image, dans le flux continu de l’information. Avec cette nouvelle formule, nous voulons conju guer l’information exclusive, les angles et les reportages originaux, l’approfondissement des grands sujets d’actualité et le plaisir de lecture, car il n’y a pas de raison que celle du Monde soit rébarbative. Il ne s’agit pas pour autant de dérouter le lecteur : Le Monde con A PARTIR tinue de reposer sur ses quatre piliers que sont DU 6 OCTOBRE, ses services Internatio nal, France, Economie UN JOURNAL et Culture. Mais il ne PLUS AUDACIEUX s’arrête pas là et joue la diversité, l’ouverture : ET MIEUX le service Planète & Sciences continue HIÉRARCHISÉ d’apporter des éclaira ges originaux sur l’éco système dans lequel évolue l’humanité, la place réservée à la culture s’accroît, le sport sera au rendezvous de l’actualité, les pages Styles sont repensées et s’ouvrent davan tage aux thématiques de la vie quoti dienne. Une page quotidienne et quatre pages hebdomadaires (dans le journal du samedi daté dimanchelundi) consacrées à l’univers de la télévision et de la radio font leur appa rition dans le premier cahier du journal. La façon dont nous regardons la télévision a considérablement évolué ces dernières an nées, le regard du Monde devait donc chan ger lui aussi. Notre supplément « Télévisions » s’arrête, mais ses contenus demeurent : les sélections quotidienne et hebdomadaire d’émissions et de films ainsi que les choix critiques de nos spécialistes doivent aider chacun et cha cune à mieux s’y retrouver dans l’offre plé thorique de programmes. Le rythme quoti dien permet de mieux coller à l’actualité du monde de l’audiovisuel. De la télévision à la révolution numérique en cours, il n’y a qu’un pas. Raconter les bou leversements provoqués par les nouvelles technologies, notamment dans les médias, c’est l’objectif de la nouvelle page quoti dienne baptisée Pixels, qui vient clore le se cond cahier du quotidien, Eco & Entreprise, et s’inspire de la réussite que constitue la ru brique du même nom sur Lemonde.fr. Autres nouveautés : deux rendezvous hebdomadaires, chaque mercredi dans le premier cahier. L’un avec la géopolitique in ternationale, sous la forme d’une page très visuelle ; l’autre avec les universités et les grandes écoles, le secteur de l’éducation res tant un des points forts du Monde, comme le montre le succès de la nouvelle chaîne Cam pus sur notre site Internet. Enfin, les pages Enquête, les débats et les analyses de nos journalistes regagnent le centre du journal, entre l’actualité nationale et la culture. Vous y retrouverez régulière ment les « Lettres de » rédigées par notre ré seau de vingt correspondants à l’étranger. Quant à notre éditorial quotidien, il vous donne désormais rendezvous en dernière page du premier cahier. Il s’agit d’offrir un journal plus agréable à lire, complet mais pas indigeste, qui donne à ses lecteurs, à travers des angles et des sujets originaux, les clés d’une meilleure compré hension de l’actualité, des failles qui traver sent nos sociétés, des enjeux et mutations qui dessinent leur avenir. M, le magazine du Monde, s’apprête de son côté, dès son prochain numéro, à faire évo luer sa maquette pour mieux mettre en ma jesté, lui aussi, articles au long cours et pho tos grand format. Il va également investir l’univers numérique avec le lancement, le 10 octobre, d’une chaîne M, articulée autour du regard décalé du magazine sur l’actualité et des grandes thématiques « styles », que l’on retrouve également dans les pages du quotidien. Mais le plus grand changement, pour ce journal qui fêtera ses 70 ans le 18 décembre, demeurera paradoxalement invisible à ses lecteurs. Ce lundi 6 octobre, un nouveau sys tème éditorial commun à nos supports im primé et numérique entre en vigueur. Jus qu’à présent, nos journalistes devaient utili ser deux systèmes différents, selon qu’ils tra vaillaient pour le quotidien ou pour le site Internet. Cela pourrait sembler anecdotique, mais il n’en est rien. Cette évolution doit accélérer la transformation du Monde en un média dont la qualité de l’information et le degré d’exi gence, d’expertise et de rigueur se déploient sur tous les supports. Elle doit permettre qu’à terme il n’y ait plus de journalistes « print » ou de journalistes « Web », mais des journa listes dont le seul objectif est de produire (un verbe qui heurte les oreilles de certains, mais il est parlant) la meilleure information possi ble dans le délai le plus court possible. Un objectif qu’auraient partagé sans hési tation toutes les générations de journalistes du Monde. Les temps et les journaux chan gent, mais l’esprit demeure. p Un site rénové pour «M» M Le magazine du Monde a décidé de refondre son site Web à compter du 10 octobre. Il s’agit de permettre à nos lecteurs d’approfondir l’expérience du magazine autour des thématiques qui ont fait son succès depuis septembre 2011 : un regard décalé sur l’actualité, de longs articles fouillés et un panorama des nouveautés de l’univers du style au sens large, soit tout ce que les Anglo-Saxons rassemblent sous le label « lifestyle ». Ce nouveau site de M Le magazine sera aussi l’occasion d’explorer la dimension individuelle à travers une nouvelle rubrique, Perso. Avec distance, malice et humour autant que sérieux et volonté d’informer, on y traitera de tout ce qui questionne, travaille, perturbe et aiguillonne nos existences modernes : sexualité, famille, réseaux et vie numériques. A travers cet univers de M sur le Web, le magazine entend se rapprocher de ses lecteurs, partager avec eux ses choix, ses goûts, ses lubies, bref son état d’esprit. Evidemment, des contenus inédits et exclusifs seront mis à disposition des internautes : photos, vidéos, éclairages complémentaires aux articles du magazine. Si M a su, depuis quelques années, compléter intelligemment l’offre du quotidien dont il est l’émanation, le site de M espère proposer aux internautes du Monde.fr le même contrat de lecture : une zone nouvelle, rafraîchissante autant qu’instructive et pertinente. Marie-Pierre Lannelongue, directrice adjointe des rédactions gilles van kote directeur du « monde » Réinventer notre modèle économique I nnover, investir, se transformer : autant de priorités menées de front par les équipes du Groupe Le Monde depuis sa recapitalisation il y a quatre ans, et dont nous récoltons en cette année anniver saire de nouveaux fruits. Si, comme tous les quotidiens français et étrangers, Le Monde doit intégrer à son équa tion économique la fermeture de nombreux points de vente et l’extrême fragilité de notre système de distribution, les dernières études montrent un vrai rebond de notre audience, à la mesure des nombreuses innovations lancées mois après mois par la rédaction : of fre weekend, avec, au centre, la réussite ex ceptionnelle de M le magazine du Monde, ca hier quotidien « Eco & Entreprise », cahier « Science & médecine », et, sur le digital, les chaînes Pixels et Déco IL NOUS FAUT deurs, qui, moins de six mois après leur DÉSORMAIS ÉLARGIR lancement, enregis trent chacune plus de ET DIVERSIFIER NOS 3 millions de visites ACTIVITÉS ET NOS mensuelles. Autant d’innovations cohéren SAVOIR-FAIRE tes avec notre stratégie de montée en gamme, et qui expliquent large ment la progression de + 5,9 % de notre audience (source étude Audipresse One 2014), avec notamment les performances de M (+ 19,1 %) et notre pro gression auprès des publics féminins (+ 12,7 %) et de nos lecteurs « affaires et ca dres » (+ 19,2 %). Ce succès s’étend aussi au digital, avec une croissance forte de nos abonnés numériques (145 000 abonnés, et + 32 % des abonnés purement numériques), la première place de l’application du Monde pour son audience mobile, et enfin une pré sence inégalée sur les réseaux sociaux, avec près de 5 millions de fans et de followers, gage de notre présence auprès des nouvelles générations de lecteurs. Au centre de ces succès figurent les deux priorités d’investissement de notre groupe : l’excellence rédactionnelle et notre muta tion numérique. A un moment où la profusion d’informa tions gratuites disponibles nous impose plus que jamais de justifier la valeur de nos contenus, et alors que beaucoup de titres sont amenés à amputer leurs ressources ré dactionnelles, nous avons ainsi veillé cette année à sanctuariser les effectifs perma nents des rédactions du Monde dans le cadre d’un accord signé avec les organisations syn dicales. Dans le même temps, nous nous sommes engagés dans la transformation de notre ré daction avec un plan de mobilité et une prio rité désormais donnée dans nos recrute ments aux profils plus digitaux. En fin d’an née, cette transformation devrait s’incarner par la fusion de la Société éditrice du Monde (SEM) et de sa filiale Le Monde interactif (MIA), rendue possible par la sortie du Groupe Lagardère de son capital et par l’ac cord signé avant l’été sur l’harmonisation des statuts des rédactions. Cette dynamique collective, sous la houlette de Gilles van Kote à la direction du journal et de Jérôme Feno glio à la direction des rédactions du Monde, a donné en cette rentrée, servie par une actua lité exceptionnelle à défaut d’être heureuse, des résultats positifs dont témoigne la diffu sion France payée du Monde, qui devrait être en progression cette année − chose rare en ces temps de reflux et hors période électo rale ! Nous sommes convaincus que les dévelop pements que nous vous présentons aujourd’hui, dans le quotidien, sur le digital et, le weekend prochain, sur M, vont prolon ger et amplifier cette dynamique vertueuse, en dépit d’un contexte économique très in certain. Mais ces performances ne suffiront pas à elles seules à pérenniser notre groupe, qui affichait encore sur l’exercice 2013 une perte d’exploitation de 1,9 million d’euros pour des revenus de 367 millions d’euros. C’est pourquoi, en parallèle de ces innovations, nous menons en cette rentrée plusieurs chantiers structurants, qui peuvent, il est vrai, perturber par moments nos parutions. D’abord, il nous faut réformer notre schéma industriel, et, à cette fin, nous menons de puis plusieurs semaines avec les organisa tions syndicales des discussions préalables à la fermeture de notre imprimerie historique d’IvrysurSeine, qui pourrait intervenir dès le début de 2015, pour autant que des solu tions sociales et d’emploi soient trouvées et que la puissance publique accompagne réel lement cette évolution majeure qui touchera toute la filière. OUVERTURE À L’INTERNATIONAL Dans ce contexte chahuté, nous savons combien les problèmes de distribution pè sent sur vous, fidèles lecteurs et abonnés. Sachez que nous en sommes très conscients et que nous nous employons quotidienne ment à y remédier avec l’ensemble des par tenaires concernés par cette partie (Poste, sociétés de portage, équipe logisti que). Il nous faut aussi rassembler toutes les for ces de ce groupe, construit au fil des années autour du Monde, de Télérama, de Courrier international, de La Vie et du Huffington Post, tout en préservant les identités respec tives de ces titres. Chacun ici a conscience que les transformations accélérées des usa ges et de notre secteur nous forcent à réin venter sans délai notre modèle économi que. Cela doit être pour nous l’occasion de poursuivre l’évolution de nos organisa tions, avec la perspective prochaine de ras sembler l’ensemble des 1 200 salariés du groupe dans un siège social nouveau, capa ble aussi d’accueillir les nouveaux métiers qu’il nous appartiendra de saisir. Notre ambition collective de construire un groupe pérenne et indépendant, conjuguée aux efforts de tous pour construire un dialo gue social respectueux de chacune des par ties, doit nous permettre de sortir rapide ment d’un impossible statu quo. C’est même essentiel pour notre avenir. Mais la rationalisation de nos activités ne peut être le seul vecteur de notre redresse ment. Il nous faut élargir et diversifier nos activités et nos savoirfaire. En cela, l’ample réussite du « Monde Festi val » le weekend des 20 et 21 septembre, avec plus de 10 000 participants, tout comme le succès exceptionnel de « Télérama Dialo gue », organisé le 29 septembre, ou la master class organisée par le Huffington Post le 15 novembre nous ouvrent de nouvelles perspectives à un moment où lecteurs et in ternautes attendent de nous que nos titres soient des acteurs du débat public. Il nous faut maintenant construire des al liances en France et à l’international, renfor cer notre savoirfaire, élargir notre périmè tre. La poursuite de notre redressement en dépendra aussi. C’est pourquoi nous tra vaillons désormais sur notre développe ment audelà de nos frontières naturelles, et qu’en particulier nous préparons avec la ré daction et sous la responsabilité de Serge Mi chel, pour la fin d’année, une série d’initiati ves en direction de l’Afrique, à un moment où la francophonie peut être pour nous un nouvel horizon, avec toujours la même exi gence de rigueur et d’excellence. C’est enfin dans cette logique de conquête de nouveaux marchés et de développement que l’acquisition du Groupe Nouvel Observa teur par Pierre Bergé, Xavier Niel et Matthieu Pigasse, actionnaires majoritaires du Groupe Le Monde, tout comme leur récente offre de reprise de la chaîne d’information en con tinu LCI sont porteuses d’avenir pour les sa lariés de ces entités, pour nous, et donc pour vous, chers lecteurs, dont la fidélité et la con fiance constituent notre moteur principal. Vous pouvez compter sur nous pour veiller, cette année encore, à être à la hauteur de cette histoire que nous célébrons. p louis dreyfus, président du directoire Retrouvez désormais la météo et les grilles de programmes télé sur Lemonde.fr disparitions & carnet | 17 0123 MARDI 7 OCTOBRE 2014 JacquesThollot Musicien Bernard, Sylvain et Olivier Dreyer Ÿ$ )KÁË$º zɾ ýÁKË&¾ @²@Ë$Í$˺¾ šK÷¾¾KË($¾• GKǺ<Í$¾• "÷KËBK÷ìì$¾• ÍKÁ÷Ký$¾• KËË÷²$Á¾K÷Á$¾ &$ ËK÷¾¾KË($ .²÷¾ &$ &@(>¾• Á$Í$Á(÷$Í$˺¾• Í$¾¾$¾• (ÉË&Éì@KË($¾• úÉÍÍKý$¾• KËË÷²$Á¾K÷Á$¾ &$ &@(>¾• ¾É¶²$Ë÷Á¾ )ÉììÉĶ$¾• (ÉË"@Á$Ë($¾• ¾@Í÷ËK÷Á$¾• ºKGì$¾}ÁÉË&$¾• ÇÉÁº$¾}ɶ²$Áº$¾• "ÉÁ¶Í¾• óɶÁË@$¾ &L@º¶&$¾ ‚ɶº$ËKË($¾ &$ Í@ÍÉ÷Á$• ºú>¾$¾• ©&…{ °‰Çɾ÷º÷É˾• ²$ÁË÷¾¾Ký$¾• ¾÷ýËKº¶Á$¾• ì$(º¶Á$¾• (ÉÍͶË÷(Kº÷É˾ &÷²$Á¾$¾ ¯.%) '.%'T N0R.)3x'N.0 S …f ^X cV cV cV …f ^X cV cf a[ Xx)0T'-3,%vKNXN'TˆR) AU CARNET DU «MONDE» Naissance M Nicole DARGNAT, est heureuse d’annoncer la naissance de me Joséphine, chez Flavien et Virginie LANGUILLAT, En 1975. CHRISTIAN ROSE/FASTIMAGE le 10 juillet 2014. N é à Vaucresson (Hauts deSeine), le 9 octobre 1946, le batteur et compositeur de jazz Jacques Thollot est mort à Main neville (Eure), le 2 octobre 2014, d’une crise cardiaque. Avec sa frange blonde, ses yeux dans les étoiles, ce son d’envol de mésan ges qu’il imprime aux cymbales, sa danse aux tambours ; avec le tempo et ses légendes, on pour rait vous faire le coup du poète écorché et toutes les fanfreluches de l’hélas. Or, Thollot, c’est le contraire. D’une extrême distinction, d’une élégance recherchée, il portait en lui l’idée la plus haute de la musi que. Il l’était. Citant des poètes que personne n’avait lus, peaufinant, comme sa compagne Caroline de Bendern, des points de vue iné dits sur l’Afrique ou le vaste monde qu’ils avaient traversés en compagnie de Barney Wilen, rare. Thollot fait peur à ceux qu’ef fraie la dimension d’être. Ou alors, on l’adule : sans conditions, avec ses colères, ses exigences, sa beauté, cette insensée drôlerie qu’il aurait dû breveter. Photo, 1959 : Thollot joue debout, frelu quet bien peigné, caisse claire et cymbale, au milieu d’un groupe de grands assez sapés. Ils célè brent la tombe de Sidney Bechet à Garches. Son premier « gig », c’est au Sa lon de l’Enfance en 1959, avec un quartet très moderne (déjà, J.F. JennyClark à la contrebasse, plus son frère et la fille des cha peaux Corcelles au piano). Son père le pousse partout. Lui, il est d’une timidité de primevère. Il se retrouve au club de la rue d’Artois, près de l’Etoile, le Blue Note. Il a 13 ans. Disciple favori du batteur Kenny Clarke, cofondateur du bebop (Charlie Parker, Dizzy Gillespie, Monk), il lui sert de doublure. Jouant, blondinet, sous les con seils du trompettiste Donald Byrd, il accompagne Bud Powell, Chet Baker, René Thomas, les héros du jazz qui l’adorent, comme l’aime ront les contrebassistes (JeanPaul Céléa, Claude Tchamitchian). Dans le temple des Américains de Paris, il découvre les magi ciens, leurs potions et suit une formation accélérée en matière de sexe. Pendant la guerre d’Algé rie, Siné devient son mentor comme François Tusques, plus tard, son interlocuteur. L’entrée en freejazz se fait naturellement. Steve Lacy est son Virgile (Moon, gravé à Rome en 1969). Sa rencon tre avec Don Cherry aboutit à une longue tournée et quelques dis ques. En 1969, il enregistre Our Mme Nicole Dargnat, 8, Grande Rue, 23260 La Villeneuve. 9 OCTOBRE 1946 Naissance à Vaucresson (Hauts-de-Seine) 1959 Devient le remplaçant à 13 ans de Kenny Clark au Bluenote 1969 Enregistre « Moon » avec Steve Lacy 2 OCTOBRE 2014 Mort à Mainneville (Eure) Meaning, Our Feeling (Michel Por tal). Toujours présents, François Jeanneau, Bernard Vitet, Siegfried Kessler, Steve Lacy et l’inséparable Barney Wilen (album Zodiac). Quand Barney, J.F. et Thollot en expérimentaient les possibles à venir, au Requin Chagrin, près de la Contrescarpe, on écoutait au soupirail de la rue Blainville (1965). A l’été 1964, Eric Dolphy, passeur inspiré entre Mingus et Coltrane, l’élit comme drummer pendant une semaine insensée au Chat qui pêche. Il meurt bien vite. Le « poète des drums » Thollot, « poète des drums », comme l’appelait Siné, va vers In tra Musique (duo avec Eddy Gau mont). Il enregistre Quand le son devient aigu, jeter la girafe à la mer (1971), Watch, Devil Go, Résur gence, Cinq hops (François Jean neau). Grands gouffres, dispari tions, détresse. En 1979, au festival de Nîmes, mis à l’écart par Wea ther Report, annulé pour absence de Stan Getz dont il devait assurer la première partie, le groupe de Thollot triomphe. Après quoi, il disparaît du paysage. Jac Berrocal le ramène au jour avec un album perçu comme « punk », qui fit quelque bruit et pas mal de concerts (La Nuit est au courant, In Situ, 1993). Quand, au milieu des années 1990, Jean Ro chard, l’indéfectible ami des édi tions nato va le chercher pour produire Tenga Niña, avec sa fille Marie, sur deux titres, les raffinés tendance Raffarin lui glissent : « Tu ne crois pas avoir assez d’em merdements comme ça ? » Suivent A Winter’s Tale (1993), Les films de ma ville (1995), Configuration (1996, Sam Rivers). En 2011, en compagnie de Na than Hanson, sax de Minneapo lis, Tony Hymas (piano) et Claude Tchamitchian, Thollot donne au Sunset un concert sublime. Sans suite. Peu de festivals, pendant quarante ans, aucun des « grands », en tout cas, à l’engager. Signe d’élection ? Sans doute, mais, Jacques Thollot en aura bien souffert. p francis marmande Décès Avrillé. Paris 14e. Bruxelles. Mme Josette Bigorgne, son épouse, Claude et Hugues, Anne et Benoît, ses enfants, Emma, Pauline, Raphaël et Louise, ses petits-enfants, ont la grande tristesse de faire part du décès de M. Jean-Claude BIGORGNE, professeur des Universités, doyen honoraire de la Faculté de médecine d’Angers, survenu le 2 octobre 2014, à l’âge de soixante-treize ans. Une messe sera célébrée le mardi 7 octobre, à 14 h 30, en l’église SaintGilles d’Avrillé, suivie de l’inhumation au cimetière de l’Ouest, à Angers. La famille remercie le service de pneumologie du CHU d’Angers pour sa gentillesse et son dévouement. Condoléances sur registre à l’église. Cet avis tient lieu de remerciements. La Tremblade. Mme Denise Borie, son épouse, Marie-Laurence et Jean-Jacques, Michèle et Philippe, Isabelle et Jean-Louis (†), ses enfants et conjoints, Marine et Alexandre, Claire et Louis, Rémi, Alexandre, Maud et Yassine, Baptiste, Lucas, Agathe et Marius, ses petits-enfants et conjoints, ont la profonde tristesse de faire part du décès de M. Guy BORIE, survenu le 2 octobre 2014, à l’hôpital de Rochefort, à l’âge de quatre-vingts ans. En respect de ses volontés, la crémation aura lieu le mardi 7 octobre, à 14 h 15, à Saintes. M. Borie repose à la chambre funéraire Lotte Baudouin, Zac les Brégaudières, à La Tremblade où un dernier hommage lui sera rendu au moment de la mise en bière, le mardi 7 octobre, à 11 h 45. Ni fleurs ni plaques. Le frère Bernard DUPUY o.p., est entré dans la Paix du Seigneur, le 3 octobre 2014, dans sa quatre-vingt-dixième année et la soixantième année de sa profession religieuse. L’Eucharistie a été célébrée ce lundi 6 octobre, à 10 heures, au couvent Saint-Jacques, 20, rue des Tanneries, Paris 13e. De la part Du frère Michel Lachenaud, prieur provincial de la Province dominicaine de France, Du frère Gilles Berceville, prieur, Des frères du couvent Saint-Jacques Et de ses neveux et nièces. ont le chagrin d’annoncer le décès de Franceline DREYER-LEDOUX, professeur agrégé d’italien, survenu le 25 septembre 2014, après une vie remplie d’amour, de rayonnement, de gentillesse envers ses proches et ses élèves. Une cérémonie a eu lieu en tout petit cercle, le 29 septembre 2014. Vos dons à Vivre et Grandir, Association Loi 1901, à but humanitaire, 5, impasse Dupont, 13005 Marseille, aideront à perpétuer son souvenir en finançant des projets de cette association au Burkina Faso, dans les domaines de la santé et de l’éducation. Familles Dreyer-Ledoux et Mangin, Palais Lumière, 13600 La Ciotat. Marseille. Les Familles Magne et Escure, Parents, alliés Et amis, ont la tristesse de faire part du décès de Mme Josette ESCURE, survenu le 2 octobre 2014, à Sète, dans sa quatre-vingt-onzième année. Nous avons la profonde tristesse de faire part du décès de M. Edmond FISCHER, ancien de la brigade Alsace-Lorraine de Malraux, chevalier de la Légion d’honneur, chevalier dans l’ordre des Palmes académiques, croix de guerre, médaille de la Résistance, ingénieur en chef du génie rural retraité, survenu le 29 septembre 2014, dans sa quatre-vingt-dix-septième année. De la part de Jacqueline, son épouse, Ses enfants Et ses petits-enfants. Cet avis tient lieu de faire-part et de remerciements. Jacqueline Fischer, 9, rue d’Ypres, 67000 Strasbourg. Le Rayol (Var). Conférence Brigitte Pauvert-Lozerec’h, son épouse, Dominique, Corinne, Mathias (†), Camille, ses enfants Et ses petits-enfants, ont l’immense chagrin de faire part du décès de Jean-Jacques PAUVERT, survenu le 27 septembre 2014. briloz@numericable.fr (Le Monde du 1er octobre.) Grenoble. Alphonse PEUCHMAUR, 1927-2014, ingénieur AM, EIH, ISF et génie atomique. Homme libre, il est parti dans un espace sans contraintes. La cérémonie aura lieu le mardi 7 octobre, à 14 heures, en la chapelle de l’hôpital de La Tronche, chemin de l’Agnelas (Isère). Donatienne, son épouse, Pascale et Michel, ses enfants. La Direction de l’information légale et administrative organise une conférence débat sur le thème « Les européens aiment-ils (toujours) l’Europe ? », avec Jean-Louis Bourlanges, ancien député européen, Bruno Cautrès, chercheur CNRS au CEVIPOF et enseignant à Sciences po, et Alberto Toscano, journaliste et écrivain italien, président du Club de la presse européenne, le mercredi 15 octobre 2014, à 17 h 30, 29 quai Voltaire, Paris 7e. Réservation obligatoire par courriel : mdf@dila.gouv.fr ou par téléphone : 01 40 58 77 08 - 01 72 69 59 63 Communication diverse Les familles Divandary, Muir, Doutrellot, ont l’immense tristesse de faire part du décès de Mme Jean PHILIPPON, née Christiane GHEERAERT, survenu le 2 octobre 2014, dans sa quatre-vingt-onzième année. La cérémonie religieuse sera célébrée le vendredi 10 octobre, à 14 h 30, en l’église Sainte-Eulalie de Mireval (Hérault). L’inhumation aura lieu dans le caveau de famille, au cimetière de Mireval. Michelle Muir, 114, rue de Verdun, 76230 Bois-Guillaume. Rencontre autour de la rentrée littéraire, dimanche 12 octobre 2014, à partir de 11 heures, en présence des auteurs Philippe Hayat, Mireille Abramovici, Ariane Bois, David Doma, Jean Rouaud, Pierre Assouline, Maryse Wolinski, Frederika Amalia Finkelstein, Hervé Le Corre, Sandrine Treiner, Éric Paradisi. Animée par Eduardo Castillo, journaliste. Entrée libre sur réservation au 01 53 01 17 42 ou sur www.memorialdelashoah.org Agnès et Bruno Toïgo, Pierre et Sylvia Roux-Lasfargeas, ses enfants, Thomas, Camille, Jeanne, Simon et Emma, ses petits-enfants Et toute la famille, ont la tristesse de faire part du décès de Jacqueline ROUX, née SOISSON, survenu le 1 octobre 2014. er Daniel Pszenny, son compagnon Elie Pszenny, son fils, Rodolphe Nussbaum, son frère, Les familles Pszenny, Petit, Nussbaum, Chneiweiss, leurs enfants Et ses nombreux amis, Dans le cadre de son cycle « les mercredis de la Documentation française » Les obsèques religieuses seront célébrées le mercredi 8 octobre, à 10 h 30, en l’église Notre-Dame-de-Lorette, 18 bis, rue de Châteaudun, Paris 9 e , suivies de la crémation, à 13 h 30, au crématorium du cimetière du Père-Lachaise, 71, rue des Rondeaux, Paris 20e. 61, rue des Martyrs, 75009 Paris. Colloque Colloque du Centre Sèvres Facultés jésuites de Paris « Les jésuites aujourd’hui. Deux siècles après leur rétablissement (1814-2014). Aller, rencontrer, servir. » Vendredi 10 octobre 2014, de 19 h 30 à 21 h30, samedi 11 octobre, à partir de 9 heures. Entrée libre. 35 bis, rue de Sèvres, Paris 6e. Tél. : 01 44 39 75 00. www.centresevres.com ont la douleur de faire part du décès de Evelyne NUSSBAUM, « Youyou », survenu à Paris, le 3 octobre 2014, après une longue maladie, à l’âge de soixante-quatre ans. Les obsèques auront lieu le jeudi 9 octobre, à 12 h 45, au crématorium du cimetière du Père-Lachaise, 71, rue des Rondeaux, Paris 20e (métro Gambetta). Ni fleurs ni couronnes. « Ceux qui vivent, ce sont ceux qui luttent, ce sont Ceux dont un dessein ferme emplit l’âme et le front. Ceux qui d’un haut destin gravissent l’âpre cime. Ceux qui marchent pensifs, épris d’un but sublime. » Victor Hugo. Le Carnet Partagez votre réussite Soutenances de thèse, agrégations, grandes écoles, concours nationaux... Cet avis tient lieu de faire-part. !.8=-<- -2=<C=8/ 29 D $.12/ B !* #C-A=2/1< 29 2=C/8<.=C/5 2=C/8</9C 2/ 7@ ,9;7=8@<=.1 @0E5G %H$CPEG '=C/8</9C 29 D $.12/ B5 4/4;C/ 29 2=C/8<.=C/ O533$G D81 A0F$ '=C/8</9C 2/A C-2@8<=.1A K"H/2$ !$10L350 '=C/8<C=8/ 2-7-)9-/ > 7E.C)@1=A@<=.1 2/A C-2@8<=.1A !H81)05G$ ;0D0 '=C/8</9CA @2:.=1<A 2/A C-2@8<=.1A @E+ *H011$H( ,H18E& @$.8H2$1F5$H( '"+53$ =H5$EH '=C/8</9CA -2=<.C=@93 O"H8H& '0EHF05G( ,3851 !H8+701( <C3D5$ A8EPP2811 "-2@8<C=8/ /1 8?/+ D $ %/ 4@)@0=1/ 29 $.12/ B ?8H5$6=5$HH$ @811$301LE$ "-2@8</9C /1 8?/+5 C/A,.1A@;7/ 2/ 7@ C-2@8<=.1 194-C=F9/ :51+$1F !8L0F "-2@8</9CA /1 8?/+ /< 8?/+A 2/ A/C6=8/ '7H5GF0.7$ ,C8& JM1F$H18F50183I( ;7028G 95$&$H J!H81+$I( :5HL515$ ?8351LH$ J#+01025$I( ,EH"35810 ;01$F J'E3FEH$I "-2@8</9CA /1 8?/+ D 2-6/7.,,/4/1< -2=<.C=@7 B KE35$1 @8H0+7$6K0E-$HF J=H04$FGI( :51+$1F O5H$F J%5D$HG5N+8F501G( #D"1$2$1FG( =8HF$18H58FGI (?/+ 2E-2=<=.1 '7H5GF581 ?8GG03 '=C/8</9C @C<=A<=F9/ ,H5G =8.8F7"0&0H0E #?.<.)C@,?=/ >5+038G K52$1$B &1+.)C@,?=/ #H5+ *"B58F $-2=@</9C =8G+83 O83515$H !/8C-<@=C/ )-1-C@7/ 29 )C.9,/ '8F7$H51$ K03C !/8C-<@=C/ )-1-C@7/ 2/ 7@ C-2@8<=.1 '7H5GF51$ @8L$F (.1A/=7 2/ A9C6/=77@18/ =5$HH$ *$HL"( .H"G5&$1F( <"-8GF5$1 '8HL815+0( D5+$6.H"G5&$1F Pour toute information : 01 57 28 28 28 01 57 28 21 36 carnet@mpublicite.fr Tarif : 20 ! TTC Prix à la ligne 18 | culture 0123 MARDI 7 OCTOBRE 2014 «Lucy» Luc Le carton planétaire de «Lucy», qui ressort le 8 octobre en 3D, a rasséréné Luc Besson, après plusieurs flops et déceptions. Le cinéaste et homme d’affaires profite de l’aubaine pour redorer son image PATRICK SWIRC/MODDS POUR « LE MONDE » C’ laurent carpentier est lui qui voulait nous rencontrer. Il est là, 110 kg qu’il aimerait res treindre pour 1,73 m. Une sorte d’Orson Welles en tenue volontairement dé braillée, teeshirt noir, pantalon noir, chaus sures de sport noires, cheveux en bataille. Il est cool. Très cool. Bizarre pour un « mogul ». Cela tranche avec l’inquiétude de ses troupes, avant son arrivée : « Il n’a pas été prévenu pour la photo. Tu sais comment il est. Il voudra choi sir l’endroit. Enfin, c’est lui qui décide… » Il a fi nalement laissé le photographe choisir son cadre… et juste fait venir une maquilleuse pour arranger un peu sa face d’ours maratho nien. Il rassure, de son petit rire d’enfant : « Je ne comprends pas : souvent les gens que je rencontre tremblent de peur devant moi, mais je suis un type normal, je ne suis vraiment que Luc Besson. » Ce n’est que Luc Besson, donc. Ce n’est que la 481e fortune de France en 2014, producteur, réalisateur, scénariste (l’un, ou l’autre, ou les trois combinés). Il débarque de Moscou, où il est allé lancer sa Lucy, le succès planétaire de l’été, produit par EuropaCorp, sa société, dis tribué par Universal (3 700 copies aux Etats Unis, 600 en France, 1 500 en Russie, 4 000 en Chine…). Un film à 40 millions de dollars (32 millions d’euros), qui en comptabilise déjà www.monde-diplomatique.fr OCTOBRE 2014 PROCHE-ORIENT Guerre contre le terrorisme, acte III Par Alain Gresh Chaque mois, avec Le Monde diplomatique, on s’arrête, on réf léchit. Chez votre marchand de journaux, 28 pages, 5,40 € 400 millions au boxoffice. « Dans tous les pays, les compteurs ont explosé… », souritil. De quoi renflouer la maison qui a multiplié ces dernières années les investissements – et les flops. De quoi faire oublier Malavita, Adèle BlancSec, The Lady ou AngelA et reve nir au bon temps où Le Cinquième Elément, Léon, Nikita ou Le Grand Bleu faisaient de lui le fer de lance d’un cinéma français damant le pion à Hollywood. De quoi remonter le cours de l’action en Bourse, en ballottage dé favorable ces derniers temps. De quoi effacer surtout la mauvaise image de marque après qu’un rapport de la Cour des comptes, en dé cembre 2013, a dénoncé la façon dont les de niers publics avaient été investis dans le pro jet de La Cité du cinéma, à SaintDenis (Seine SaintDenis), « qu’une société privée (Europa Corp) portait pour son seul bénéfice ». Délivrer un message politique La vérité, c’est que l’année a été dure et, qui plus est, avec Lucy, Luc Besson s’est fait peur. Tout Luc est dans Lucy. Son patronyme, son savoirfaire – des films rentrededans, à gros moyens, avec effets spéciaux, héroïne hors du commun, coursespoursuites, flingues… – et son désir profond : arriver, à l’image de Ste ven Spielberg (son modèle), à délivrer derrière la comédie d’action un message politique. Or, justement, c’est ce côté Liste de Schindler, Lin coln, sur lequel il a toujours buté. Lui, son message, c’est l’avenir de la planète, l’être con tre l’avoir, ce qu’on laisse à nos enfants… Ce parilà était risqué, le sujet compliqué, il le sa vait. Miracle, on peut juger le résultat bancal, il se révèle un carton. S’il veut nous rencontrer, c’est que Luc Bes son est de retour, et qu’il a compris qu’il est temps de soigner son image. Car, de fait, l’homme est un malaimé. Autodidacte, il n’a pas le langage et les manières d’un monde ci néphilique qui ne lui a jamais pardonné de ne pas jouer selon les règles. La France, c’est le pays des petits budgets, des Cahiers du ci néma, de l’analyse critique. Lui veut grand, il rêve d’action, de films qui pétaradent, qui se donnent les moyens de le faire. Son rêve, c’est Hollywood. Du coup, il fait des films made in « SI DANS LE CINÉMA FRANÇAIS LES GENS SONT AMERS VIS-À-VIS DE LUI, CE N’EST PAS À CAUSE DE SES FILMS, MAIS POUR QUELQUE CHOSE DE PLUS LARGE. ON LUI EN VEUT DE CE QU’IL A CONSTRUIT » ÉRIC ROCHANT Réalisateur France, mais à gros budget, mélangeant ac teurs français et stars américaines, tournant parfois en français, parfois en anglais, rache tant un distributeur aux EtatsUnis, vivant avec ses enfants entre Los Angeles et Paris. Besson l’Américain (« citoyen du monde, plu tôt »). Selfmademan aux rêves de gamin qui mettra tous ses talents d’homme d’affaires à leur service. « Il y a quelques années, j’étais avec une demoiselle qui s’appelait Milla [Milla Jovovich, héroïne du Cinquième Elément et de Jeanne d’Arc, fut sa compagne pendant quel ques années]. Elle était jeune. On regardait des oiseaux et j’ai vu qu’elle était en train de pleu rer. Je lui ai demandé pourquoi ? Elle m’a dit parce que je ne volerai jamais. Et moi aussi je me suis mis à pleurer, parce que cela m’a ren voyé à mes rêves d’enfant. Quand on est petit, on dit : “Je serai cosmonaute” ; adolescent, on dit : “Je serai peutêtre cosmonaute” ; et, de venu adulte, on dit : “Quand j’étais jeune, j’étais con, je voulais être cosmonaute.” C’est terrible. Moi, si j’avais vraiment eu le choix, j’aurais aimé être un dauphin. » Une méfiance indicible Il n’a pas eu ce choixlà, alors il est devenu ci néaste. Luc Besson a 17 ans lorsqu’il entre comme stagiaire sur un tournage, quitte l’école à deux mois du bac et décide que ce sera sa vie. Il veut voir Hollywood, prend un billet pour New York et traverse l’Amérique en cars Greyhound pour rallier Los Angeles. « Six jours ! Je croyais que c’était plus près. J’étais mauvais en géographie », ditil. L’histoire est connue, parce qu’au fil des années le selfma deman a barricadé son intimité derrière une histoire officielle, pour se fabriquer un per sonnage de Petit Prince innocent et artiste. Une enfance heureuse sur les rives de la grande bleue, en Grèce et en Yougoslavie, avec des parents profs de plongée au Club Med… Un mérou et une murène pour camarades de jeu… Au retour en France, une adolescence grise et solitaire, lors de laquelle il se met à écrire tous ces scénarios qu’il recrachera plus tard… Ce qu’il ne dit pas, ou très peu, c’est que ses parents se sont séparés et ont chacun re fondé une famille. Lui, le fils unique de cette culture | 19 0123 MARDI 7 OCTOBRE 2014 Les performances des principaux films de Luc Besson depuis « Le Cinquième Elément » RECETTES MONDIALES, EN MILLIONS DE DOLLARS 264 67 LE CINQUIÈME ÉLÉMENT JEANNE D’ARC 113 10 ANGEL-A ARTHUR ET LES MINIMOYS 51 ARTHUR 2 34 31 3 ARTHUR 3 THE LADY 57 MALAVITA LES AVENTURES EXTRAORDINAIRES D'ADÈLE BLANC-SEC 1997 LES DATES 1959 Naissance le 18 mars à Paris. 1983 Premier long-métrage Le Dernier Combat, distingué au Festival d’Avoriaz. 1988 A Cannes Présente Le Grand Bleu. 2000 Crée EuropaCorp. 2012 Inauguration des studios de La Cité du cinéma à Saint-Denis. 2013 Premier multiplexe à Tremblay-en-France (Seine-Saint-Denis). 2014 Création de RED (Relativity EuropaCorp Distribution), une société de distribution de films aux Etats-Unis. union, a été mis en pension, près de Coulom miers. « C’est pas très habile », ditil, avachi au fond du grand fauteuil club. « Je ne leur en veux pas, c’était compliqué pour eux… » Le regard est tendre, la voix est douce, le geste accueillant. Mais en permanence filtre de ses yeux un rayon de méfiance indicible. L’homme ne se laisse pas déchiffrer. Il a tôt appris à se défendre contre les désillusions et les faux amis. Derrière sa cool attitude – il ne boit jamais, ne fume pas –, il y a la nécessité enfouie de garder le contrôle. « Il suffit de compter le nombre de films pour savoir le nombre de verres de champagne qu’il a bus dans sa vie », se marre le compositeur Eric Serra, qui a signé la musique de son premier courtmétrage, L’AvantDernier, et de tous ses autres films depuis. Les deux hommes sont amis depuis qu’ils ont 18 ans, le genre à partir en vacances ensemble (« même si Luc est un tel fondu de boulot qu’avec lui, le terme de “va cances” est parfois un peu abstrait… »), mais jamais, au grand jamais, ils n’ont franchi le degré de cette intimitélà, celle des ressorts profonds qui vous structurent. Il a beau vouloir jouer le jeu, essayer de lâ cher prise, montrant sur son smartphone une photo de son beau gosse de père posant en M. Muscle en « une » d’un magazine spécia lisé des années 1960, Luc Besson n’arrive pas à 1999 sortir du cadre, à tenter l’introspection. Ce n’est pas qu’il ne veut pas, il ne peut pas. « Luc te racontera volontiers en long et en large que, ce weekend, il a fait du kart, mais jamais il ne te confiera sa vie sentimentale », témoigne un (ancien) proche. Amours, séparations – avec Anne Parillaud, l’héroïne de Nikita, Maïwen, qu’il épousa lors qu’elle avait 16 ans, Milla Jovovich… –, sa vie avec Virginie Silla, sa femme actuelle et pro ductrice, ce sont les magazines people qui en parlent, pas lui. L’enfant qui voulait avoir dix enfants en a déjà cinq n’est un habitué ni du confessionnal ni des divans des psys : « Quand je déprime, j’ai plutôt tendance à m’isoler », avouetil sobrement. Même si ses amis reçoivent parfois un MMS le montrant barbotant aux Bahamas, à Little Norman’s Cay, un îlot qu’il a acheté (« Un vieux rêve. Il n’y a rien làbas, pour l’instant. C’est pour ma retraite… », souritil), l’homme est un monstre de travail. Tous en témoi gnent avec effarement. « A 5 heures du matin, raconte l’ingénieur du son Martin Boissau, alors qu’épuisés on finissait de mixer Arthur et les Minimoys dans son domaine normand du château des Lettiers, dans l’Orne, lui s’en allait à l’auditorium mixer le film qu’il avait promis à Villepin pour soutenir la candidature de Paris aux Jeux olympiques ! » « Aujourd’hui, Luc est cent fois plus riche que moi, cela doit avoir un rapport… », risque, rigolard, Eric Serra. Intelligence des réseaux Luc Besson fonctionne à l’intuition. On lui prête du flair ; on lui sait un faible pour l’aven ture, une intelligence des réseaux et une habi leté autocratique à prendre une route bien à lui. « Il est incroyable. Il a toujours eu le goût du business et des solutions rocambolesques, ra conte un vieux de la vieille qui a travaillé avec lui du temps du Grand Bleu et du Cinquième Elément. Avec Bernard Grenet, son directeur de production à l’époque, ils avaient imaginé fa briquer des “talkies” ou monter une boîte de coursiers pour éviter de les louer. Ils auraient ensuite monnayé leurs services aux autres pro ductions. Finalement, ils ne l’ont pas fait. Mais il a pris des parts dans les laboratoires Eclair, il monte des studios… Il a toujours voulu maîtri ser toute la chaîne de production. » Un joueur. De ceux qui montent des empi res. « Ce qui m’intéresse, c’est toujours le coup 2005 2006 « ON A EN COMMUN L’AMOUR DES OCÉANS, UNE CERTAINE INQUIÉTUDE POUR L’AVENIR DU MONDE ET UN REGARD CRITIQUE SUR LA CRISE DE SENS QUE TRAVERSE NOTRE ÉPOQUE » L’enquête sur La Cité du cinéma se poursuit NICOLAS HULOT écologiste L’inauguration de La Cité du cinéma, « Cinecittà 9-3 », son projet fou d’installer Hollywood en bord de Seine, maintes fois reportée après le désengagement des premiers investisseurs, a eu lieu le 21 septembre 2012. Mais, fin 2013, le parquet de Paris ouvrait deux enquêtes préliminaires. La première vise « les conditions de financement de la construction et du fonctionnement » de La Cité. La seconde, ouverte pour « diffusion de fausses informations », concerne EuropaCorp, dont Besson préside le conseil d’administration, et relève du délit boursier. La Cour des comptes avait dénoncé le « financement public [de La Cité] décidé contre l’avis des services de l’Etat et de la Caisse des dépôts et consignations, principal financeur ». L’argent aurait été mis dans le seul but de faire aboutir le projet « qu’une société privée [EuropaCorp] portait pour son seul bénéfice ». Des proches de Nicolas Sarkozy, Claude Guéant – ex-secrétaire général de l’Elysée – et Christophe Lambert, directeur d’EuropaCorp, ont joué un rôle-clé dans l’affaire. 2009 2010 2011 Le paradoxe Besson Il est homme d’affaires. Dans les conflits, le « nounours » se révèle griffu. Et, sur un tour nage, il peut vite se transformer en despote. Tout pour le film. « Physiquement imposant, il fout un peu les jetons… » « Il peut humilier les gens de façon terrible, les accessoiristes, sur tout. Parce qu’en général il s’énerve pour une vraie raison, un truc qui ne marche pas, mais ça rend vite la tension insupportable… » « Son di recteur de la photographie, Thierry Arbogast, on l’avait surnommé “Mère Courage”. » « C’est un gentil tyran, mais un tyran aux humeurs in transigeantes… » Techniciens unanimes. Et anonymes : l’homme est puissant et sa ran cune tenace. Règles de base : se soumettre et rester dispo nible. Un ancien raconte ainsi comment, après les années qu’ils avaient passées ensem ble, il avait pensé « bêtement » qu’il pouvait parler « d’égal à égal » avec « Luc », lui annon çant en confiance qu’il ne pourrait pas faire le prochain projet parce qu’il avait accepté un autre tournage. Besson n’avait rien dit, mais, alors qu’il ne restait que quelques jours avant la fin du film, la directrice de production lui avait signifié dès le lendemain qu’il était rem placé sine die… « Il gère les relations profes sionnelles comme dans la cour de récré : tu n’es plus dans ma bande, tu te casses… », soupire le désormais banni. « Avec moi, il est adorable », s’agace le réali sateur Eric Rochant (Un monde sans pitié, Mœbius…), qui débute ces joursci à La Cité du cinéma le tournage du « Bureau des légen des », une série télévisée. « On peut aussi dire de moi que je suis dur, méchant, caractériel… De Pialat à Kechiche, le cinéma est plein de réa lisateurs qui se traînent de sales réputations. La seule différence entre nous, c’est que lui est très exposé. Si dans le cinéma français les gens sont amers visàvis de lui, ce n’est pas à cause de ses films, mais pour quelque chose de plus large. On lui en veut de ce qu’il a construit. » Martin Boissau aussi a fini par tomber en disgrâce. L’ingénieur du son garde pourtant la nostalgie de ces annéeslà. « Je me rappelle et remise du Prix France Musique-Sacem de la musique de film Vendredi 10 octobre à 20h, salle Pleyel (Paris 8) Réservations : 01 56 40 15 16 - concerts.radiofrance.fr LUCY 2014 d’après », répond Luc Besson lorsqu’on l’inter roge sur le succès de son dernier film et la sa tisfaction qu’il saurait en tirer. Les Chinois veulent sortir Lucy en 3D alors que le film n’a pas été fait pour ça ? Il demande un petit bout d’essai et les laisse faire pour 4 000 copies. Et puis, comme il ne s’agit pas de s’endormir sur ses lauriers et ses déjà 5 millions d’entrées en France, il décide de « ressortir » le film ici aussi en 3D, le 8 octobre. « Le nerf de la guerre, ce n’est pas l’argent, martèletil comme un slogan, ce sont les idées. » Il ne regarde jamais de séries ? Il en a néanmoins confié la production à une équipe au sein du groupe. Il croise Mathias Malzieu, le petit démon du groupe de rock Dionysos, sur un plateau de Canal+ ? Séduit par cette boule d’énergie dont il découvre l’existence, il décide ni une ni deux de produire le film que ce dernier a en projet. Ça marche ou pas, peu importe, il donne sa chance. A des nouveaux venus, à des techniciens, à des chefs opéra teurs, comme Louis Leterrier ou Olivier Mega ton. Par audace, vanteront ses amis ; par cal cul, diront ses ennemis, parce que ceuxlà coûtent moins cher. Concert des musiques de films de Roman Polanski Avec l’Orchestre Philharmonique de Radio France + de 400 2013 SOURCE JP'S BOX OFFICE quand je suis arrivé pour la première fois dans les locaux d’EuropaCorp. A l’époque, c’était rue du FaubourgSaintHonoré, pas loin de l’Ely sée : un hôtel particulier, la Maserati garée dans la cour… J’avais l’impression de débarquer à Hollywood. Il faut le dire, c’était excitant. Les Minimoys, c’était le plus gros budget du ci néma français de cette annéelà. J’étais payé 40 % de plus que sur les autres tournages où j’avais travaillé. On aime ou on n’aime pas, mais moi qui ai surtout travaillé dans le ci néma d’auteur, j’y ai appris beaucoup. » « Un mauvais procès » Le paradoxe Besson. Ni blanc ni noir. Sans pri ses auxquelles vous accrocher. Si vous n’êtes pas sur un plateau ou dans une négociation serrée avec lui, son corps se détend, il reprend des forces, ses traits s’apaisent, il vous raconte les derniers films qu’il a vu avec ses enfants (Les Tortues Ninja et Les Gardiens de la Galaxie – « personne ne me reconnaît dans les salles, je suis passé maître dans cet artlà… »), et ses in quiétudes pour la planète. « Je ne le connais sais pas, raconte Nicolas Hulot. Un jour, il ap pelle : “Si tu as besoin d’un soldat, je suis là.” Alors, lorsque j’ai lancé le Pacte écologique et que je cherchais du soutien, je lui ai laissé un message. On a toujours des clichés et des préju gés : je ne pensais pas qu’il viendrait. Erreur : il était au premier rang à la conférence de presse. Depuis, à chaque fois que j’ai besoin d’un relais, d’un coup de main, d’une comédienne pour un clip, il est là. C’est un homme de parole. J’ai beaucoup d’estime pour ce garçon. » La séparation douloureuse des parents, la jeunesse solitaire, un appareil photo qui sert de révélateur, la rencontre d’un succès popu laire qui les fige tous deux dans une image d’icône alors qu’ils sont d’une pudeur mala dive, et la tribu pour se protéger : entre les deux hommes, une identité de parcours. « On a surtout en commun l’amour des océans, une certaine inquiétude pour l’avenir du monde et un regard critique sur la crise de sens que tra verse notre époque », rectifie Nicolas Hulot. Au journaliste qui l’interroge, Luc Besson si gnifie qu’il lui fait confiance. Il ne demande pas à relire, comme c’est souvent le cas. « Vous en ferez ce que vous voulez. » Mais quelque chose dans le regard dit : « Ne me décevez pas. » L’ogre dit se moquer de la critique comme de son premier sweatshirt à capuche. Les attaques sur La Cité du cinéma ? « Un mauvais procès. Je ne suis absolument au cou rant de rien concernant un rapport de la Cour des comptes. Moi, personne ne m’a contacté.» Les critiques de cinéma qui l’ont si peu en censé ? « Avant, il y avait Pierre Tchernia, c’était bien… » Pourquoi alors, s’il a le cuir si dur qu’on le dit, ce sentiment de tristesse qui vous enveloppe au fil des méandres de La Cité du ci néma – bureaux, plateaux modulables pour équipes de scénaristes, ateliers pour les dé cors, studios pour les tournages, cafés pour les égarés et une nef immense et vide que l’on cherche à rentabiliser en la louant à des gran des entreprises pour des événements – le long desquels il vous raccompagne ? « J’ai d’abord fait du cinéma pour ne pas disparaître. Après est venue la notion de plaisir. Aujourd’hui j’ai vieilli, et je filme, je crois, pour transmettre quelque chose, comme Lucy. » Sans doute. Jus qu’au coup suivant. p en direct sur 20 | culture 0123 MARDI 7 OCTOBRE 2014 Grincementsentre le « Philhar» et RadioFrance Après l’annulation du concert de la Salle Pleyel, le 3 octobre, un nouveau préavis de grève a été déposé L DEUX ORCHESTRES L’ONF et le « Philhar » Les deux orchestres de Radio France sont l’Orchestre national de France (ONF) et l’Orchestre philharmonique de Radio France – le « Philhar », au cœur du mouvement social actuel. A partir du 14 novembre, ils seront dotés d’un nouvel auditorium, au siège de Radio France, à la Maison de la radio, à Paris. Un nouveau directeur, Jean-Pierre Rousseau Ancien directeur général de l’Orchestre philharmonique de Liège (Belgique), Jean-Pierre Rousseau, 58 ans, a été nommé, en mai, directeur de la musique de Radio France par son PDG, Mathieu Gallet, remplaçant Jean-Pierre Le Pavec. COLCANOPA mais dénoncent l’absence de con certation et la brutalité de la mé thode. « A Radio France, on est à deux doigts de la crise de nerfs », s’in quiète JeanPaul Quennesson, dé légué SUD de Radio France et cor niste à l’ONF. « Mathieu Gallet a installé une désorganisation com plète. En face de cette réforme, il n’avance aucun projet artistique, éditorial, ni social. » A un mois de l’ouverture du nouvel auditorium de Radio France à la Maison de la radio, le 14 novembre, la programmation et le répertoire pour les concerts d’ouverture ne sont toujours pas arrêtés. On ne sait pas encore si l’ONF va rejoindre, ou pas, le mouvement des musiciens du « Philhar ». Pour JeanPierre Odasso, trom pettiste au sein de l’Orchestre philharmonique et représentant non syndiqué des musiciens, il y a urgence à déminer le terrain. « L’idée générale de la réforme, ou ce que l’on croit deviner, est d’instaurer une direction artisti que unique pour les deux orches tres, qui serait pilotée par Jean Pierre Rousseau. Or, chaque or chestre a besoin d’une équipe spé cifique. Les projets se planifient au moins deux ans à l’avance, les aléas de dernière minute nécessi tent d’avoir un directeur artistique à temps plein, doté d’un carnet d’adresses à la hauteur des en jeux. Les projets pédagogiques de mandent aussi du temps et de l’énergie. On est inquiets pour la saison 20152016, qui n’est pas en PHOTO GRAPHIE Fréquentation en baisse aux Rencontres d’Arles du 30 sept au 11 oct de Witold GombroWicz mise en scène Jacques Vincey Les Rencontres photographi ques d’Arles ont attiré 83 000 personnes pour l’édi tion 2014, soit une fréquenta tion en baisse de 12,5 % par rapport à 2013, ont annoncé, vendredi 3 octobre, les orga nisateurs. du festival Cette baisse est attribuée par la di rection aux « turbulences su bies par les Rencontres d’Arles depuis plusieurs mois », aux « menaces de grève qui ont pesé sur les festivals » en rai son du conflit des intermit tents et à « l’absence d’une partie des lieux d’exposition mis à leur disposition depuis douze ans ». Le festival avait connu, en 2013, année de son trentième anniversaire, une fréquentation record avec 96 000 visiteurs, en hausse de 28 % par rapport à l’année précédente. – (AFP.) M US I Q U E Concert de stars en l’honneur des vétérans, à Washington Un concert géant et gratuit avec des dizaines de stars tels Bruce Springsteen, Eminem, Rihanna aura lieu le 11 no vembre à Washington, en l’honneur des vétérans. Le « Concert of Valor » (le « con cert en l’honneur des valeu reux ») se tiendra sur le Mall, l’immense esplanade au cœur de la capitale améri caine. Le but de la manifesta tion est de récolter des fonds pour les 20 millions de vété rans américains. – (AFP.) Le mouvement de protestation est lié aux réformes en cours, menées, de l’avis général, au pas de charge ARTS Une sculpture de Giacometti vedette des enchères d’automne chez Sotheby’s Chariot, une sculpture d’Al berto Giacometti estimée à plus de 100 millions de dol lars (80 millions d’euros), de vrait être la vedette des en chères d’automne chez Sotheby’s à New York en no vembre, a annoncé, vendredi 3 octobre, la maison d’enchè res. Ce bronze, conçu en 1950 et moulé en 19511952, qui re présente une déesse filiforme debout sur un char aux très grandes roues, est l’un des deux seuls appartenant en core à des particuliers. Le prix estimé est comparable au re cord mondial pour une sculp ture aux enchères : L’Homme qui marche I, de Giacometti, adjugé, en 2010, 104,3 mil lions de dollars chez Sothe by’s, à Londres. – (AFP.) Le prix Orisha décerné au Béninois Kifouli Dossou Le prix Orisha pour l’art con temporain africain a été attri bué pour sa première édition au sculpteur béninois Kifouli Dossou, pour l’ensemble de son œuvre, ont annoncé, vendredi 3 octobre, les orga nisateurs. Ce prix récom pense « un artiste emblémati que de la scène africaine subsaharienne ». Le jury a choisi le lauréat « pour son art d’allier les représentations guélédé aux éléments de la culture visuelle contempo raine ». – (AFP.) core validée dans son ensemble. » Car, entretemps, l’Orchestre philharmonique a été « déca pité », selon M. Odasso. Eric Mon talbetti, son directeur artistique depuis dixhuit ans, a dû accepter la rupture de son contrat à la mi septembre, et il n’a pas été rem placé. Son départ a créé un vif émoi. Sous sa direction, l’Orches tre philharmonique est devenu une scène majeure (plus attrac tive que l’Orchestre national, di sent certains), attirant les plus grands chefs, et fidélisant de jeu nes recrues. C’est Montalbetti qui a fait venir le nouveau directeur musical du « Philhar », le Finlan dais Mikko Franck, 35 ans, qui remplacera officiellement l’actuel chef MyungWhun Chung, en septembre 2015. C D Déminer le terrain Radio France comprend trois for mations musicales permanentes – l’Orchestre national de France (ONF), l’Orchestre philharmoni que et le Chœur, auxquels s’ajoute la Maîtrise (chœur des enfants). Chacun des deux orchestres dis pose d’une équipe spécifique, avec son propre directeur artisti que, qui construit la saison avec le directeur musical (le chef de l’or chestre). Or, la direction de Radio France souhaite créer une direction uni que pour les deux orchestres et réaliser des économies d’échelle – la fusion des deux orchestres, re doutée en interne, ne serait pas à l’ordre du jour, se défend la direc tion. Dans un contexte de budget serré, les musiciens se disent prêts à envisager une réforme, LE CONTEXTE S É L E C T I O N a colère est unanime chez les musiciens de l’Orches tre philharmonique de Radio France : vendredi 3 octobre, le concert unique, prévu Salle Pleyel, à Paris, en hom mage au compositeur vénitien Luigi Nono (19241990), a été an nulé à la suite du préavis déposé par les syndicats SUD, CGT et UNSA. Evénement du Festival d’automne, ce concert était très attendu : cela fait plus de dix ans que la musique de Luigi Nono, compositeur avantgardiste, en gagé, n’avait pas trouvé le chemin des salles parisiennes. Les musiciens du « Philhar » ont voulu taper du poing sur la ta ble. Et un nouveau préavis de grève est déposé pour le vendredi 10 octobre. Le mouvement de pro testation est lié aux réformes en cours, menées de l’avis général au pas de charge par le nouveau di recteur de la musique, JeanPierre Rousseau, nommé par le prési dent de Radio France, Mathieu Gallet. M. Rousseau a d’ailleurs admis, dans Le Figaro du 3 octo bre, avoir « voulu réformer trop vite ». Mais, pour signifier son profond désaccord avec la direction, Mikko Franck a suspendu deux contrats qui le lient pour la saison 2014 2015 – il doit diriger six concerts. Il a refusé de diriger celui du 3 octo bre, s’en expliquant dans un com muniqué : « Il est difficile de com prendre comment deux grands or chestres symphoniques pourraient être gérés par une administration unique (…). La réorganisation ad ministrative des orchestres ne rem plit pas les conditions de mon con trat de directeur musical », écritil. Il prévient : « Je ne signerai pas d’autres contrats tant que la situa tion ne sera pas résolue », tout en soulignant avoir eu « des échan ges longs et positifs » avec Mathieu Gallet. p clarisse fabre TS AR TEH-YUN Chine : Tsar Teh-yun, maître du qin Aquatique ou aérienne, mysté rieuse et minimaliste, la musique que l’on entend dans ce double al bum publié par le Musée d’ethno graphie de Genève procure une dé licieuse sensation d’apesanteur. Raffinées, élégantes, ce sont les mélodies du qin, cithare à sept cordes, emblème de la Chine des lettrés, au même titre que la poésie ou la calligraphie. Un instrument sérieusement malmené, voire muselé, pendant la Révolution culturelle (19661976), où les seules musiques tolérées étaient celles servant de support à la propagande maoïste. Tsar Tehyun (19052007), née dans l’est de la Chine, s’est consacrée d’abord à la calligraphie, puis à la poésie, avant de se mettre au qin, qu’elle a enseigné à partir des années 1960 à Hongkong. La plupart des enregistrements réédités dans ce double album ont été réalisés entre 1956 et 1989 par ses élèves. p patrick labesse 2 CD VDE-Gallo/DOM. M A R I A N N E FAITHFULL Give My Love to London Marianne Faithfull tombe parfois, se casse la cheville, s’empiège dans des plâtres, et cite Shakespeare de sa voix grave. La cheville, ce fut pour l’excel lent Before the Poison en 2004 ; la hanche, ce fut cet été, pendant des vacances sur l’île de Rhodes après un entretien donné au magazine Mojo, où Faithfull met les points sur les « i » concernant la mort par overdose de Jim Morrison. Marianne Faithfull est une figure essentielle du rock, et elle pu blie son vingtième album, Give My Love to London, un hom mage à Londres, qu’elle n’aime pas. L’opus s’ouvre sur des mo dèles d’énergie, du grand art : le premier titre écrit avec Steve Earle est très proche de Bob Dylan et traite sur un mode folk des émeutes londoniennes de 2011 ; le deuxième, Sparrows Will Sing, sans bavure, signé de Roger Waters, ramène le Velvet Un derground au royaume des vivants. Produit par Rob Ellis et Di mitri Tikovoi, mixé par Flood, l’album a attiré dans ses phares Adrian Utley (Portishead), Brian Eno, etc. La voix est claire, le propos droit, Faithfull est une reine. p véronique mortaigne 1 CD Naïve K Lire les 5 CD de la semaine sur Lemonde.fr télévisions | 21 0123 MARDI 7 OCTOBRE 2014 Industriedutabac:lagrandemanipulation Une enquête sur les liens qui unissent les cigarettiers et le pouvoir politique européen FRANCE – 1970 – 110 MIN. Les lobbyistes de l’industrie Les mémos du cigarettier mon trent que la plupart des amende ments destinés à affaiblir la direc tive européenne sur le tabac ont été rédigés, à la virgule près, par les lobbyistes de l’industrie. Parmi les eurodéputés adeptes du co piercoller, Gaston Franco (UMP) et JeanPierre Audy (UMP) dont les prestations, face à la caméra de Laurent Richard, constituent un spectaculaire désastre. Le premier reconnaît sans am bages avoir repris intégralement à son compte 16 des 18 propositions d’amendement, que lui ont sou mis les lobbyistes de Philip Mor ris. «Seize sur dixhuit, cela mon tre que nous avons quand même une marge d’appréciation, répond paisiblement M. Franco. J’ai l’im Ce film décrit la rencontre, dans un village du Sud-Ouest, entre une institutrice solitaire et le boucher local, alors qu’une série de meurtres ensanglante la région. La jeune femme soupçonne son ami d’être l’auteur des crimes. Le Boucher mêle un naturalisme d’une précision cruelle à une dimension fantastique sourde et subtile. L’une des réussites les plus incontestables de Claude Chabrol. PARIS PREMIÈRE – 22 H 25. TÉLÉFILM & SÉRIE « Homeland » (saison 4) série d’Alex Gansa et Howard Gordon, avec Claire Danes, Mandy Patinkin, Rupert Friend. ETATS-UNIS – 2014 – 1 ET 2/12 × 52 MIN. Après une saison 3 souvent critiquée, les créateurs de «Homeland» promettent une suite plus politique, l’agent de la CIA, Carrie Mathison, décidant de repartir au Pakistan. Le fil de l’histoire reprend six mois après la fin de la saison 3, alors que son ancien protecteur au sein de la maison, Saul Berenson, a été mis en retraite forcée. J. FISCUS/SHOWTIME Première cause de mortalité évitable dans le monde, le tabagisme tue quelque 700 000 Européens chaque année. JOEL SAGET/AFP pression d’être mieux informé, pré cisetil, quand un lobbyiste sort de mon bureau. » S’indignetil d’avoir été fiché? Pas le moins du monde. «N’importe quel commer cial a un fichier client, répondil à Laurent Richard. Et dans cette affaire, le client c’est moi.» Audelà de l’attitude de tel ou tel parlementaire, le film met égale ment au jour – c’est probable ment l’information la plus per turbante du documentaire – les relations financières nouées de longue date entre les quatre géants du tabac et la Commission européenne qui, selon le docu mentaire, reçoit plusieurs dizai nes de millions d’euros par an, au titre d’accords contractuels pas sés avec Philip Morris et consorts, dont les détails ne sont pas publics. Le film éclaire aussi l’épisode du « Dalligate » – le limogeage par l’ancien président de la Commis sion, JoséManuel Barroso, en octobre 2012, de John Dalli, le commissaire européen à la santé MOTS CROISÉS N°14-237 SOLUTION DU N°14-236 La caméra capte impitoyablement les regards fuyants, les fronts en nage, les sourires crispés, les dénégations maladroites des consommateurs. M. Dalli avait été accusé d’avoir tenté de monnayer ses bonnes grâces auprès de l’industrie du tabac. Mais les documents internes de Philip Morris cités dans le film montrent au contraire que le ciga rettier, selon les termes de ses propres mémos, entendait en 2012 « cibler le commissaire européen à la santé», et ce «en uti lisant les médias locaux et interna tionaux». D’autres mémos inter nes du cigarettier n’excluent pas de «mettre en œuvre des mesures extrêmes dissimulées» pour lutter contre la directive honnie. Dans une fuite éperdue L’«affaire John Dalli» est d’autant plus dérangeante que l’essentiel des accusations portées contre l’intéressé sont tombées d’elles mêmes alors que, dans le même temps, des membres du cabinet de M. Barroso ont eu, au cours de cette période, plusieurs réunions non déclarées avec les lobbyis tes des cigarettiers. On pourrait faire aux auteurs le grief de manier l’insinuation, mais la possibilité est toujours laissée aux mis en cause de répon dre. Parfois sans succès. N’ayant pas réussi à obtenir un rendez vous avec M. Barroso, Elise Lucet le poursuit littéralement à la sor tie du Parlement de Strasbourg. Lui est lancé dans une fuite éper due, refuse de répondre, s’enferre dans le silence. Pour l’image de l’ancien président de la Commis sion, la scène est dévastatrice. Lorsqu’ils sont acceptés, certains faceàface tournent au jeu de massacre. La caméra capte impitoyablement les regards fuyants, les fronts en nage, les sourires crispés, les dénégations maladroites. Le porteparole de Philip Morris et le directeur géné ral de l’Office européen de lutte antifraude (OLAF) n’y échappent pas. Même l’ancienne déontolo gue de l’Assemblée nationale, Noëlle Lenoir, se retrouve prise au piège de ses contradictions et de ses conflits d’intérêts. Le film n’est cependant pas d’une irrémédiable noirceur. On y voit aussi des parlementaires sou cieux de l’intérêt général soutenir des adversaires politiques atta qués par les cigarettiers. De même, l’actuelle ministre de la santé, Marisol Touraine, se sort avec honneur de l’exercice et, signe que la caméra n’a pas menti, elle vient de présenter un plan antitabac des plus ambitieux. p stéphane foucart D O CU M E N TA I R E DR « Des patrons et des hommes » de Jean-Michel Meurice, Benoît Collombat et David Servenay. FRANCE – 2014 – 70 MIN ET 94 MIN. Du capitalisme paternaliste au néolibéralisme, sont retracés soixante ans d’histoire du patronat français, éclairée par celle de la mondialisation et de la montée en puissance de l’économie de marché. Où comment l’argent a remplacé l’homme et l’outil de travail au cœur de l’entreprise. ARTE – 20 H 50. du « Monde » SA Durée de la société : 99 ans à compter du 15 décembre 2000. Capital social : 94.610.348,70 ¤. Actionnaire principal : Le Monde Libre (SCS). Rédaction 80, boulevard Auguste-Blanqui, 75707 Paris Cedex 13 Tél. : 01-57-28-20-00 Abonnements par téléphone : de France 32-89 (0,34 ¤ TTC/min) ; de l’étranger : (33) 1-76-26-32-89 ; par courrier électronique : abojournalpapier@lemonde.fr. Tarif 1 an : France métropolitaine : 399 ¤ Courrier des lecteurs blog : http://mediateur.blog.lemonde.fr/ ; Par courrier électronique : courrier-des-lecteurs@lemonde.fr Médiateur : mediateur@lemonde.fr Internet : site d’information : www.lemonde.fr ; Finances : http://finance.lemonde.fr ; Emploi : www.talents.fr/ Immobilier : http://immo.lemonde.fr Documentation : http ://archives.lemonde.fr Collection : Le Monde sur CD-ROM : CEDROM-SNI 01-44-82-66-40 Le Monde sur microfilms : 03-88-04-28-60 La reproduction de tout article est interdite sans l’accord de l’administration. Commission paritaire des publications et agences de presse n° 0717 C 81975 ISSN 0395-2037 0123 Les Unes du Monde RETROUVEZ L’INTÉGRALITÉ DES « UNES » DU MONDE ET RECEVEZ CELLE DE VOTRE CHOIX ENCADRÉE CANAL+ SÉRIES – 20 H 50 (DÈS LE 5 OCTOBRE SUR SHOWTIME). 0123 est édité par la Société éditrice SUDOKU N°14-237 www.lemond 65 e Année Encyclopéd ie Universalis e.fr - N˚19904 - 1,30 ¤ France métropolitaine L’investiture de Barack Nouvelle édition Tome 2-Histoire --- Jeudi 22 janvier Uniquement 2009 Fondateur Premières mesures Le nouveau président américain a demandé la suspension : Hubert Beuve-Méry En plus du « en France - Directeur Monde » métropolitaine : Eric Fottorino Obama des audiences à Guantanam o Présidente : Corinne Mrejen PRINTED IN FRANCE Barack et Michelle Obama, à pied sur Pennsylvania Avenue, mardi 20 janvier, se dirigent montré. Une vers la Maison evant la foule nouvelle génération Blanche. DOUG tallée à la tête s’est insqui ait jamais la plus considérable MILLS/POOL/REUTERS a Les carnets transformationde l’Amérique. Une ère d’une chanteuse. national de été réunie sur le Mall de Angélique a Washington, Des rives du commencé. Kidjo, née au Obama a prononcé, a Le grand Barack lantique, Pacifique à jour. Les cérémonies celles de l’At- aux Etats-Unis pendant Bénin, a chanté discours d’investituremardi 20 janvier, toute l’Amérique la liesse ; les la campagne de Barack Obama ; ambitions d’un presque modeste.un sur le moment s’est arrêtée a Feuille force d’invoquer en 2008, la première rassembleur qu’elle était pendant les A vivre : décision de ; n’est jamaisde route. « La grandeur Abraham en train de festivités de et de nouveau administration: Martin Luther l’accession la nouvelle Lincoln, un l’investiture, au poste du 18 au dant en chef Avec espoir et dû. Elle doit se mériter. avait lui même King ou John Kennedy, pendant cent la suspension des armées, de comman- raconte 20 janvier. Pour Le Monde, (…) vertu, il placé la barre responsable vingt : les cérémonies, elle de plus les courants bravons une fois discours ne très haut. Le l’arme nucléaire, d’un de Guantanamo. jours des audiences passera probablement les rencontres jeune sénateur de – elle a croisé l’actrice glacials et endurons cain-américain Pages 6-7 les tempêtes à postérité, mais afri- le chanteur page 2 et l’éditorial de 47 ans. Lauren venir. » Traduction il fera date pour pas à la Harry Belafonte… Bacall, du discours ce qu’il a inaugural du e intégrale miste Alan Greenspan. Lire la suite et l’écono- a It’s the economy... des Etats-Unis. 44 président page 6 la Il faudra à la velle équipe taraude : qu’est-ce Une question nou- a Bourbier Page 18 beaucoup d’imagination Corine Lesnes pour sortir de que cet événement va changer pour irakien. Barack a promis de l’Afrique ? Page Obama et économiquela tourmente financière retirer toutes 3 qui secoue la de combat américaines les troupes Breakingviews planète. page 13 d’Irak d’ici à mai 2010. Trop rapide, estiment les hauts gradés de l’armée. WASHINGTON CORRESPONDANTE D Education L’avenir de Xavier Darcos UK price £ 1,40 D FILM « Le Boucher » de Claude Chabrol, avec Stéphane Audran, Jean Yanne, Antonio Passalia. FRANCE 2 MARDI 7 – 20 H 50 MAGAZINE ans le cadre de son magazine « Cash In vestigation», France 2 diffuse une enquête sur les liens étroits tissés entre les industriels du tabac et le pouvoir politique – en France, mais sur tout en Europe. Le film, qui plon gera les téléspectateurs dans une profonde sidération, est excep tionnel à plusieurs titres. Il l’est d’abord par son sujet : le tabagisme est la première cause de mortalité évitable dans le monde et tue prématurément quelque 700 000 Européens cha que année. Il l’est ensuite par la vigueur de l’enquête conduite, par la portée de ses révélations et, enfin, par la nature même des sources qui le nourrissent. Laurent Richard et Elise Lucet ont eu accès à quelque 600 pages de documents internes de Philip Morris, certains ne remontant qu’à 2012. Une petite part du contenu de cette archive (un fichier détaillé des 750 députés européens) avait déjà été révélée par Le Parisien, en septem bre 2013. L’examen des fiches montre une surveillance systé matique et méthodique des parle mentaires. Celuici est « à sur veiller », tel autre est « en recher che de visibilité politique » ou « a provoqué un accident de la route sous l’emprise de l’alcool»… SÉLECTION DU MARDI Ruines, pleurs et deuil : dans Gaza dévastée « Mission terminée »: le ministre de REPORTAGE ne cache pas l’éducation considérera qu’il se GAZA bientôt en ENVOYÉ SPÉCIAL disponibilité pour ans les rues tâches. L’historien d’autres de Jabaliya, les enfants ont de l’éducation trouvé veau divertissement.un nouClaude Lelièvre explique lectionnent les éclats d’obusIls colcomment la missiles. Ils et de déterrent du rupture s’est sable des morceaux d’une faite entre les enseignants qui s’enflamment fibre compacte et Xavier Darcos. immédiatement au contact de Page 10 l’air D Automobile Fiat : objectif Chrysler et qu’ils tentent difficilement d’éteindre avec pieds. « C’est du phosphore. leurs dez comme ça Regarbrûle. Surles mursde » cetterue,destracesnoirâtres boutique. sont bes ont projeté visibles.Les bom- victime, Le père de la septième âgée de 16 ans, chimique qui partout ce produit re ne décolèa incendié pas. « Bonus Les banquiers ont cédé 19 27 000 profs partiront chaque année à la retraite, d’ici à 2012. Page 14 Edition Dites bien aux une fabrique de Au bord de dirigeants papier. « C’est petite des nations occidentales la mière foisque que ces sept je voiscela après la pre- innocents sont il y a quelquesfaillite huit ans d’occupation trentemorts pour semaines, rien. l’Américain israélienne », Qu’ici, il n’y a jamais s’exclame Mohammed Chrysler eu de tirs de roquettes. Que négocie l’entrée Abed bo. Dans son c’est costume trois Rab- nel. Que les Israéliensun acte crimidu cette figure constructeur nous en don- La parution du quartier pièces, nent la preuve, italien Fiat deuil. Six membres porte le puisqu’ils sur- de deux dans son capital, textes inédits de sa famille veillent tout depuis le ciel ont été fauchés », enrage de Roland Rehbi Hussein de 35 %. L’Italie à hauteur devant par Barthes, Heid. un magasin, une bombe mains, de cette bonne se réjouit il tient une Entre ses mort en 1980, le 10 janvier. Ils étaient venus enflamme feuille de le s’approvisionner papier avec tous cercle de ses pour l’économienouvelle pendant disciples. nationale. décrétéesles trois heures de trêve morts et des blessés,les noms des Le demi-frère Chrysler, de de son côté, aura tre aux par Israël pour permet- âge, qu’il énumère ainsi que leur l’écrivain, Gazaouis accès à une à plusieurs reprises, comme qui technologie Le cratère de de souffler. pour se persua- la publication, en a autorisé der qu’ils sont plus innovante. la bombe est jours là. Des bien morts. essuie touPage 12 éclats les foudres Michel Bôle-Richard mur et le rideau ont constellé le de l’ancien Algérie 80 DA, métallique éditeur de Barthes, Allemagne 2,00 Lire la suite ¤, Antilles-Guyane de la 2,00 ¤, Autriche page 2,00 ¤, Belgique et Débats page 5 François Wahl. 1,40 ¤, Cameroun Maroc 10 DH, 1 500 F CFA, 17 Page Norvège 25 KRN, Pays-Bas Enquête page Nicolas Sarkozy des dirigeants a obtenu françaises qu’ilsdes banques renoncent à la « part variable de leur rémunération ». En contrepartie, les banques pourront bénéficier d’une aide de l’Etat de 10,5 d’euros. Montantmilliards équivalent à celle accordée fin 2008. Barthes, la polémique 20 Le livre-enquête incontournable pour alimenter sur l’avenir de le débat l’école. Canada 2,00 ¤, Portugal3,95 $, Côte d’Ivoire 1 500 F CFA, Croatie cont. 2,00 ¤, un éditeur 18,50 Kn, Danemark Réunion 2,00 ¤, Sénégal 1 derrière l’écran 500 F CFA, Slovénie 25 KRD, Espagne 2,00 ¤, Finlande 2,20 ¤, Suède > www.arteboutique 2,50 ¤, Gabon 28 KRS, Suisse 2,90 FS, Tunisie 1 500 F CFA, Grande-Bretagne .com 1,9 DT, Turquie 1,40 £, Grèce 2,20 ¤, USA 2,20 ¤, Hongrie 3,95 $, Afrique 650 HUF, Irlande CFA autres 2,00 ¤, Italie 1 500 F CFA, 2,00 ¤, Luxembourg 1,40 ¤, Malte 2,50 ¤, RENDEZ-VOUS SUR www.lemonde.fr/boutique 80, bd Auguste-Blanqui, 75707 PARIS CEDEX 13 Tél : 01-57-28-39-00 Fax : 01-57-28-39-26 Imprimerie du « Monde » 12, rue Maurice-Gunsbourg, 94852 Ivry cedex Toulouse (Occitane Imprimerie) Montpellier (« Midi Libre ») 22 | styles 0123 MARDI 7 OCTOBRE 2014 La salledebainsprend enfinsoind’elle Celle qu’on nommait autrefois la salle d’eau devient un lieu de plaisir pour le corps et l’esprit E DESIGN stce une baignoire ou bien une fontaine, taillée dans un marbre vert venu d’Italie ? Estce une salle de bains ou bien un ham mam où recevoir ses amis, avec un canapé vert d’eau, une table basse en forme de galet, un ta bleau de Lucio Fontana et une su blime suspension d’Ettore Sott sass (19172007) ? Le décorateur Charles Zana a brouillé les pistes pour inventer cette salle d’eau – car c’en est une, exposée sous la nef du Musée des arts décoratifs, à Paris, dans le ca dre de « AD Intérieurs 2014, Dé cors à vivre » (jusqu’au 23 novem bre). Elle fait écho, par ses cou leurs et son luxe inouï, à celle de la couturière Jeanne Lanvin, nichée au quatrième étage du même mu sée, dans la collection perma nente Art nouveau. La créatrice de mode avait fait appel en 1920 au décorateur Ar mandAlbert Rateau (18821938), qui avait utilisé les précieux mar bre blanc de Sienne, marbre noir et ivoire pour créer sa salle de bains. « J’ai imaginé pour une ma dame Lanvin d’aujourd’hui, collec tionneuse d’art, cette folie dans la quelle le marbre émeraude répond au travertin beige du sol, ou le doré du laiton ensoleille la bibliothèque et jusqu’aux robinets créés sur me ÉDITION Livre lumière Inspiré par l’origami, l’archi tecte designer installé à San Francisco, Max Gunawan, a créé un livre qui se trans forme en lampion. Plus on ouvre les pages du Lumio, à couverture en bois de noyer ou d’érable, plus la lumière douce s’intensifie. Cette lampe nomade de 500 grammes scintille pen dant huit heures et se re charge sur prise USB. En exclusivité du 15 octobre au 15 novembre, à la boutique du Centre Pompidou, à Paris, au prix de 195 euros. Salle de bains Charles Zana. JACQUES PEPION « La salle de bains sera bientôt le pôle santé de la maison » DOMINIQUE BARUÉ directrice du showroom B’bath machine à café, remplie d’huile essentielle parfumée (SkinJay). On fait la part belle aux douches hydromassantes, comme celles du japonais Toto ou du belge Aquamass, et jusqu’au sauna hammamdouche, désormais compacté à l’extrême pour se glis ser dans « seulement » 3 m2 (Sasha Mi chez Jacuzzi). La cabine de douche a laissé la place aux espaces plus vastes, avec banc maçonné et anfractuo sités dans le mur pour ranger les flacons. Tandis qu’apparaissent de toutes petites baignoires qui s’installent en majesté dans la pièce, comme des grandes (Edge, du britannique Victoria + Albert, mesure moins d’1,50 m). « La Cabine » conçue par les designers de La Fonction avec Line Art, spécialiste du meuble de salle de bains. DR sure par la maison Volevatch, dans la Somme », précise Charles Zana, pour qui la salle de bains doit quit ter le blanc hygiéniste et devenir « une pièce d’art ». « J’ai ouvert l’es pace comme un prétexte à mon trer que l’on peut lire un bon bou quin dans son bain, dans un lieu de vie sensuel, partagé en couple ou en famille », s’enflamme l’archi tecte. Ce faisant, Charles Zana ne fait que théâtraliser la place que la salle de bains occupe désormais dans le cœur des Français. Ce n’est plus une pièce « technique », des tinée à se « débarbouiller », mais un havre de paix et de sérénité où l’on prend soin de soi, nu devant son miroir. Objectif : être bien dans sa peau. « Depuis deux ou trois ans, le concept a évolué : si la salle de bains est toujours fonc tionnelle, on lui demande d’éveiller les sens et d’apporter du bien être », confirme Dominique Ba rué, directrice du showroom B’bath, parmi les plus chics de la capitale. Ici, on privilégie l’épure : il ne s’agit pas de se lasser d’une pièce rénovée tous les trente ans environ, c’estàdire moins sou vent que la cuisine ! Eclairage intelligent Du mur au plafond, sont plébisci tés les camaïeux de beige, blanc ou taupe. Les couleurs s’effacent comme passées au soleil, tels les carreaux très graphiques « Azu lej » en grès cérame de Patricia Ur quiola. Carreaux lisses au sol, ratu rés dans la douche, dentelle de marbre au mur… C’est un jeu de textures et de formats de dalles différents qui rompt la monoto nie. La robinetterie disparaît dans les cloisons, les vasques sont mou lées dans le plan suspendu, pour donner l’illusion d’espace. Rien ne doit arrêter le regard, c’est pour quoi on limite les joints au mini mum avec de grands carreaux, du béton ciré ou du papier peint sur mesure pour pièce humide (OUT, de l’italien Wall & Déco). Cabine de curiosités Si la baignoire posée dans la chambre ne convainc pas encore tout le monde, il reste la possibilité de planter fièrement au milieu d’une pièce cette armoire de toilette XXL en chêne, repérée au dernier Salon Maison & Objet : « La Cabine » a été inventée par les jeunes designers de La Fonction, à Roubaix, avec Line Art, spécialiste du meuble de salle de bains en bois massif. Ouverte, elle dévoile un lavabo en céramique, des tablettes en marbre, moult rangements et deux miroirs. Fermée, elle dissimule l’éventuel désordre. Elle peut même tourner le dos au visiteur, faisant apparaître une psyché. La lumière est vive audessus du lavabo pour se raser ou se ma quiller le matin, mais elle doit pouvoir être tamisée ailleurs. Eclairage intelligent, enceintes intégrées dans les miroirs, bai gnoire ou douche gardant en mé moire le bain idéal (jets, débit et température de l’eau) ? Ce n’est plus de la sciencefiction. « La salle de bains sera bientôt le pôle santé de la maison », promet Do minique Barué. « On prendra sa température automatiquement, on surveillera son rythme cardia que et on travaillera sa gym à tra vers un miroir connecté avec un coach sportif… De fait, certains WC japonais permettent déjà de réali ser des analyses d’urine. » En attendant, le citadin s’offre une pause nature, avec des becs cascade ou des pommeaux « ciel de pluie », dans lesquels sont incrustés des LED qui diffusent une lumière apaisante ou énergi sante. On insère dans le flexi ble une dosette, façon capsule de « Un théâtre aux milles vies » Les salles d’eau ouvertes sur la chambre font la « une » des maga zines, mais Serge Lecat, président du Salon Idéo Bain, convient que peu de particuliers sont prêts à dormir dans une pièce humide et dépourvue d’intimité. « L’appar tement bourgeois avait été conçu autour de la représentation, c’est àdire des salons, et on collait la salle de bains dans un coin, sou vent sans fenêtre. Désormais, c’est un théâtre aux mille vies où, le ma tin, déboulent les enfants, avec bruit et éclaboussures, et où, le soir venu, une femme se maquillera tranquillement avant de sortir. C’est le lieu unique des retrou vailles avec le corps », résume la designer Mathilde Bretillot. Pour les Françaises, qui passent quarantesix minutes par jour dans la salle de bains, et les Fran çais, qui accordent trente et une minutes à leur toilette, elle a eu l’idée d’alcôves qui abritent la douche ici, le coin gym là, la vas que rétroéclairée là encore, et qui s’ouvrent, chacune à leur tour, sur l’appartement. « Il faut remettre la salle de bains au centre de la cons truction », estime cette architecte et scénographe d’espace. p véronique lorelle ENCHÈRES Mobilier de légende Artcurial mettra en vente, du 25 au 28 janvier 2015, le mobi lier de l’Hôtel de ParisMo naco, datant de 1864. Trois mille lots sont proposés aux enchères, comme le mobilier des 130 chambres dont celui de la suite Winston Churchill ou celle de Sarah Bernhardt, 400 pièces de vaisselle de ser vice et du linge de bain brodé aux initiales de l’hôtel. Le ca talogue sera disponible à par tir de décembre sur www.art curial.com CRÉATION Concours de bésicles A quoi ressembleront les lu nettes de demain ? Voilà la question sur laquelle de jeu nes étudiants en design vont se pencher à l’occasion de la 10e édition du Concours in ternational du design, orga nisé par le Syndicat des lune tiers du Jura. Cette année, c’est le thème «Fenêtre sur le monde», qui devra inspirer les futurs designers, tandis que Carole Favart, responsa ble du service design Kansei chez Toyot, succède à Ma thieu Lehanneur à la prési dence du jury. Au cours de ses neuf premières éditions, près de 6 500 jeunes créa teurs de 51 pays ont déjà con couru. www.designjura.com 0123 | 23 0123 MARDI 7 OCTOBRE 2014 PLANÈTE | CHRONIQUE par st é p han e foucart L’amour du risque (2/2) A insi, dans les repas de famille, on ne s’écharpe plus seule ment sur des ques tions de politique économique et d’immigration, sur le mariage gay ou la procréation médicalement assistée. A ces sujets de discorde s’en sont ajoutés d’autres ces der nières années. On s’affronte éga lement, et de manière croissante, sur le gaz de schiste, le change ment climatique, les OGM, etc. Avec, comme dénominateur commun à ces passes d’armes, le principe de précaution, inscrit dans la Constitution française de puis 2005 et objet, depuis quel ques années, des plus extrava gants fantasmes. Ce texte méritetil de voir tant de parlementaires se coaliser con tre lui ? Exigetil le « risque zéro » ? Estil ce redoutable frein à l’innovation et à la créativité scientifique et technique ? Estil la cause de tous nos maux ? D’abord, avant d’être « pour ou contre » le principe de précau tion, peutêtre fautil commencer par être capable de l’énoncer. Or, le fameux principe est un peu comme le monstre du loch Ness : il est capable de susciter une terri ble aversion sans qu’on soit vrai ment capable de dire à quoi il res semble. L’examen des archives de la presse quotidienne nationale et des principaux hebdomadaires est, à ce titre, éloquent. Parmi les tribunes hostiles au fameux prin cipe, publiées au cours des quatre dernières années, il a été impossi ble à l’auteur de ces lignes d’en trouver une seule prenant la peine de rappeler précisément en quoi il consiste. Voici donc un scoop à peu de frais, le voici tel qu’inscrit dans la Constitution : « Lorsque la réalisation d’un dom mage, bien qu’incertaine en l’état des connaissances scientifiques, pourrait affecter de manière grave et irréversible l’environnement, les autorités publiques veilleront, par application du principe de précau tion et dans leur domaine d’attri bution, à la mise en œuvre de pro cédures d’évaluation des risques et à l’adoption de mesures provisoi res et proportionnées afin de parer à la réalisation du dommage. » « C’est tout ? », eston fondé à demander, vu l’hostilité focalisée ces derniers mois sur le malheu reux principe. Oui, c’est tout. Et, à s’en tenir au texte, il est bien diffi cile d’y trouver à redire. Imagine ton, comme exemple de bonne gestion, que face à la possibilité d’un « dommage grave et irréver sible », les autorités s’abstiennent de mettre en œuvre des procédu res d’évaluation des risques et des mesures « provisoires et propor tionnées » pour l’éviter ? Inquiétude et écho médiatique On pourra objecter que, si bénin qu’il puisse paraître, son applica tion a pu être si maximaliste et déraisonnable qu’elle aurait con duit à des dommages économi ques. Estce la réalité ? La Fabrique de l’industrie – un think tank fi nancé par la fine fleur de l’indus trie française, coprésidé par Louis Gallois (PSA) et Denis Ranque (Air bus Group) – a commis un groupe de scientifiques et d’industriels IGNORER LES RISQUES A EU UN COÛT SUPÉRIEUR À L’EXCÈS DE PRÉCAUTION LE PRINCIPE DE PRÉCAUTION EST UN PRINCIPE RAISONNABLE chargés d’explorer, entre autres choses, cette question. Le résultat de ce travail est un bref opuscule, remarquable par son souci des faits et son esprit d’ouverture, qui paraît ces joursci aux Presses des Mines (Précaution et compétiti vité : deux exigences compati bles ?, par Alain GrangéCabane et Brice Laurent). L’un des constats tirés par le think tank, qui n’est pas précisément un repaire d’éco lodécroissants et de cryptocom munistes, est qu’« aucune loi à ce jour n’a été déclarée inconstitu tionnelle sur la base du principe de précaution » et que « son invoca tion par la jurisprudence reste pru dente et limitée ». Le principe de précaution est donc un principe raisonnable, rai sonnablement appliqué. Le pro blème, s’il y en a un, est donc ailleurs. Selon le think tank, « ce n’est pas le principe de précaution au sens juridique du terme » qui est en cause, mais « l’inquiétude exprimée par des citoyens ou des consommateurs devant certaines technologies » qui « poussent les politiques ou l’administration à produire des règles qui sont pour les industriels une source de con trainte et de coûts ». Cette inquié tude et l’écho médiatique qu’elle rencontre sont le fait, ajoute le think tank, d’« une perte de con fiance dans les institutions char gées de [la] protection » des ci toyens et des consommateurs. En 2012, dans le second volet de son rapport « Signaux précoces et leçons tardives », l’Agence euro péenne de l’environnement (EEA) a rassemblé quatrevingthuit cas d’école historiques, ayant été con sidérés par certains commenta teurs comme de « fausses aler tes », c’estàdire des situations dans lesquelles l’alarme donnée était trompeuse ou exagérée. En réalité, l’analyse conduite avec le recul du temps montre que seuls quatre cas, parmi les quatre vingthuit examinés, ont vu des mesures coûteuses et injustifiées être prises : la vaccination de masse, en 1976 au EtatsUnis, con tre la grippe porcine, ou encore l’obligation d’étiquetage de la sac charine, etc. Dans une trentaine de cas, la réalité des risques n’est toujours pas tranchée, mais au total, selon l’EEA, ignorer les risques a eu un coût économique et humain très largement supérieur à l’excès de précaution. Le principe honni n’est donc en réalité guère plus qu’un symbole, brandi dans quel ques situations où les enjeux po litiques et idéologiques sont sou vent plus prégnants que les en jeux sanitaires ou environne mentaux. A voir l’altération rapide du cli mat terrestre, la dégradation à grande échelle des océans ou l’érosion actuelle de la biodiver sité – on apprenait la semaine dernière, dans le dernier rapport du WWF, que les populations sau vages de vertébrés se sont rédui tes de moitié au cours des qua rante dernières années –, il est permis de se demander par quelle sorte de miracle des parlementai res ou des commentateurs peu vent encore penser sérieusement que notre principal problème est l’excès de précaution. p foucart@lemonde.fr Tirage du Monde daté dimanche 5lundi 6 octobre : 355 438 exemplaires ISRAËL COMPROMET LA CRÉATION D’UN ÉTAT PALESTINIEN B enyamin Nétanyahou passe pour être un homme politique de statu quo. Quand il s’agit de la recherche de la paix, le premier ministre israélien n’aurait qu’un programme : geler la situa tion en l’état, enterrer politiquement toute tentative de négociation sérieuse avec les Palestiniens. Rien n’est plus inexact. M. Nétanyahou vient encore de prouver qu’il avait un programme, poursuivi avec assiduité : développer sans cesse plus avant les implantations israéliennes en Cisjorda nie et dans la partie arabe de Jérusalem. Autrement dit, empêcher physiquement la possibilité d’un Etat palestinien. La semaine dernière, le gouvernement de droite que dirige « Bibi » Nétanyahou a donné son accord à la construction de 2 610 unités de logement dans une partie très disputée de JérusalemEst. Cette nou velle implantation rendra très difficile, si non impossible, d’aller vers un règlement de paix fondé sur la solution dite « des deux Etats» : un Etat palestinien aux côtés d’Israël. L’ensemble prévu va séparer les Palesti niens de Jérusalem du reste de la Cisjorda nie, brisant la continuité entre la Ville sainte et le territoire qui pourrait accueillir l’essentiel d’un Etat palestinien. L’annonce de ce programme immobilier est intervenue mercredi 1er octobre, le jour même où M. Nétanyahou, de retour de l’As semblée générale de l’ONU, à New York, était reçu à Washington par le président Ba rack Obama. Il n’est rien sorti de cet entre tien, sinon un communiqué rageur de la Maison Blanche dénonçant la dernière dé cision du gouvernement israélien. Celleci « empoisonne l’atmosphère » et « conduit à s’interroger sur la sincérité de l’engagement d’Israël à arriver à un règlement négocié, pa cifique, avec les Palestiniens », a dit la prési dence américaine. La Maison Blanche aura rarement con damné aussi clairement la politique du gouvernement Nétanyahou. Elle avait im plicitement déjà reconnu que la colonisa tion continue était à l’origine de la rupture, en avril, de la médiation entre Israéliens et Palestiniens à laquelle le secrétaire d’Etat, John Kerry, s’est efforcé durant neuf mois. Deux jours plus tôt, à l’ONU, le premier ministre avait assimilé le Hamas au groupe djihadiste dit « Etat islamique » – une ma nière d’exclure à l’avance toute possibilité de négociation entre Israël et un gouverne ment palestinien d’unité représentant à la fois le Fatah et le Hamas. Il avait aussi fait part de toute sa méfiance à l’égard des né gociations nucléaires en cours avec l’Iran – qualifié d’un des pays les plus dangereux du monde. Sans doute étaitce là sa manière de ré pondre à M. Obama qui, quelques jours plus tôt à la même tribune, avait fait cette remarque attristée : « La violence qui sub merge aujourd’hui la région [le Moyen Orient] conduit trop d’Israéliens à abandon ner le difficile chemin de la paix [avec les Pa lestiniens]. Ce devrait être un sujet de réflexion en Israël. » Benyamin Nétanyahou est assuré d’un soutien sans faille au Congrès américain, notamment du côté des républicains. Ceuxlà s’apprêtent à élargir encore leur majorité à la Chambre des représentants et peutêtre à gagner le Sénat lors du scrutin législatif de mimandat, le 4 novembre. Le premier ministre profite de la faiblesse de Barack Obama. p Pour paraphraser ce dernier, cela devrait être un sujet de réflexion à la Maison Blan che. p LE FUTUR DE L’AUTOMOBILE EST À PARIS PARIS EXPO PORTE DE VERSAILLES — 10H-20H - NOCTURNES JEUDI & VENDREDI JUSQU’À 22H BILLETS EN VENTE — WWW.MONDIAL-AUTOMOBILE.COM — MAGASINS AUCHAN, CARREFOUR, CORA, CULTURA, E.LECLERC, FNAC, FURET DU NORD, GALERIES LAFAYETTE, GEANT, INTERMARCHE, MAGASINS U # MondialAuto - www.facebook.com/mondial.automobile
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